Publié le 1 Oct 2018 - 19:26
22e MAIRE DE DAKAR DEPUIS 1887

Soham El Wardini, première du genre

 

La ville de Dakar (Vdd) a une nouvelle mairesse, depuis samedi. Soham El Wardini, la première adjointe au maire révoqué, Khalifa Sall, a été portée à la tête de la plus grande municipalité de ce pays.

 

‘‘Il est des jours, dans la vie des hommes et des femmes, qui comptent plus que d’autres. C’est le cas lorsqu’on accède à la prestigieuse fonction de maire de capitale de son pays. Une première pour une Sénégalaise’’. Dans la salle de délibérations de la mairie de Dakar, le pléonasme, dans la dernière phrase proclamée par Soham El Wardini, qui vient juste de succéder à Khalifa Sall, est flagrante. Mais l’émotion et surtout la date mémorable de ce samedi 29 septembre 2018 excusent ce petit écart de langage. La première adjointe au maire Khalifa Sall, depuis 2009, devient la première mairesse du ‘‘premier’’ département de ce pays ; même s’il lui reste moins d’une année de gestion et même si des circonstances particulières ont concouru à son élection samedi dernier.

Avec 64 votes pour, elle a balayé au premier tour les deux autres candidats, tous membres de la même coalition (Taxawu Dakar) qui a porté Khalifa au sommet de sa carrière politique. Moussa Sy (13 voix) et Banda Diop (11) n’ont pas été de taille face à la candidate parrainée par le maire révoqué. Cette dernière a, de suite, lancé un discours d’usage dans lequel elle assure qu’elle sera dans la continuité de son prédécesseur dont elle expédiait les affaires courantes depuis mars 2017. ‘‘Il me plait de remercier tous les maires des communes, à commencer par Khalifa Ababacar Sall qui, sans discontinuer depuis 2009, m’a honorée de son soutien et de son affection. Son œuvre sera poursuivie’’, a déclaré la nouvelle élue.

Preuve de cette continuation, même le dressing-code du maire a été reproduit. Drapée dans un grand boubou blanc, encadrée du maire de la Médina Bamba Fall, habillé pareillement, Soham El Wardini affiche déjà ses objectifs pour les 19 communes du département. ‘‘Aujourd’hui, ce qui compte, c’est que, rassemblés dans nos différences et unis dans nos diversités, nous restons tous les yeux rivés sur l’avenir. En regardant dans la même direction, au service exclusif des Dakarois. C’est tous ensemble que nous réussirons à faire de Dakar une vraie belle ville’’.

Mais la 22e maire de Dakar est tout de suite revenue à plus de lucidité, dans une interview en marge de la cérémonie. ‘‘Notre objectif est de terminer les projets que nous pourrons. Ce sera très difficile, je sais, nous sommes en politique, en attendant la libération du maire. Je pense que les conseils ont été assez consciencieux de me laisser à la tête de la ville pour terminer certains projets qu’on avait décidé de finir’’, a-t-elle avancé.

Victoire à la Pyrrhus

Dakar est donc restée fidèle à Khalifa Sall. Mais comme il est d’usage, depuis quelque temps, ses victoires lui coûtent cher. Celle-ci n’échappe pas à la règle. Si la ‘’protégée’’ du maire révoqué est numériquement bien élue, le navire qui porte les ambitions politiques de Khalifa Sall depuis presque une décennie, Taxawu Dakar, prend l’eau de toutes parts. La coalition a reçu les premiers contrecoups de cette guerre fratricide de samedi, dans la foulée de l’élection de Soham. ‘‘Je vous informe du gel de toutes mes activités politiques dans Taxawu Dakar’’, a annoncé le troisième au classement, le maire de la Patte d’Oie Banda Diop. C’est dans un post laconique sur sa page Facebook où il ‘‘félicite chaleureusement Mme Soham El Wardini’’ et lui ‘‘souhaite un excellent magistère’’, qu’il a annoncé la mise à l’arrêt de son engagement auprès de Khalifa.

La veille vendredi, l’autre postulant et non moins maire des Parcelles-Assainies, Moussa Sy, versait dans un absolutisme électoral dans les colonnes du journal ‘’Le Quotidien’’, en agitant sa démission de cette coalition, si la mairie lui échappait.  ‘‘Soit je suis élu, soit je démissionne’’, s’est-il emporté, alors que sa candidature pour succéder à Khalifa a été rendue publique pratiquement la veille du vote. En début de semaine dernière, le journal ‘’Les Echos’’ annonçait sa jonction avec le camp présidentiel (Apr) auquel il a concédé une défaite, lors des législatives de 2017 dans sa commune très stratégique.

Ses apparitions publiques assumées avec le ministre des Finances Amadou Ba rendent cette hypothèse plausible. La nouvelle élue, membre de l’Afp, semble surprise de la tournure que prend le compagnonnage avec le maire des P.-A. ‘‘Pour l’autre candidature (Ndlr : Banda Diop), nous étions au courant depuis deux semaines, mais celle de Moussa nous a surpris, mais je lui tends la main. Nous avons travaillé depuis 2009. Et à un an du terme, nous devons pouvoir finir ce mandat ensemble pour le bien-être des Dakarois’’, a-t-elle calmé dans un appel à des retrouvailles.

Si Dakar n’a pas avalisé l’ostracisme politique qui frappe le maire Khalifa Sall, ces probables défections fragilisent un peu plus une coalition privée de son leader, en perte de vitesse à chaque échéance. Entre la razzia électorale mémorable des élections locales de juin 2014 (16 communes sur 19 remportées par Taxawu Dakar) et le remplacement du maire révoqué, des départs importants de ses ex-camarades socialistes et des alliés d’autres partis ont affaibli la coalition Taxawou Dakar. Les conseillers ‘‘apéristes’’ qui ont eu la ‘‘délicatesse’’ de ne pas présenter de candidature, espèrent profiter de ces failles pour porter l’estocade, dans un an.  

OUSMANE LAYE DIOP

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