Publié le 28 May 2016 - 00:54
BABACAR DIAME, PRESIDENT DE LA COMMISSION DES FINANCES DE L’ASSEMBLEE NATIONALE

‘’Ousmane Sonko n’a pas connaissance de ce qui se passe’’

 

Le débat soulevé par l’inspecteur des Impôts et des Domaines, Ousmane Sonko, sur le non-reversement des impôts par l’Assemblée nationale, installe la polémique. Après les précisions du président de l’Institution parlementaire, Moustapha Niasse et la réplique d’Ousmane Sonko, le président de la Commission des Finances de l’Assemblée nationale s’invite au débat. Selon Babacar Diamé, l’inspecteur des Impôts n’a aucune connaissance de la situation réelle de l’hémicycle.

 

Quelle est la part de vérité dans le débat sur le non-reversement des impôts des travailleurs de l’Assemblée nationale et des députés ?

Moi, j’ai les mêmes informations que vous. L’inspecteur Ousmane Sonko a ouvert le débat depuis quelque temps. Je ne suis pas l’administration de l’Assemblée nationale. Je n’interviens pas à ce niveau-là. Je suis député comme tout le monde et à ce titre, nous recevons des indemnités de représentativité, une partie est imposable, l’autre ne l’est pas.

Sur la part imposable, nos impôts nous sont prélevés. Maintenant, moi je me fie à ce que le président de l’Assemblée nationale a donné comme réponse, mais pas à ce que Sonko a dit. Cela n’engage que lui d’ailleurs. Le président de l’Assemblée nationale a répondu en expliquant tout ce qui s’est passé et la situation actuelle de l’impôt avec la volonté de l’Institution parlementaire de payer régulièrement l’impôt. Je me fie à ce que le Président de l’Assemblée nationale a dit, parce que lui, au moins, a vérifié l’information. Il détient l’information. La vraie information est détenue par l’administration de l’Assemblée nationale. Maintenant, quelle est la source de l’inspecteur des Impôts qui continue à parler de cela ?

M. Sonko dit que les éclairages apportés par le président de l’Assemblée nationale ne sont pas exacts… (Il coupe)

Le président de l’Assemblée nationale est quand même une institution. Cet inspecteur des Impôts doit aussi respecter les institutions. Je crois que quand le président de l’Assemblée nationale affirme, après vérification des éléments, rien à mon avis ne peut être plus exact. Lui, il ne sait pas par contre ce qu’il raconte. Je ne sais pas maintenant qui lui a donné ces informations. Le Président de l’Assemblée nationale est un responsable. Il a demandé à ses services de faire la situation. C’est fort de cela qu’il a donné l’information. Il n’est pas tenu lui d’être là en permanence à regarder les comptes. Quand un inspecteur des Impôts se permet de dire que l’Assemblée doit deux milliards, alors que c’est loin de cela, c’est grave. Avant de parler de détournement, il faut des preuves de ce qu’on avance.

Moustapha Niasse, dans son communiqué, dit que l’Institution parlementaire s’est acquittée de 120 millions …

Le Président est clair dans ce qu’il a dit. Il a trouvé des arriérés d’impôts qu’il a payés. Maintenant, de manière régulière, il reverse l’impôt. De même, s’il ne reverse pas tout et s’il y a des arriérés, il y a un engagement quand même de payer les impôts. Quand on collecte les impôts, on les paie. Il y a peut-être des retards de paiement liés à la mise en place des moyens, des financements, etc. Je n’ai pas vérifié les comptes de l’Assemblée pour me prononcer dessus. Il n’y a que le questeur qui peut le faire.

Pour Ousmane Sonko, une institution comme l’Assemblée nationale qui a un budget de 8,6 milliards ne doit pas payer que 120 millions d’impôts par an. L’impôt qu’elle doit payer doit dépasser les 500 millions de francs Cfa.

Il sait qu’un impôt est lié à plusieurs éléments. Il y a ce qu’on appelle le champ d’application de l’impôt. Il y a des salaires qui sont imposables. Lui, s’il a des informations, il n’a qu’à les détailler et on verra bien. Moi, je suis un homme responsable. Je suis un député et je sais que les députés s’acquittent réellement de leur travail. Maintenant, les députés reçoivent des indemnités de représentativité, une rémunération sur laquelle il y a un impôt qui est précompté et cet impôt est reversé par l’Assemblée nationale. S’il y a des retards, il n’y a qu’à voir avec l’Assemblée nationale.

Quelle est la part de responsabilité de l’Institution parlementaire dans tout cela ?

On ne peut situer aucune responsabilité pour le moment. Vous ne savez pas pourquoi il y a eu du retard. Et même quand il y a un retard, il peut y avoir ce qu’on appelle un moratoire entre l’institution et l’administration fiscale. Même une entreprise classique normale, quand elle a des retards, peut négocier avec l’administration.

