Publié le 8 Feb 2019 - 07:20
ALIOUNE BOYE (PROTOCOLE MANAGER)

La montre d’Ousmane Sonko

 

Inconnu du grand bataillon des responsables patriotes, Alioune Boye est sûrement l’une des grandes attractions de la caravane de Sonko-Président.

 

Le Bruno Diatta d'Ousmane Sonko. Cela aurait bien pu être le titre de cet article. Mais entre les deux, il y a une nette différence. L’un est petit, l’autre grand et fort. Bruno courait très peu. Lui ne marche que très rarement. Bruno était diplomate de formation. Lui un soldat né. Et c'est peut-être là où se situe leur différence d’approche et de style. En tant que diplomate, Bruno incarnait surtout la finesse, le cérémonial ; lui, c'est surtout la rigueur, la rapidité dans l'action. Il s’appelle Alioune Boye. Jeune en apparence - il a bien 49 ans - né le 22 octobre 1970 à Dakar. Il est grand, fort et très athlétique. ‘’On me dit souvent ‘le jeune militaire’. Mais je suis loin d’être jeune’’, sourit-il, relax.

Pour Ousmane Sonko, il est, avec un peu d’exagération peut-être, ce que SE Bruno Diatta était à Senghor, Diouf, Wade et Macky Sall. Plus exactement, il est le Protocole Manager du team Sonko, en cette période de campagne électorale. Il précise : ‘’Il y a une équipe qui est chargée du service protocolaire. Moi, en tant que Protocole Manager, je travaille dans une parfaite complémentarité avec les autres membres de l’équipe’’, confie-t-il modeste. Mais qui est cet homme ?, ne cessent de se demander certains dans la caravane.

Plus qu'un chef protocolaire qui veille minutieusement sur l'emploi du temps du candidat Ousmane Sonko, Boye, comme l'appellent respectueusement les patriotes, pourrait être son premier bouclier. L’homme a un parcours très atypique. De l’armée sénégalaise à celle de la France, il a su marquer son temps.

Mais malgré une carrière assez lisse, Boye a vécu des moments très douloureux qui ont beaucoup impacté sa trajectoire. Pourquoi a-t-il quitté le drapeau national pour aller défendre celui de la France ? Il explique : ‘’C’était indépendant de ma volonté. Moi, j’ai tout laissé pour suivre une carrière militaire, pour défendre ma patrie. C’était vraiment par vocation. J’ai été, avant de rejoindre la gendarmerie, suite à un concours, à l’Inseps et à la marine. J’ai quitté parce que je ne pouvais plus rester suite à un drame qui s’est passé dans ma vie. Un drame qui a affecté toute ma famille.’’

En fait, en 1998, il a perdu son jeune frère de manière atroce. C’était en Casamance. Au cours d’un convoi, il reçoit un Rpg 7 et meurt sur le coup. Suite à ce décès brutal, sa maman était déprimée et ne supportait plus de voir son autre fils courir le même risque. Le ‘’jeune militaire’’ se rappelle : ‘’Il s’appelait Ndiaga. Cela avait causé un véritable traumatisme à ma mère qui était malade de me voir toujours dans l’armée. Je ne pouvais plus continuer de la voir dans cet état. Ce n’est donc pas de gaieté de cœur que j’ai quitté l’armée sénégalaise où je compte encore de vrais amis.’’

Soldat dans l’âme, il ne compte toutefois pas abandonner définitivement le maniement des armes. Il décide de continuer, mais loin de sa maman chérie. C’est alors qu’il passe et réussit avec brio le concours de recrutement de la Légion étrangère de l’armée française. Dans cette dernière, il a gravi tous les échelons en 18 ans de carrière. Homme de défis, il décide, à presque 50 ans, de quitter l’armée pour embrasser à nouveau la vie civile. Actuellement en phase de reconversion, il est affecté dans l’Administration française. Une position intermédiaire pour quitter l’institution militaire. Sous le drapeau tricolore, le diplômé de l’Esad a commandé un service de recrutement de 90 personnes. ‘’En quelque sorte, explique-t-il, ce service concerne 5 villes que sont la région parisienne, Lille, Strasbourg, Bordeaux et Nantes. Toutes ces régions étaient sous mon commandement, en matière de recrutement’’.

Tout ce vécu, Alioune Boye a décidé de le mettre au service d’Ousmane Sonko, en cette campagne présidentielle 2019.

Comme Bruno Diatta, Alioune Boye a toujours le souci de la précision et de la concision. L’on s’étonne alors des multiples failles dans la caravane d’Ousmane Sonko. Pourtant, toujours à l'affût, presque en cachette, il ne cesse de faire signe au candidat. Le suppliant presque parfois d’abréger son discours pour pouvoir continuer le programme, en vue d'atteindre l'objectif. Une mission presque impossible avec le chef des patriotes. Toujours très soucieux de communier avec son monde, très prompt, dans une démarche pédagogique, à entrer en profondeur dans son programme pour convaincre le maximum d'électeurs. Ce qui provoque beaucoup de cafouillages dans le programme. Mais, à chaque fois, l’enfant de Grand Dakar, grandi à Mbour, est là pour réparer les impairs. Comme un horloger, il tente de réparer les erreurs. Anticipant souvent sur les évènements en communiquant beaucoup avec le candidat. Toujours dans son costume bleu qu'il n'enlève que rarement pour rester avec une chemise longues manches et sa cravate. Dans le froid du Cap-Vert comme dans la forte canicule du Saloum et du Baol.

 En bon soldat, il a toujours la mise impeccable. Une véritable bête de travail. Quand il ne court pas, il est simplement en train de donner des ordres. Il rétorque : ‘’Bien sûr que je me fatigue. Mais, de par ma formation, je sais gérer mes efforts.’’ Sur son compagnonnage avec Sonko, il explique : ‘’C’est venu naturellement. Ce qui nous unit, c’est notre engagement basé sur la franchise, la sincérité et l’engagement. Quand on est militaire, on cultive ces valeurs et c’est ce que nous avons en partage. Tout est parti de son meeting de Saint-Denis dont j’ai été l’un des artisans principaux.’’

Marié et père de trois enfants, il revient également sur son retour au pays natal. ‘’Le Sénégal a tout fait pour moi. C’est une manière de lui rendre la pièce de la monnaie. Aussi, un jour, mon fils, qui a 12 ans, m’a demandé : ‘Mais papa, qu’est-ce que tu as fait pour ton pays ?’ Je n’ai pas envie de lui dire que je n’ai rien fait. A partir de ce moment, je me suis dit qu’il est peut-être l’heure de mener davantage mon engagement citoyen. Et c’est sur ce terrain que j’ai rencontré Ousmane Sonko que j’avais décidé de soutenir de manière désintéressée, vu la situation catastrophique du pays. Je veux comme ça dire un jour à mon fils que j’ai fait tout ce que j’ai pu. Peu importe le résultat’’.

Dans le cortège, souvent, il fait signe aux chauffeurs d’accélérer pour gagner du temps. Et sur les lieux de rencontre, il a toujours une longueur d’avance. Comme une sentinelle dans l’armée. Le lendemain, de bonne heure, il fait partie de ceux qui se lèvent le premier. "Départ imminent. Départ imminent", ordonne-il à la sécurité et au staff du candidat, rapporte un membre de la délégation. Pour lui, ‘’c’est le temps qui commande’’.

MOR AMAR

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