Publié le 4 Sep 2017 - 15:26
12e EDITION DE LA COLONIE DE VACANCES DE LA CITADELLE MUSULMANE

A l’école du Coran et des hadiths

 

L’éducation des enfants demeure un véritable casse-tête pour les parents. Depuis 12 ans, l’association La citadelle musulmane pour l’éducation et l’information de la jeunesse organise des camps de vacances où, pendant un mois, les enfants sont coupés de la télé, d’Internet et uniquement focalisés sur l’apprentissage du Coran, des hadiths et du sira. ‘’EnQuête’’ s’est rendu dans ce camp. Reportage.

 

Le CEM du village Mballing a accueilli la 12e édition de la colonie de vacances de l’association La citadelle musulmane pour l’éducation et l’information de la jeunesse. Plus d’une centaine d’enfants de 5 à 17 ans, accompagnés de moniteurs, ont logé dans ce CEM pendant un mois.

En ce beau matin, l’ambiance est festive. Les gosses sont sur leur trente-et-un, car ils reçoivent des invités spéciaux : leurs parents. Les préparatifs vont bon train. Les plus petits courent dans tous les sens. Leurs cris résonnent partout dans la grande cour de l’établissement. Un couple marche tranquillement en direction des salles de classe qui font office de dortoirs pour les jeunes colons. Leur regard est captivé par un petit boutchou de 6 ans qui court vers eux. Arrivé à hauteur de ses parents, l’enfant enlace son papa, sous le regard attendri de la maman. Cette dernière craque et laisse échapper quelques larmes vite essuyées, à la vue de son enfant qui vient de passer un mois loin d’elle. Le petit Kébé échange des propos innocents avec ses parents. ‘’Je ne t’ai pas manqué ?’’, demande Mme Kébé au petit qui réplique innocemment : ‘’Si, tu m’as manqué.’’ Mais, rapidement, le jeu reprend le dessus. Il court retrouver ses amis.

En effet, pendant ce mois, il s’est fait de nouveaux amis. Il plante là ses parents qui n’ont pas encore fini de profiter de lui. Ils ne lui en tiennent pas rigueur. ‘’C’est la première fois que je l’emmène ici. Je n’ai pas voulu l’envoyer dans les colonies classiques où l’on ne fait que danser et chanter. Quand j’étais petit, je voyais des colons venir dans l’institut où je vivais avec mes parents. Je me suis rendu compte qu’aucune formation religieuse n’était dispensée aux enfants. Nous avons besoin que les préceptes de notre religion soient inculqués à nos enfants. En l’emmenant ici, je veux qu’il soit responsable et se débrouille’’, soutient le papa Amath Kébé. 

 Son avis est partagé par Omar Diongue qui a inscrit trois de ses enfants. ‘’Nous avons choisi de faire participer nos enfants à cette colonie afin qu’ils soient responsables, qu’ils soient des citoyens modèles, d’une responsabilité sans égale. Cette colonie allie l’utile à l’agréable. Ils ont une éducation islamique très poussée et cette éducation profane qui leur permettent d’être des citoyens complets. Quand ils reviennent à la maison, on note un changement très positif dans leurs comportements. Ils assimilent beaucoup de valeurs qu’ils mettent en pratique à la maison’’.

La journée porte ouverte a été pleine d’enseignements pour les parents et les visiteurs. Les enfants ont fait un exposé sur la vie du Prophète [Psl] en citant quelques hadiths. Avec une maitrise toute particulière, ils ont récité des versets du saint Coran, allant de Bakhara à Ar Rahman.

La tyrannie de la télé et d’Internet

De nos jours, les parents sont mis en minorité dans l’éducation de leurs enfants, à cause de la présence envahissante des appareils technologiques comme les téléphones portables, l’ordinateur, les tablettes, entres autres. Un processus accéléré par un haut débit d’Internet, et qui ne manque pas de les détourner, à l’instar de ‘’Sata Koba’’ qui, ironie du sort, est quasiment toujours la première de sa classe. ‘’Dans nos foyers, nous avons deux concurrents très sérieux : la télé et l’Internet. Tu veux éduquer tes enfants, tu voudrais les canaliser, les conduire sur une voie de salut, mais il y a des concurrents qui s’incrustent dans votre foyer à des moments de communication, à des moments d’attention. Donc, si nous n’avons pas des moyens pour soutirer nos enfants de ces concurrents-là, il y a problème. Si cette colonie islamique nous permet d’éloigner nos enfants de la télé et de l’Internet, je crois qu’il n’y a pas meilleur moyen de les concurrencer’’, déclare Maguette Sène, Maire de Malicounda. L’édile dont les enfants participent à cette colonie depuis dix ans.

Ainsi, pendant un mois, loin de la télé et d’Internet, l’enfant est concentré dans son apprentissage du Coran, des hadiths, du sira [le vécu du Prophète], des prières et des incantations. Fini l’univers cossu et douillet de la maison, bienvenue dans un milieu sans papa et maman, sans télé, ni Internet. ‘’Depuis dix ans, j’emmène mes enfants dans cette colonie islamique. Nos directions du ministère des Finances organisent des colonies, même hors du Sénégal. Moi, j’ai choisi d’emmener mes enfants dans cette colonie et je ne le regrette pas. Cette colonie façonne les enfants sur la voie de l’islam’’, explique Maguette Sène.

Imam Aboubacar Diankhé : ‘’L’enfant est l’avenir de toute nation’’

Avec le travail, durant neuf mois, les parents sont dans l’expectative et prennent leur mal en patience. Dès que les grandes vacances arrivent, certains éloignent leurs marmots de la maison en les envoyant dans un camp. L’enfant est éloigné du cocon familial. Il atterrit dans un milieu où il est loin d’être dépaysé, car il est entouré d’autres enfants de son âge.

Cependant, les colonies sont nombreuses, mais ne se ressemblent pas. Celle de l’association La citadelle musulmane pour l’éducation et l’information de la jeunesse rompt d’avec la tradition des colonies classiques où l’on ne retrouve que chants et danses.

De nombreux parents ont pris l’option d’y envoyer leurs enfants. L’initiateur de ce camp, imam Aboubacar Diankhé de la mosquée de Bel Air, renseigne que cette colonie de vacances forme, depuis 12 ans, des enfants venus d’horizons divers. ‘’L’enfant est l’avenir de toute nation. Devenu grand, il peut être un futur magistrat, docteur, administrateur, professeur d’université, président de la République. Quand nous avons su que chaque année, beaucoup d’enfants perdaient la vie en mer pendant les vacances, nous avons pris l’initiative d’organiser cette colonie. On apprend beaucoup de choses à l’école. Mais l’école ne nous apprend pas à faire des incantations du genre : quoi dire avant de se coucher, de se lever du lit, de porter un boubou, quand on entre dans les toilettes, quand on va au marché’’, soutient l’imam.  

KHADY NDOYE [MBOUR]

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