Publié le 16 Feb 2019 - 02:00
20e CONGRES DE L'ASEA

Les ambitions de Mouhamadou Makhtar Cissé

 

Les congrès de l'Association des sociétés d’électricité d’Afrique (Asea) se suivent et se limitent au ‘‘folklore’’ et aux ‘’retrouvailles’’. Le directeur général de la Senelec, Mouhamadou Makhtar Cissé, Président du comité scientifique du prochain colloque prévu à Dakar, n’a pas l’intention de perdre son temps. Il veut des résultats et des avancées.

 

Dakar abrite, l’année prochaine, le 20e Congrès de l'Association des sociétés d’électricité d’Afrique (Asea). Pour une bonne marche de l’évènement où plus de mille experts sont attendus, les responsables de cette structure ont procédé, hier, à l'installation du comité national d'organisation dudit congrès. Le directeur général de la Senelec a saisi l’occasion pour demander aux acteurs de produire des documents scientifiques qui pourront être utilisés pour régler les questions d’accès à l’électricité en Afrique. ‘’Nous organisons beaucoup de congrès, en Afrique. Ce que je refuse, c’est d’organiser un évènement, de rassembler des milliers de personnes pendant 5 jours, dépenser l’argent du contribuable, après, même s'il y a des documents, parfois bons, ne sont d’aucune utilité, à cause d’un manque de suivi’’, souligne Mouhamadou Makhtar Cissé.

Pour le Dg de la Senelec, par ailleurs Président du comité scientifique de ce congrès, on privilégie souvent, lors de ces rencontres, le ‘’folklore, les retrouvailles’’, plus la manifestation dans sa dimension ‘’culturelle’’ que le ‘’contenu scientifique’’ par rapport aux préoccupations des populations africaines.

Or, selon M. Cissé, le développement du secteur de l’électricité, à travers le continent, nécessite une approche ‘’rigoureuse’’. ‘’La fourniture de l’électricité à tous nos citoyens doit être garantie. Ce qui a un prix. Dans ces conditions, il faut voir comment, à défaut d’être rentable ou profitable, équilibrer au moins pour continuer à assurer ce service public. C’est une problématique fondamentale. Si nous n’adressons pas correctement ce problème, on viendra acheter toutes les activités de nos services publics et nous laisser les charges’’, dit-il.

‘’Il y a encore 600 millions d’Africains qui utilisent encore des bougies’’

Pour Mouhamadou Makhtar Cissé, vu la dynamique mondiale de la marche de l’économie, il est primordial d’adresser cette question de façon ‘’fondamentale, très pertinente’’. Et pour cela, il estime que l’expertise existe en Afrique. ‘’Le problème de l’accès reste encore fondamental. Il y a encore 600 millions d’Africains qui utilisent encore des bougies. Des enfants continuent à étudier le jour avec la lumière du soleil. Or, le développement de l’Afrique est fortement hypothéqué par l’accès à l’électricité. La technologie doit permettre, aujourd’hui, d’accélérer le processus. La digitalisation, c’est pertinent. Mais quelles sont les articulations à faire et quel partenaire, quel financement ? C’est important’’, préconise le patron de la Senelec.

Toutefois, M. Cissé a indiqué que le Sénégal a l’avantage d’être l’un des pays où le taux d’accès est le plus ‘’important’’ en Afrique de l’Ouest et au sud du Sahara. ‘’La moyenne africaine tourne autour de 30 %, au moment où, au Sénégal, nous ne sommes pas loin de 50 % en termes de taux global d’accès. Sur l’accès urbain, on est à plus de 90 % et le rural à 40, voire 42 %. L’objectif, c’est d’arriver à l’accès universel en 2025’’, relève-t-il.

Mais le Dg de la société sénégalaise en charge de l’électricité admet qu’on ne peut pas adresser la question de l’accès, du service public, si on ne parle pas d’efficacité énergétique. ‘’Dans un pays pauvre comme le nôtre, la première source d’énergie doit être l’économie d’énergie. Notre première centrale, dans tous les pays, doit être virtuelle. Les solutions seront endogènes. Elles partiront de chez nous, de nos cadres, de notre expertise. Il n’y aucune fatalité de sous-développement ou de pauvreté en Afrique. Toutes les ressources humaines et naturelles existent pour prendre en charge notre destin. C’est le rôle des élites’’, insiste-t-il.

Abel Didier Tella : ‘’C’est que nous voulons en Afrique…’’

Au fait, le thème central du 20e Congrès de l’Asea est ‘’Comment concilier service public et efficacité’’. Une question que M. Cissé juge ‘’transversale’’ et qui a traversé toutes les sociétés africaines de l’électricité, qu’elles soient privées ou publiques. Sur ce, le Dg de l’Asea a signalé qu’il y a ‘’tous les niveaux’’ de développement du secteur en Afrique. Il y a des pays qui ont 100 % de taux d’électrification, d’autres ont 10 %. ‘’Donc, nous avons une forte plateforme de coopération Sud-Sud. Le savoir-faire est transmis d’une société à une autre et nous avons aussi des bases solides d’interaction avec les pays du Nord. Le défi c’est, aujourd’hui, de lier tout ce qui est service social avec l’assurance de la performance. Nous sommes dans un antagonisme économique’’, renchérit Abel Didier Tella.

 Selon lui, si on est social, on ‘’n’est pas performant’’ et si on est performant, on risque de ‘’ne pas être social’’. Donc, les deux doivent aller de pair. ‘’Et c’est le challenge. C’est que nous voulons en Afrique un accès universel, limiter les coûts, avoir toutes les technologies, être à l’heure de la digitalisation. Les 50 ans de l’Asea correspondent aussi à une ère nouvelle pour le secteur. Cette globalisation touche en premier notre secteur. Parce qu’il est passé de secteur physique à virtuel’’, conclut-il.

MARIAMA DIEME

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