Publié le 17 Jan 2012 - 18:31
23 LIONS CAN 2012

Kader Mangane : vieux premier

Kader Mangane

 

Novembre 2003-janvier 2012 : ci-gît l’attente de Kader Mangane. Admis en sélection, il y a plus de huit ans, le natif de Thiès a dû attendre longtemps pour jouer sa première CAN. Certains parleront du capricieux rebond du destin, d’autres de rendez-vous inexplicablement manqués. Toujours est-il que Kader n’aura jamais vu Tunis (2004), le Caire (2006), et Accra (2008) que la Tanière avait visités.

 

Bata sera donc la ville témoin d’une révision de l’histoire de la carrière de Mangane aujourd’hui vice-capitaine de la sélection nationale, derrière Mamadou Niang. Kader Mangane est un Lion qui en impose de par ses performances et sa carrure. Leader dans l’âme sans être une grande gueule, le Thiessois est le taulier d’une défense des Lions qui n’a concédé que deux buts lors des éliminatoires à la Can 2012. Amara Traoré compte sur lui autant que sur des joueurs comme Mamadou Niang ou Moussa Sow.

 

 

50.000 F Cfa par mois

 

 

Dans cette sélection, il est l’un des rares joueurs à avoir débuté sa carrière au Sénégal. Pour le natif de Thiès, tout avait démarré naturellement dans les Navétanes à l’As Manko avant que le grand club de la ville, l’Us Rail, ne le repère et ne l’incorpore dans ses effectifs de jeunes. En juniors, en 2000, le jeune Kader impressionne ses entraîneurs qui décident très vite de le surclasser chez les seniors qui évoluent en première division du Sénégal.

 

Il est alors une belle promesse qui ne va pas tarder à étaler ses énormes qualités. "Pour ne pas le perdre, je l'avais pris comme stagiaire dans l'équipe première avec un salaire de 50.000 F Cfa par mois, raconte son ancien président à l’Us Rail, Ousseynou Keïta. Des trois juniors concernés, Kader était le plus constant. Dès qu'il est rentré au milieu, il n'y est plus sorti. Le groupe était très fourni, mais il parvenait à tirer son épingle du jeu. C'était déjà un homme calme, sérieux. Sur le terrain, il se distinguait par son bon coup de botte. Il a marqué beaucoup de buts à 30, 45 mètres."

 

Le talent précoce attire très vite l’intérêt des recruteurs des clubs européens. Après une saison encourageante avec l’Us Rail, Kader se laisse convaincre par Neuchâtel Xamax (Suisse) et fait le grand saut dans le professionnalisme en 2001. "Là-bas, j'ai bien observé et compris ce que je devais faire pour y arriver. J'ai pu prendre le temps de travailler, d’être sérieux. Je n'avais qu'un seul but : réussir", racontera-t-il plus tard. Puis, tout s’enchaîne : la Suisse découvre ce grand milieu de terrain défensif déterminé qui passe en 2007 au Young Boys Berne. Lors d’un match aller du 2e tour préliminaire de la coupe UEFA, entre son club et Lens, en 2007, Kader Mangane fait forte impression. Guy Roux, qui le voulait déjà quand il dirigeait Auxerre, l’attire à Lens en 2008.

 

Le Thiessois découvre le championnat de France. Il a 24 ans et a envie de s’imposer au haut niveau. "Je viens dans le championnat de France pour continuer mon apprentissage du haut niveau et aller plus haut", déclarait-il à l’époque. Lens rétrogradé en Ligue 2 la saison suivante, Kader joue un seul match à l’étage inférieur et file à Rennes, un club plus ambitieux et plus conforme à ses attentes.

 

Là-bas, il redécouvre la Coupe d’Europe, l’ambition, le capitanat et met coéquipiers et entraîneur dans sa poche. Hommage de son coach, Frederic Antonetti, pourtant pas réputé pour faire des cadeaux à ses joueurs : "Kader, c’est le niveau Ligue des Champions. C'est un de mes piliers. C'est un joueur sur lequel on peut s'appuyer. C'est le top pour un entraîneur. " Rien que ça !

 

 

Snobé ?

 

A 28 ans, comment comprendre que Kader Mangane ne compte que 18 sélections avec l’équipe nationale du Sénégal ? Aujourd’hui pilier de la défense des Lions, et vice-capitaine, le Thiessois a longtemps été snobé par les différents sélectionneurs qui se sont succédé à la tête de la Tanière.

