Publié le 7 Oct 2019 - 23:25
ABDOULAYE BAR DIOUF, AGENT DE JOUEURS EN ITALIE

‘’Kalidou Koulibaly est mentalement épuisé’’

 

Dans un entretien accordé à ‘’EnQuête’’, l’agent intermédiaire du football africain résidant à Brescia, en Italie, Abdoulaye Bar Diouf, aborde plusieurs sujets dont le match amical Brésil-Sénégal du 10 octobre prochain. Analysant le début de saison en dents-de-scie de Kalidou Koulibaly et Naples, M. Diouf estime que le défenseur central sénégalais a besoin de repos, parce qu’il est mentalement fatigué, à cause du nombre important de compétitions jouées lors de l’exercice précédent.

 

Le Sénégal va affronter le Brésil en match amical, ce 10 octobre. N’est-ce pas un excellent sparring-partner pour Aliou Cissé et les Lions ?

C’est un excellent sparring-partner pour Aliou Cissé et son équipe, parce que le Brésil est déjà une grande équipe. Si on prend pays par pays, le Brésil est numéro un mondial en matière de football, avec ses victoires en Coupe du monde (5 titres), ses stars, la performance de son équipe nationale au niveau continental. C’est aussi important pour le football sénégalais à travers sa fédération.

Sur le plan financier, le marketing et le nom du Sénégal qui sera affiché et connu à travers le monde. Le Brésil est toujours regardé à travers le monde. Cela va aussi donner de l’importance à nos footballeurs qui commencent à côtoyer les plus grands joueurs du monde que sont les Brésiliens, les Argentins… Qui sont un peu partout dans le monde avec qui ils partagent les clubs ou qu’ils affrontent durant les compétitions de clubs. C’est une bonne chose pour une équipe qui effectue sa première sortie après une bonne participation à une Coupe d’Afrique, malgré une finale perdue. C’est aussi important pour la revalorisation de la destination Sénégal, du point de vue touristique. Même le côté économique, c’est aussi une aubaine pour le Sénégal, parce que certains, à travers ce match, peuvent nourrir la curiosité de connaitre le Sénégal et chercher à y invertir.

Dans le cadre de ce match, le sélectionneur a publié une liste de 23 joueurs, avec le retour de certains jeunes qui n’avaient pas pris part à la Can, comme Sidy Sarr, Ndiaye Loum, Habib Diallo. Ne pensez-vous pas qu’il est temps de les responsabiliser davantage ?

Faire partie des 23 sélectionnés parmi les joueurs sénégalais, c’est déjà une responsabilité donnée à ces jeunes. Habib est en train de faire de bonnes choses. Sidy Sarr est aujourd’hui à Nîmes où il joue. C’est un jeune joueur qui a fini de confirmer même en équipe nationale dans toutes les catégories. Il a pris ses responsabilités. Loum Ndiaye est aussi un joueur qu’on a connu en équipe nationale, qui a fait ses pas au Sénégal avant de partir. Ce sont des gosses qui peuvent apporter quelque chose. Mais ce sont eux qui doivent inscrire leurs noms en sélection nationale. Il faut des changements après une compétition, parce qu’il y a des joueurs qui sont en fin de cycle ou qui n’ont pas confirmé durant la compétition et qui ne sont pas dans les dispositions de le faire en club en ce moment.

Ces joueurs n’ont plus leur place en équipe nationale. C’est pour les joueurs qui sont performants, qui se donnent dans leurs clubs et sont à l’aise en sélection. Un joueur peut même être bien dans son club et ne pas l’être en équipe nationale. Celui-là ne mérite pas une convocation. Aujourd’hui, c’est regrettable de ne voir un joueur comme Henri Saivet à cause de sa situation en club. C’est normal parce qu’il ne joue pas comme il devrait le faire. C’est à lui de trouver une solution à sa situation en club pour être sélectionnable. Avant la Coupe d’Afrique, je disais que certains joueurs comme Dame Ndoye, Papiss Demba Cissé avaient leur place en équipe nationale.

