Publié le 4 Mar 2021 - 18:13
BATAILLE PROCEDURALE

Ousmane Sonko, piégé, tombe sous le coup de la flagrance

 

Loin de la guérilla urbaine, se déroule la bataille judiciaire qui sera épique entre les différentes parties et leurs représentants.

 

De l’immunité parlementaire à l’arrestation pour désordre public, le combat va se mener sur tous les fronts. