Publié le 10 May 2012 - 09:14
AFFAIRE BÉTHIO THIOUNE

Le calvaire des Thiantacounes à Thiès

 

Les jours se suivent et ne se ressemblent pas pour les Thiantacounes qui s'enlisent à Thiès et tombent de plus en plus dans la précarité. Voilà plusieurs jours qu'ils squattent dans la capitale du Rail dans l'espoir que leur guide soit élargi. Toutefois, cette situation commence à peser pour des talibés qui ont du mal à trouver la pitance quotidienne.

 

Les disciples de Cheikh Béthio Thioune ont élu domicile à Thiès, depuis l’arrestation de leur guide. Venus des quatre coins du Sénégal, pour apporter leur soutien à leur Cheikh, ils résident dans les quartiers populaires, dont la plupart se situent dans les zones périphériques. Étant entendu qu’ils sont indésirables aux alentours de la Maison d’arrêt et de correction de Thiès, les Thiantacounes ont pris d'assaut les quartiers tels que Takhikao, Keur Cheikh, Kawsara Fall, Médina Fall et Hersent. Ainsi, pour donner le change, en attendant le dénouement de cette affaire, les disciples de Cheikh Béthio Thioune se sont réfugiés dans les Cànt (séances religieuses) qu'ils organisent tous les soirs, à travers les artères de la cité du Rail.

 

 

''Nous sommes 07 ''Thiantas'' dans une chambre''

 

Toutefois, cette situation commence à peser, car les talibés sont rattrapés par la précarité. Aujourd'hui, pour survivre, les disciples du Cheikh n’hésitent pas à interpeller les gens qu’ils croisent dans les rues, dans l’espoir de bénéficier d’une aide financière (200 F, 300 F) susceptible de leur permettre de faire face à leurs besoins. Car nombre d'entre eux ont de plus en plus de mal à assurer la popote. Ayant trouvé refuge chez des condisciples, ils y survivent difficilement, alors que les conditions d'hébergement se compliquent.

 

Cheikh Bamba Diop habite à Kaolack. Croisé devant la mairie de Thiès, il s'explique sur les difficultés qu'il rencontre chez un camarade qui a accepté de l'héberger à Kawsara Fall. ''Nous sommes 07 ''Thiantas'' à partager une petite chambre, dans une maison où le chef de famille arrive difficilement à joindre les deux bouts''. Parfois, la situation devient presque invivable, car renseigne-t-il, ''certains parmi nous reçoivent la visite de leurs épouses, les week-ends''.

 

 

''Même si le Cheikh est transféré au milieu du désert, nous irons l’y rejoindre''

 

Cependant, la condamnation à 2 mois de prison ferme des 44 thiantacounes ne semble aucunement ébranler la conviction des talibés du cheikh. Ils considèrent qu'il s'agit d'une ''djihad'' (guerre sainte). ''Serigne Saliou les payera dans l’au-delà'', martèle Abdou Mbow venu de Médinatou Salam. ''Je ne peux pas rester à Mbour, alors que le Cheikh est ici en prison. Nous resterons tant que le Cheikh sera incarcéré ici. Nous sommes prêts à y laisser notre vie'', poursuit-il. Cette détermination est partagée par Badara Sylla, domicilié à Fatick. ''Même si le Cheikh est transféré au milieu du désert, assure-t-il, nous irons l’y rejoindre.''

 

Toutefois, la présence massive des Thiantacounes dans la ville n'est pas pour rassurer les habitants. L'inquiétude gagne les rares Thiessois qui ont voulu se prononcer sur cette affaire. Notamment, la commerçante Awa Diop qui interpelle les autorités et les engage à remédier à cette situation. 'Il s’agit d’un problème de sécurité'', peste-t-elle. En attendant, les Thiantacounes se promènent dans la ville de Thiès sans leur ''jël'' (collier à l’effigie du marabout) pour, disent-ils, ne pas attirer l’attention.

 

NDÈYE FATOU NIANG (Thiès)

 

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