 

Tout avait pourtant bien débuté pour lui qui allait honorer sa première cape en novembre 2003 et offrir à El Hadji Diouf une passe décisive pour une victoire en amical contre la Côte d’Ivoire (1-0). Puis, plus rien. A l’époque, le jeune Mangane, qui évolue encore en Suisse, joue comme milieu défensif et, est barré en sélection par Pape Bouba Diop, Aliou Cissé, Pape Sarr ou Amdy Moustapha Faye.

 

Du beau monde pour un joueur quasi-inconnu au haut niveau en ce temps. "Je dois tout simplement travailler et attendre la décision des techniciens même si comme tous les autres footballeurs professionnels, on a envie de jouer pour son pays", soufflait-il à l’époque. Il faudra attendre 5 ans, en 2008, pour revoir Mangane en sélection. Lamine Ndiaye, alors sélectionneur des Lions, le rappelle pour le début des éliminatoires combinées Can-Mondial 2010. Une longue "mise à l’écart" qui n’a jamais entamé son professionnalisme. "J’ai toujours su être patient pour mieux saisir ma chance", dira-t-il, sobre et égal à lui-même.

 

Replacé entre-temps en défense centrale, en club comme en sélection, Kader Mangane profite du déclin de certains joueurs, en équipe nationale, comme Lamine Diatta, pour se faire sa place au soleil. Lamine Ndiaye parti par la petite porte en 2010, Amara Traoré décide d’en faire son taulier en défense centrale. Derrière, il combine avec Souleymane Diawara ou Pape Malickou Diakhaté mais demeure un titulaire indiscutable. "Mangane a beaucoup de personnalité, assure Amara Traoré, le sélectionneur national.

 

On ne l'entend pas, mais il a beaucoup d'influence dans le groupe. Il est très respecté et écouté. Il incarne beaucoup de choses. C'est à la fois un leader tactique et un leader moral." Depuis, il n’a manqué aucun rendez-vous avec la sélection, hormis ses forfaits sur blessure, et a permis de redonner une âme à la défense des Lions.

 

 

L’envie chevillée au corps

 

S’il est aujourd’hui un footballeur confirmé en Europe, au point d’être sur la short-list de clubs huppés du vieux continent, Kader Mangane doit encore convaincre l’Afrique à l’occasion de la grande messe de janvier-février 2012.

 

Pour sa première participation à la Can, le Thiessois pourrait amener dans ses bagages son envie folle d’ouvrir son palmarès international, si jamais sa récalcitrante cheville le laisse en paix. Le Rennais a démontré lors des éliminatoires à cette Can qu’il est capable de voyager en Afrique. "Il est l’heure pour le Sénégal de remporter cette Can", n’a-t-il de cesse de répéter. Ça tombe bien : tout un peuple prie pour ce bonheur continental.

 

La première sélection

Pour sa première sélection avec l’équipe nationale A, Kader Mangane, appelé par Guy Stephan, avait fait fort. Ce 17 novembre 2003, en plein mois de ramadan, le Sénégal prépare la CAN 2004 et affronte la Côte d’Ivoire, non qualifié, en match amical au stade Léopold Senghor. La rencontre est loin d’être la meilleure production des Lions qui, quelques mois auparavant, avaient ébloui l’Afrique (Can 2002) et le monde (Coupe du monde 2002).

 

Arrive la 92e minute : Kader Mangane, entrée en cours de jeu, accélère et effectue un centre depuis la droite pour El Hadji Diouf. Ce dernier s'arrache, contrôle du droit et loge la balle au fond de la cage adverse. Cette première est une belle promesse sur l’avenir. Malheureusement pour lui, Kader Mangane devra patienter encore 5 ans avant de connaître sa seconde sélection. Inexplicable !

 

Repères

Kader Mangane, né le 23 mars 1983, à Thiès

Taille : 1,93 m

Poids : 87 kg

Poste : Défenseur central

Clubs successifs : Neuchâtel Xamax (2001-2007) ; Young Boys Berne (2007-août 2008) ; Lens (août 2008-août 2009); Rennes (août 2009-2013)

Palmarès :

Champion de Ligue 2 en 2009 (Lens)

Finaliste de la Coupe de la Ligue en 2008 (Lens)

 

Ndiassé SAMBE

 

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