Publié le 21 Jan 2016 - 01:43
AUDITION D’OUMAR SARR DEVANT LE DOYEN DES JUGES D’INSTRUCTION

Mobilisation et désillusion

 

Le secrétaire général adjoint du Pds a fait face hier au doyen des juges d’instruction Samba Sall, dans le cadre d’une audition au fond. En prison depuis un mois, Oumar Sarr n’a pas pu bénéficier d’une liberté provisoire. Toutefois, les libéraux sont allés en masse hier au tribunal pour épauler le coordonnateur de leur parti.

 

La présence massive des militants libéraux au tribunal de Dakar, hier, n’y a rien fait. Inculpé le 19 décembre 2015, Oumar Sarr, accusé de faux, usage de faux et diffusion de fausses nouvelles, reste en prison. Le secrétaire général adjoint du Parti démocratique sénégalais (Pds) espérait bénéficier d’une liberté provisoire, à l’issue de son audition au fond. Mais le doyen des juges d’instruction, Samba Sall, en a décidé autrement. Douchant l’enthousiasme des militants du Pds qui croyaient en la libération de leur responsable.

Le numéro 2 du Pds est arrivé à la cave aux environs de 13h 35mn. Il en est ressorti après 16h. Même si ses avocats n’ont pas voulu livrer le secret de l’instruction en cours, quelques éléments ont été avancés. Me Madické Niang souligne que l’audition du maire de Dagana a permis de relever que les chefs d’accusation qui sont retenus à son endroit sont loin d’être fondés. ‘’Immédiatement après l’audition de Oumar Sarr, nous avons déposé une demande de mise en liberté provisoire. Son maintien en détention ne se justifie pas, d’autant plus que nous avons jugé que son arrestation était illégale, parce qu’elle ne pouvait pas intervenir sans l’autorisation de l’Assemblée nationale’’, souligne l’ancien ministre de la justice sous Wade. Selon l’avocat, la procédure prévue pour l’arrestation d’un député en session n’a pas été respectée.

Des raisons qui ont poussé Me Madické Niang et ses collègues à déposer une demande  d’annulation  de la procédure, mais aussi une demande pour obtenir la libération provisoire d’Oumar Sarr. Sur la durée de la procédure, l’avocat renseigne que son examen ne doit pas être long, car le parquet requiert 15 jours et le juge a également ses propres délais. ‘’Oumar Sarr est un coordonnateur de parti, un député qui a réagi par rapport à une information qu’un journal très crédible a donnée. C’est le fonctionnement normal de la démocratie qu’un chef de parti puisse intervenir, quand il y a des informations graves et surtout qui concernent directement le Pds, les élections de 2009 et 2012’’, a soutenu l’avocat libéral.

‘’Macky Sall est la cause de tous nos malheurs’’

La tournure des événements a donc refroidi les ardeurs des libéraux qui ont déplacé leur siège hier au palais de justice de Dakar. En effet, la consigne de mobilisation était bien respectée par les ‘’enfants de la famille Wade’’. Ce qui a poussé les forces de l’ordre à ceinturer les alentours du tribunal. La sécurité était au summum dans les parages du temple de Thémis. En plus de la traditionnelle présence des gendarmes, des policiers étaient présents en masse, stationnés au niveau des différentes artères menant au tribunal.

Dès 10h, la devanture de la cave était noire de monde. Les usagers du tribunal peinaient à se frayer un chemin. Parmi la foule, des visages connus, comme celui du porte-parole du Pds Babacar Gaye, l’avocat Me Amadou Sall, ou encore les députés Thierno Bocoum, Me El hadji Diouf. Mais encore des visages qui se font rare dont Habib Sy, Bara Gaye, Mamadou Lamine Keita ou encore le SG de l’UJTL Toussaint Manga fraîchement élargi de prison. Par contre, pas l’ombre de Modou Diagne Fada, ni de Fatou Thiam et des autres frondeurs. Quelques députés, à l’image d’Aida Mbodji et de Me El hadji Diouf, arborent fièrement leurs écharpes aux couleurs du drapeau national, en soutien à leur collègue député. 13h 30mn, le coordonnateur du Front patriotique, Mamadou Diop Decroix et l’ancien président de l’Assemblée nationale, Pape Diop, font leur apparition.

Ensuite, arrive Oumar Sarr à la cave. C’est l’hystérie. Des ‘’Libérez Oumar Sarr’’ ; ‘’Gaindé Walo’’ sont scandés par les militants. Cette arrivée est le début d’une longue attente. Le temps passe. La fatigue et la faim prennent le pas sur la détermination. La devanture des locaux et les gazons sont transformés en bancs publics et pris d’assaut par ceux qui ne tiennent plus sur leurs jambes. Les plus téméraires mettent leurs tourments sur le compte de leur ancien ‘’frère’’ de parti. ‘’Macky Sall est la cause de tous nos malheurs. Il nous a causé toute cette souffrance’’, dit-on dans certains groupes. Pour ‘’réveiller‘’ les militants, des sandwiches et des sachets d’eau sont distribués.

A 16h passées de quelques minutes, les choses bougent. Les avocats sortent un à un de la cave. L’excitation monte chez les partisans. Me Amadou Sall est rapidement entouré par les militants. Tout le monde veut avoir la primeur de l’information sur l’audition. L’avocat rassure et promet que tous va rentrer dans l’ordre. Les libéraux gardent un brin d’espoir et scandent de plus belle le nom de leur coordonnateur. Le calme laisse place à une ambiance de revendication. Un moment choisi par l’ancienne maire de Bambey pour faire un appel au calme et à la sérénité. ‘’Soyez mobilisés, soyez en alerte, ne vous laissez pas surprendre. Aujourd’hui, Oumar Sarr est pris en otage. Demain, ce sera le tour de quelqu’un parmi nous. A présent qu’il est retourné à Rebeuss, je vous propose de rejoindre tranquillement vos maisons et qu’il n’y ait pas de violence. Nous ne devons pas prêter le flanc’’, lance Aida Mbodji. La députée libérale de souligner qu’on a l’habitude de taxer les militants libéraux de violents et de leur demander de démontrer le contraire.

Pendant ce temps, Oumar Sarr retourne à la citadelle du silence et attend que ses demandes d’annulation de procédure et de liberté provisoire soient validées. 

HABIBATOU TRAORE 

 

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