Publié le 30 Jan 2012 - 18:49
AMARA TRAORÉ, SÉLECTIONNEUR DES LIONS

‘’Je ne démissionnerai pas…’’

Amara Traoré, sélectionneur des lions

 

Quelle analyse faites-vous de cette nouvelle défaite ?

 

La première analyse, c'est que j'avais hâte que ça se termine parce que c'est une Can très difficile pour nous, il y a la déception. Parce qu'on a l'impression que ce sont les mêmes matches que nous faisons : même scénario, même film, mêmes minutes, mêmes occasions (rire)... même chose. Donc, je suis désolé de me répéter, mais on voit les mêmes choses. Mais cette fois-ci, on est mal rentrés dans le match. On a pris un but, on a réussi à égaliser et à prendre la direction du match. En deuxième mi-temps, on est revenus, on a eu des situations de but qu'on a ratées.

 

 

Mais si ça se passe comme ça, la fébrilité gagne l'équipe. À la mi-temps, je leur ai dit : ''Les gars, c'est une Can où rien ne nous réussit. Et quand c'est comme ça, prenez-moi les ballons et mettez-les devant. Là au moins on est sûr de ne pas prendre de but''. Même avec les buts vides, on n’arrive pas à marquer.

 

 

 

Après la défaite contre la Guinée Équatoriale, vous avez émis l'idée de continuer. Aujourd'hui avec trois défaites en autant de matches, comment comptez-vous convaincre et les populations, et les fédéraux de vous garder ?

 

 

Moi, je n'essaie de convaincre personne, j'essaie de faire mon boulot. Vous savez, j'ai commencé un projet avec cette équipe-là il y a deux ans, et cette même équipe ne peut pas devenir subitement nulle, ce n'est pas possible. On fait un match contre la Guinée et on a marqué des buts ; c'est l'équipe qui faisait rêver toute l'Afrique. Dans ma vie et dans ma philosophie de coach, j'essaie de me convaincre moi-même et de convaincre par rapport au terrain parce que je fais confiance au terrain.

 

 

C'est ce que le terrain me donne que je prends. Maintenant, j'ai dit que j'ai la ferme, très ferme volonté de continuer. Maintenant, ce n'est pas à moi d'apprécier, j'ai des employeurs. La seule chose que je demanderai à mon pays, c'est d'analyser sereinement ce qui s'est passé. Qu'on ne commence pas à dire que c'est la faute au ministre, du président de la fédération, c'est Amara. Non, l'entraîneur que je suis, c'est ma responsabilité.

 

 

Ce sont ces mêmes joueurs qui vont faire 2013 et 2014. D'ici là, on ne peut pas former d'autres joueurs. Il faut redonner tout de suite le moral à ces joueurs, analyser, apprécier, corriger et continuer. L'erreur est humaine, elle est une étape vers l'apprentissage. Une équipe vient de naître il y a moins de deux ans. Ce n'est pas en la donnant à Mourinho ou à Ferguson qu'elle va changer. Non, non !

 

 

 

Coach, pensez-vous que cette équipe a été maraboutée ?

 

(Fou rire). Vous savez... Tout le monde a vu cette équipe, elle ne peut subitement être ce qu'elle est devenue. C'est pour cela que je dis : soyons lucide. Si mon départ règle le problème ? Là n'est pas la question. Protégeons cette équipe, et j'invite mon peuple à s'unir dans les causes communes, puisqu'on a deux adversaires à venir, pour gagner ensemble. Par rapport à mon peuple, il y a des choses que je ne dirai pas ici. Quand on va rentrer à la maison, là on sera entre nous, on se parlera.

 

 

 

On a remarqué la fatigue des joueurs notamment sur le deuxième but contre la Guinée Équatoriale. Les joueurs ne sont pas au top ?

 

Un match, c'est 90 minutes, c'est des courses, des fatigues nerveuses... Vous savez, quand on joue comme ça, qu'on se crée des occasions qu'on ne marque pas... Moi, je parle de fébrilité, de doute. Par moments, c'est ce qui nous arrive. Les Libyens ont marqué sur un centre.

 

Cette équipe a été placée très haut par l'opinion publique internationale et sénégalaise ; tout le monde a parlé de favoris, un terme que j'ai toujours refusé jusqu'au bout. Comparés aux autres équipes qui sont là, on ne peut pas être favoris devant le Ghana et la Côte d'Ivoire. Pourquoi j'ai cité ces deux équipes, c'est parce qu'elles ont vécu une Can et une Coupe du monde et des championnats de moins de 20 ans.

 

Le point positif, c'est qu'on a appris toutes les facettes d'une Can qu'on va corriger. Durant cette Can, on a tout vu. C'est une équipe jeune où il y a eu beaucoup de charge émotionnelle. Mais tout cela fait partie de l'apprentissage. C'est pourquoi je dis que s'il n'y a pas de résultat, c'est l'entraîneur qui est responsable. Incomber la faute à tel ou tel autre, ce n'est pas bon.

 

 

 

De combien de temps avez-vous besoin pour corriger ces erreurs que vous avez évoquées ?

 

Durant les éliminatoires, on a commis des erreurs lors des matches, et nous les avons corrigées. Quand on voit l'évolution de cette équipe pendant cette Can, elle s'est donnée. J'ai pu lire les Dvd des matches que nous avons faits contre le Soudan, le Kenya, la Zambie, la Guinée Équatoriale ; sans exagérer, on a eu cinquante occasions de buts, et on n'en a mis que quatre.

 

Vous avez vu pendant l'entraînement d'hier (samedi), on a travaillé devant les buts. L'entraîneur est rationnel. Maintenant en football, même dans la vie, quand ça ne va pas, il faut insister. Et moi, je ne vais pas baisser les bras. Quand on rentrera au pays, on va parler de tout cela. Il n'y a pas de temps, l'équipe est jeune, il faut la laisser grandir.

 

 

Aujourd'hui, êtes-vous prêt à démissionner si on vous l'exige ?

 

Je ne dé-mis-sion-ne rai pas, c'est clair (il insiste et rit). J'ai une envie folle de continuer. La seule certitude que j'ai, c'est de continuer. Si je dois rester, je refuse que cela vienne des joueurs mais des dirigeants qui auront foi en moi. Car les joueurs doivent rester toujours des joueurs.

 

Il faut éviter les erreurs du passé. Je veux que mes joueurs restent au football, pensent qu'au football. Si je dois rester dans cette équipe, que cela soit une foi de mon peuple en ma personne. J'ai toujours dit à mes joueurs de ne jamais parler de primes. Quand je serai toujours là, l'entraîneur entraînera, les joueurs joueront et les dirigeants dirigeront.

 

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