Publié le 25 Jul 2016 - 15:29
APRES LA TUERIE DE MUNICH

L'Allemagne en plein débat sécuritaire 

 

Alors que le pays a été frappé deux fois dans la même semaine par des attaques terroristes, les responsables politiques évoquent la possibilité de faire appel à l'armée pour assurer la sécurité intérieure.

 

La tuerie du McDonald’s de Munich, cinq jours seulement après une attaque à la hache dans un train dans la même région, a relancé en Allemagne le débat sur la sécurité. David Ali Sonboly, 18 ans, a abattu vendredi soir 9 personnes, pour la plupart des adolescents et en a blessé 35, dont 11 grièvement, selon un bilan revu à la hausse dimanche par la police locale. Fils d’Iraniens arrivés en Allemagne comme demandeurs d’asile à la fin des années 90, le tueur souffrait de troubles psychiatriques et avait prémédité son geste depuis au moins un an, sans lien avec l’Etat islamique, a expliqué dimanche la police.

Hystérie collective

Principal enjeu des discussions  : la possibilité pour la Bundeswehr (la force de défense fédérale) d’intervenir dans le cadre d’opérations de sécurité intérieure. «Il faudrait que dans certaines situations extrêmes comme les attaques terroristes, nous puissions recourir aux forces de la Bundeswehr», propose, dans le quotidien du dimanche Welt am Sonntag, le ministre de l’Intérieur du land de Bavière, Joachim Herrmann, membre du parti bavarois ultra-conservateur CSU, brisant par la même occasion un tabou. «Les réticences justifiées par l’histoire sont dépassées.

Nous ne vivons plus à l’époque de la République de Weimar [période de fragilité institutionnelle ayant précédé l’arrivée au pouvoir des nazis, ndlr]. Notre démocratie est absolument stable», poursuit le ministre. Depuis des mois, l’Allemagne s’attend à être à son tour victime du terrorisme. Le pays a été épargné jusqu’ici par des attaques de grande envergure, comme celles de Nice, Paris, Bruxelles, Londres ou Madrid. Mais les autorités allemandes ne cessaient de répéter que la question n’est pas de s’interroger sur la possibilité, un jour, d’une attaque terroriste dans le pays, mais plutôt de savoir quand.

L’hystérie collective qui s’est emparée de Munich vendredi soir –  paralysie totale des transports en commun, fermeture des autoroutes, interruption du trafic ferroviaire, intervention de forces spéciales bavaroises mais aussi d’autres länder et même d’Autriche  – en dit long sur la psychose sécuritaire du pays. Dans ce contexte, l’extrême prudence d’Angela Merkel dénote. La chancelière a en effet attendu vingt heures après l’attaque du forcené de Munich, une fois connu l’identité du tueur, avant de se présenter face aux caméras, à la différence de Barack Obama ou de François Hollande, qui ont témoigné le soir même de leur solidarité avec l’Allemagne.

Le temps pour elle de s’assurer qu’il ne s’agissait ni d’une attaque terroriste de type islamiste ni d’une agression de l’extrême droite, le jour du cinquième anniversaire de la tuerie de Utoya, en Norvège, ni de l’acte d’un réfugié, mais d’une «tuerie classique» de forcené, l’œuvre d’un garçon fragile connu pour des épisodes dépressifs. Confrontée à une poussée de l’extrême droite aux élections régionales du printemps et à l’approche des législatives de l’automne 2017, Angela Merkel veut à tout prix éviter un amalgame entre l’agression de Munich et l’arrivée d’un million de réfugiés, accueillis l’an passé à son initiative et sans véritable contrôle d’identité. Une stratégie qui pourrait être affaiblie par le meurtre à la machette dimanche  d’une femme à Reutlingen,  perpétré par un demandeur d’asile syrien de 21 ans qui a été interpelé.  Il aurait agi seul comme à Munich.

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