Car, dans des situations comme la finale qu’on a jouée contre l’Algérie, ce sont ces joueurs qui allaient apporter une petite astuce. Le Sénégal allait être champion d’Afrique. Des joueurs comme Mbaye Diagne… J’ai toujours dis que ce n’est pas le joueur qui va apporter quelque chose au Sénégal en Coupe d’Afrique. Je l’ai supervisé depuis qu’il est venu en équipe nationale. Ce sont des joueurs sur lesquels il ne faut pas miser. Faire beaucoup de bruit et ne pas être décisif dans un match déterminant. Sidy, par exemple, c’est un gosse qui a montré en marquant le but de la qualification à la Can 2019 (0-1 pour le Sénégal contre le Soudan à la 86e mn, 4e journée des éliminatoire, Ndlr). C’est un joueur qui a pris ses responsabilités. Habib, il confirme.

Il reste encore deux ans avant qu’on arrive à une autre Can. Le travail doit continuer à  travers les matches, en suivant les joueurs comme Racine Coly, Pape Djibril Diaw.

Le coach avait déclaré, à la dernière conférence de presse, qu’il ne convoque pas un joueur qui ne joue pas dans un championnat majeur. Partagez-vous cette position ?

Ce sont les principes du coach. Il sait ce qu’il entend par championnat majeur. On a vu une exception lors de la finale de la dernière Can où l’Algérien qui joue en Arabie saoudite a fait une bonne Can et a pesé sur les défenses adverses. Mais c’est au coach qu’on a confié le projet du Sénégal. Chaque entraineur a ses principes. C’est comme les systèmes de jeu. Quand vous voyez Antonio Conte, il joue toujours le 3-5-2. Personne ne peut lui faire changer ce système. Et tout joueur qui n’est apte à jouer dans ce dispositif, il ne te met pas dans son effectif. Si Aliou Cissé dit qu’il ne prend pas de joueurs qui jouent hors des grands championnats d’Europe, il a raison parce que c’est ça qui lui permet de travailler tranquillement avec les joueurs qu’ils regardent à travers tous les week-ends. C’est à lui faire les choix ; nous devons accepter ses décisions. Il lui reviendra de défendre son bilan devants ses dirigeants. Déjà, il a fait de bons résultats avec ces joueurs-là, donc il est dans la continuité.

L’inter Milan domine actuellement la Serie A. Qu’est-ce qui explique cette bonne dynamique des Intéristes ?

L’inter domine la Serie A parce que c’est une équipe qui s’est reconstruite en se servant des difficultés traversés ces dernières années. Cela autour du groupe Suning (de la Chine, Ndlr) qui est très puissant financièrement. Ils ont aussi comme administrateur délégué Giuseppe Moratta qui était à la Juventus et faisait de bons résultats avec un bon recrutement. Ils ont aussi recruté Conte, qui est un grand entraineur. Il a assaini l’effectif, en écartant certains joueurs de classe mondiale comme Icardi, avec son agent et épouse Wanda Nara, Radja Nainggolan, en remettant en place cette discipline qui règne autour de l’équipe. C’est une équipe performante où il y a Stefano Sensi qui est en train d’abattre un travail extraordinaire dans l’entrejeu de l’Inter. Conte, avec son système de 3-5-2, a cherché les hommes qu’il lui faut. Il retrouvé Antonio Candreva qui n’était pas dans les plans de Spalletti. Ils sont en train de faire un début de saison extraordinaire et on verra pour l’avenir.

Pendant ce temps, l’autre club de Milan, l’Ac Milan, peine à se relever de sa chute… 

Le Milan  Ac est une équipe qui se cherche depuis le départ de Silvio Berlusconi. Ils ont Zvonimir Boban, Paulo Maldini autour de l’équipe. Il y aussi Marco Giampaolo, qui a déjà fait des choses intéressantes à la Sampdoria et à Impoli. Mais n’empêche, rien ne va. Il leur faut de la patience. Ils doivent s’adapter par rapport à ce qui se fait actuellement dans le monde, sur le plan du jeu. On parle même de la vente du club au Français Bernard Arnault, patron de Lvmh. Il y a des gens du monde du football, mais l’équipe tarde à décoller. Il y a quelque chose qui ne marche pas, malgré l’argent et les dirigeants.

