Publié le 13 Oct 2012 - 08:55
AUTORISATIONS DE PÊCHE À DES BATEAUX ÉTRANGERS

Greenpeace dénonce ‘’une kleptocratie maritime’’

 

 

L’ONG Greenpeace a rendu public hier un rapport intitulé ‘’Main basse sur la sardinelle : le scandale des autorisations de pêche au Sénégal, un drame en cinq actes’’. Le document explique comment les ressources halieutiques du Sénégal ont été pillées entre 2010 et 2012 avec les ‘’autorisations illicites de pêche accordées à des navires étrangers’’ et ‘’la complicité de hauts responsables du gouvernement sénégalais de l'époque’’.

 

Les autorisations de pêche délivrées entre mars 2010 et avril 2012 à des bateaux étrangers, l’Organisation non gouvernementale (ONG) Greenpeace en reparle encore. Et c’est pour sortir un rapport intitulé ‘’Main basse sur la sardinelle : le scandale des autorisations de pêche au Sénégal, un drame en cinq actes’’, et dans lequel elle accuse le régime de Wade et son ministre de l’Economie maritime, Khoureychi Thiam notamment, d’avoir permis le ‘’pillage organisé’’ des ressources halieutiques ‘’avec des autorisations illicites de pêche accordées à des navires étrangers’’. Selon le rapport, durant la période de ces autorisations, ‘’les ressources pélagiques du Sénégal ont fait l’objet d’un pillage sans précédent’’.

 

‘’Planifiée, orchestrée et savamment entretenue au plus haut sommet de la République, cette razzia a ciblé une ressource pélagique centrale tant du point de vue économique qu’alimentaire pour des millions de Sénégalais : la sardinelle, localement plus connue sous le nom de yaboy’’, dénonce Greenpeace dans son rapport. En effet, pour Greenpeace, c’est ‘’une kleptocratie maritime’’ qui a organisé et orchestré ce pillage ‘’avec la complicité de hauts responsables du gouvernement sénégalais de l'époque, durant le régime d'Abdoulaye Wade’’. L’ONG met en cause nommément le ministre de l’Économie maritime de l'époque, Khouraïchi Thiam, qui a déclaré que 52 000 tonnes de poissons auraient été pêchées en 2011 et 125 000 tonnes pour la saison 2012. ‘’Si les armateurs se sont acquittés de 120 dollars US par tonnes, le Trésor sénégalais n’a encaissé que 35 dollars US, soit un ‘’manque à gagner’’ de plus de 15 millions de dollars (7 milliards de francs Cfa, NDRL)’’, révèle Greenpeace. Car ‘’le prix auquel le kilogramme de sardinelle a été bazardé aux navires étrangers (17 francs Cfa, selon les propres déclarations du ministre de la Pêche) est une stupidité légendaire, là où les prix varient entre 80 et 100 dollars US ailleurs’’. De plus, Greenpeace indique que ‘’personne ne peut savoir, avec précision, la quantité de poissons réellement capturée par ces bateaux’’. En effet ‘’si entre le mois de décembre 2011 et début mai 2012, ces bateaux ont débarqué 124 784,125 kg de poissons et 3 246 207 kg de farine de poissons, pour Greenpeace, tout laisse croire que les vrais chiffres n’étaient connus que des dealers’’.

 

7 milliards de pertes pour le Trésor

D’où son invite au gouvernement du Sénégal à immédiatement ouvrir une enquête sur les pratiques ayant permis le pillage des ressources halieutiques en toute impunité. Selon le rapport, il urge de ‘’diligenter l'audit de l’Inspection générale de l’administration et saisir la Commission nationale de lutte contre la corruption sur les conditions d’attribution de ces autorisations illicites’’. Ce, afin de d’engager ‘’des poursuites judiciaires à l’encontre des personnes impliquées dans le pillage organisé des eaux sénégalaises’’ et établir le ‘’compte précis des amendes annulées de façon illicite et du manque à gagner dû à la sous-évaluation des droits de pêche et au versement d’éventuelles commissions et rétro-commissions’’. Il a invité les autorités à ‘’clarifier les montants financiers versés et à poursuivre les bénéficiaires de sommes indues, en sollicitant la coopération des Etats dont les navires sont impliqués dans ce scandale’’.

 

De même, le rapport recommande l’engagement de procédures judiciaires ‘’appropriées afin de recouvrer ces sommes’’ et l’adoption d’un moratoire sur ‘’l’octroi de toute licence de pêche industrielle pélagique côtière à des chalutiers étrangers, y compris dans le cadre d’un éventuel accord de pêche bilatéral’’. Greenpeace appelle l’Union européenne (UE) à ‘’engager ou à compléter les investigations visant les navires et les sociétés impliqués dans l’obtention et l’usage des autorisations de pêche illicites’’. Et compte-tenu de l’implication de navires russes dans cette affaire, le gouvernement russe est invité à ‘’collaborer pleinement avec les autorités judiciaires sénégalaises’’ et à diligenter une ‘’investigation sur les conditions d’exercice d’activités de pêche’’ dans les eaux sénégalaises par des navires battant pavillon russe.

 

‘’Commissions et rétro-commissions’’

Pour rappel, l’étude qui est étalée sur 25 mois, fait état ‘’d’une quarantaine d’autorisations délivrées à des navires en provenance de la Russie, des Comores, de la Belize, de Saint-Vincent et Grenadines, de Lituanie, entre autres, opérant dans la zone économique exclusive sénégalaise par l’entremise d’hommes d’affaires sans scrupule’’. Ces autorisations ‘’ne reposent sur aucune base légale’’, écrit Greenpeace qui fait état d’actes de ‘’mal gouvernance, de corruption et de concussion’’.

 

ALIOU NGAMBY NDIAYE

 

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