Publié le 27 Apr 2018 - 16:08
ACCUSE D’APPARTENIR A UNE CELLULE TERRORISTE

Alpha Diallo, l’envol brisé d’un crack 

 

Accusé d’appartenir à la supposée cellule terroriste de Mouhamed Ndiaye alias Abu Youssouf établie en Mauritanie, Alpha Diallo a comparu hier, à la barre de la chambre criminelle spéciale. L’étudiant, qui a clamé son innocence, s’est révélé être un véritable crack, contrairement à la plupart de ses co-accusés.

 

Depuis l’ouverture du procès d’Imam Ndao, Alpha Diallo est souvent assis, la tête baissée. Les jambes croisées ainsi que les doigts, l’air absent, le trentenaire semble toujours être plongé dans ses pensées ou peut-être préoccupé par son avenir assombri depuis 2016. Année depuis laquelle son envol vers un avenir meilleur a connu un coup de frein, à cause de son arrestation dans cette affaire de terrorisme. ‘’J’étais au point d’y arriver, mais on m’a coupé le fil. J’avais fait trois ans et il me restait une année pour aller poursuivre mes études au Qatar’’, a-t-il répondu avec désolation sur une interpellation du substitut Aly Ciré Ndiaye.

En fait, l’accusé s’est révélé être un vrai crack, contrairement à la majorité de ses co-accusés qui ont fait montre de réelles carences sur les sciences religieuses et le Coran. L’habitant de HLM Mariste avait réussi à intégrer un prestigieux institut basé en Mauritanie. ‘’Je suis parti pour approfondir mes connaissances en arabe, en sciences islamiques et travailler. Auparavant, je voulais faire des études en finances islamiques dans une université de Kuala Lumpur en Malaisie. J’avais réussi le concours, mais les inscriptions étant chères, je me suis alors rabattu sur le Qatar. Malheureusement mon niveau en arabe était moyen et comme je suis un perfectionniste, j’ai préféré faire le concours pour entrer à l’institut mauritanien’’, a-t-il expliqué.

Trois conditions sont nécessaires pour pouvoir entrer dans cet établissement construit par le Qatar. La mémorisation du Coran, d’un livre sur la jurisprudence islamique et d’un autre relatif à l’analyse grammaticale. Etant donné qu’il réunissait ces trois critères, il a réussi avec brio le concours qui regroupait une centaine de candidats. Ainsi l’étudiant sénégalais alliait études et enseignement, puisqu’il dispensait des cours d’anglais et de mathématiques, tous les mercredis et vendredis. Mais le vendredi 6 février 2016, voilà que sa vie bascule. Après avoir dispensé des cours, il a préféré aller passer la nuit chez son compatriote Oumar Keïta. Il se faisait tard et il ne voulait pas prendre le risque de rentrer en banlieue. ‘’Pendant que nous discutions, à un moment, on tapait à la porte. Oumar pensait que c’était la maison voisine. Lorsque la personne qui toquait a insisté, il est parti vérifier. Puisqu’il a mis du temps, je suis allé m’enquérir de la situation et je suis tombé sur des policiers’’, a raconté l’accusé. Il croyait qu’il s’agissait d’un simple contrôle d’identité et l’un des policiers avait demandé à ce qu’on les libère, mais un autre s’y est opposé. ‘’Selon la police mauritanienne, vous appartenez à la cellule terroriste de Mouhamed Ndiaye.’’

Face à cette interpellation du président Samba Kane, Alpha Diallo a répondu par la négative, en indiquant qu’il ne voyait le susnommé que lors des cérémonies familiales de la communauté sénégalaise en Mauritanie. Toutefois, il l’a connu au Sénégal, pour la première fois à Pikine, lors d’un cours dispensé par un certain Mor Kébé. Il a ajouté n’avoir jamais reçu un sou de Mouhamed ni d’Oumar Keïta ni de Makhtar Diokhané. ‘’Il ne m’a jamais proposé de voyage. Moi, je n’ai pas ce temps car je suis plus préoccupé par mes études’’, s’est défendu l’étudiant.

Quid de Makhtar Diokhané, il a déclaré l’avoir connu par le biais de Salif Fadiga, lors d’une cérémonie familiale. ‘’J’avais fini d’apprendre un livre sur la rhétorique et lorsque j’ai voulu réviser, il m’y a aidé’’, a-t-il soutenu, avant d’être interrompu par ce compliment du président : ‘’On voit bien que vous êtes un bon rhétoricien.’’ Alpha Diallo répondit par un ‘’machAllah alhamdoulliLah’’ ponctué par un sourire et poursuit sa déposition. C’est pour préciser que toutes ses discussions avec Makhtar Diokhané portaient sur la grammaire arabe. ‘’On échangeait uniquement dans le domaine de la connaissance. On n’a jamais parlé de djihad’’, a-t-il souligné.

Il a nié tout lien avec Imam Ndao et ne l’a vu qu’une seule fois, en 2009 à Pikine, lors d’une conférence sur la bataille de Badr. A la question du président à savoir s’il avait l’intention d’aller faire le djihad, l’accusé a répliqué : ‘’Jamais et je n’ai posé aucun acte dans ce sens.’’ Interpellé sur sa conception du djihad, Alpha Diallo a avancé une réponse qui a arraché le sourire à plus d’un. ‘’En journalisme, on dit que le commentaire est libre. Tel n’est pas le cas en Islam, car il est sacré. Donc, je laisse la question aux oulémas (savants) ’’, a-t-il répondu.  

FATOU SY

 

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