Kalidou Koulibaly connait un début de saison assez difficile, avec un but contre son camp et un carton rouge. Ces faits coïncident avec les deux défaites de Naples en Serie A. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

Cela est dû à une fatigue. Sa femme a eu un bébé et les derniers mois de grossesse sont souvent perturbants. Cette fatigue est également due à la Coupe d’Afrique des nations. Mentalement, il est épuisé. Cette saison, il n’a pas Raul Albiol (parti à Villarreal, Ndlr). Il doit composer l’axe central de la défense avec le Grec Manolas. Et ils doivent prendre du temps pour se connaitre. C’est ça qui le met un peu en difficulté. Il a eu une année pleine avec peu de vacances. C’est à son entraineur de voir comment l’utiliser et l’aider à se retrouver mentalement, parce qu’il est épuisé et il doit se reposer. Avec son carton rouge, c’est malheureux, mais cela va lui permettre de souffler. Chaque fois qu’il est en difficulté, souvent, Naples passe à côté de ses sujets. Il fait partie des cadres de l’équipe. C’était une bonne chose, de la part des dirigeants sénégalais, d’avoir donné du repos aux joueurs au mois de septembre pour les dates Fifa.

Alfred Gomis a quitté le championnat italien pour rejoindre Dijon, en Ligue 1 française, en provenance de Spal. Est-ce un bon choix pour lui ?

Il a fait un bon choix, parce qu’il a fait une bonne Coupe d’Afrique des nations. Il était avec Spal quand c’était difficile. Mais, à chaque fois qu’il fait de bonnes choses, on amène un autre gardien pour le reléguer en 2e position. Cette année, malgré une bonne Can, ils sont allés chercher Berisha de l’Atalanta Bergame à qui ils ont assuré la 2e place. Il a signé un bon contrat à Dijon. Ici en Italie, les gardiens noirs ne sont pas trop respectés. Alfred s’est toujours donné à fond. Quand il y a la guerre, on l’appelle, mais quand la paix revient, on le met au second rang. Il est en train de faire un travail extraordinaire, même si Dijon est en difficulté. L’important est qu’il fasse son boulot. Si l’équipe dijonnaise est reléguée en Ligue 2, il pourra trouver un autre club de Ligue 1 française. Alfred, c’est un guerrier. Il a bien fait de quitter l’Italie pour aller en France. Aujourd’hui, tant de jeunes joueurs sénégalais ou africains cherchent une porte de sortie.

La Ligue des champions a déjà ses deux premières journées. Quelle lecture en faites-vous ?

Dans cette Ligue des champions, le Paris Saint-Germain, le Bayern, l’Ajax d’Amsterdam et Manchester City sont en train de montrer leurs performances et se révéler comme candidats pour la finale d’Istanbul. Même si rien n’est encore joué, elles se sont facilité la tâche. D’un autre côté, il y a la Juventus, Naples, Dortmund, Barcelone ; des équipes qui n’ont pas encore dit leur dernier mot. La déception, c’est un peu du côté de Liverpool qui est aujourd’hui à trois points avec sa défaite contre Naples. Le Real Madrid également est décevant en ce début de C1. Les Madrilènes ont fait match nul avec Bruges dans leur fief, à Santiago Bernabeu. L’Inter est bon en championnat, mais peine à décoller en Ligue des champions, avec un seul point. L’Atalanta Bergame, novice dans cette compétition, a déjà enregistré deux défaites.

Avec la dynamique victorieuse du Psg, beaucoup estiment que Gana Guèye, qui a fait des prestations remarquables en Ligue des champions, est le maillon qui manquait au club francilien. Qu’en dites-vous ?

Cela fait plaisir de voir un compatriote, en la personne d’Idrissa Gana Guèye, faire de bonnes choses dans un grand club. Il doit continuer à travailler. Il a bien débuté avec le Psg. En tant que professionnel connaissant le haut niveau, je suis convaincu qu’il saura garder la constance. Mais une équipe ne tourne pas autour d’une seule personne. C’est un ensemble. Gana a apporté quelque chose à l’équipe parisienne. Il est dans son sujet, on lui souhaite d’aller jusqu’au bout. Si le Psg fait de bons résultats, nous Sénégalais, nous allons applaudir pour dire que c’est notre Gana qui a apporté au Psg ce qu’il n’avait jamais eu. C’est-à-dire aller très loin en Ligue des champions ou gagner le trophée. Nous lui souhaitons qu’il soit constant et épargné des blessures. C’est une fierté de voir un Sénégalais, un frère, pour avoir connu ses sœurs. Le Psg est en train de bien dérouler, mais ne mettons pas tout sur les épaules de Gana.

LOUIS GEORGES DIATTA

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