Dès lors que les impôts sont coupés à la source des salaires des députés et du personnel de l’Assemblée, qu’est-ce qui explique, selon vous, ces retards dans le reversement ?

C’est ce que je vous dis, je n’ai pas connaissance du dossier. Je ne peux rien vous dire sur cela. Je ne peux pas dire pourquoi tel ou tel autre impôt n’est pas payé. Moi, je gère la commission des Finances, je ne gère pas les fonds ni la comptabilité de l’Assemblée nationale.

La commission que vous dirigez n’a-t-elle pas un rôle à jouer dans tout cela ?

Non, pas dans ce domaine-là.

Comment appréciez-vous l’appel au dialogue national lancé par le Président ?

Vous savez, le président de la République s’est toujours inscrit dans la dynamique de travailler pour le Sénégal et pour tous les Sénégalais. Il est en train de reconstruire ce pays, de réaliser des investissements pour qu’on puisse connaître demain un développement notoire qui permettrait d’accroître les revenus et de faire face à la demande sociale. Toutes les bonnes volontés doivent s’unir à ses côtés pour réaliser ce désir de construire ce pays. Cela, qu’on soit de l’opposition ou de la majorité présidentielle. Le dialogue qu’il a demandé aujourd’hui est un dialogue sincère dans lequel chaque parti doit pouvoir se retrouver et apporter sa contribution. Parce que qui dit dialogue dit ouverture pour écouter, entendre, recevoir les avis et contributions des uns et des autres. La synthèse des contributions permettrait d’intégrer dans les propositions les projets, les éléments qui peuvent aller vers la bonne mise en œuvre du Programme Sénégal émergent qui est accepté par le monde entier. C’est un dialogue sincère qu’il veut. Il est clair maintenant que celui qui ne veut pas voir le ciel ne le verra jamais.

Le pays est-il dans une situation qui appelle à un dialogue national ?

Le pays n’est pas dans une situation de crise, c’est clair. Mais le Président, dans sa volonté de construire le pays, a décidé d’impliquer toutes les forces vives de la Nation. C’est cela que j’appelle le dialogue. C’est-à-dire, quand l’opposition veut apporter sa contribution, il faut bien l’appeler et lui demander son avis sur telle ou telle réforme. Un dialogue est permanent. A tous les niveaux, il y a un dialogue. Si vous êtes dans une famille et que vous ne dialoguez pas avec vos enfants, vous ne pouvez pas connaître leurs besoins réels et leurs avis. Alors qu’ils peuvent vous donner des idées pertinentes. Le chef de l’Etat veut construire le pays dans la paix et la concorde. L’implication de toutes les forces vives de la nation permettrait d’avoir la diversité des idées, des compétences, des cultures, etc. La fédération de toutes ces diversités pourraient conduire à la construction de notre pays.

L’Etat a procédé à la levée du blocus de la frontière avec la Gambie. Mais des syndicats des transporteurs dénoncent une décision cavalière du régime. Comment appréciez-vous cela ?

Tout cela ne s’est pas fait sans dialogue. Il y a un dialogue permanent, depuis que la crise a commencé. Depuis qu’il y a la fermeture de la frontière entre la Gambie et le Sénégal, il y a eu un dialogue aussi bien entre les syndicalistes qu’entre les deux Etats. La dernière réunion qui s’est tenue était un cadre d’échanges pour voir dans quelles mesures la Gambie et le Sénégal peuvent dépasser les conflits actuels. Parce que ces deux Etats forment un seul et unique pays. Nos parents sont là-bas. Leurs parents sont ici.  Nous ne pouvons pas rester sans trouver les modalités pratiques pour vivre ensemble. Si aujourd’hui, la frontière est ouverte, c’est au bonheur de tous. Je pense d’ailleurs que les transporteurs sont les premiers à accepter ce dialogue. Maintenant, à quel niveau n’ont-ils pas été impliqués ? À mon avis, ce sont des gens qui ont toujours été impliqués au dialogue. C’est peut-être grâce à eux qu’on est arrivé à la levée du blocus.

Mais Alassane Ndoye dit n’avoir pas été mis au courant de la levée du blocus.

Il y a ce qu’on appelle le dialogue permanent et la décision stratégique. Cette dernière est la finalité d’un processus. La décision de lever le blocus est la finalité d’un processus. C’est-à-dire un dialogue permanent entre les différents acteurs. Quand on arrive à la fin, le pouvoir de décision appartient à l’Etat. Quand l’Etat prend une décision, elle concerne tout le monde. Moi, c’est comme cela que je vois les choses. Cela ne veut pas dire que les uns ou les autres ont été marginalisés.

PAR BIGUE BOB & A.MB

 

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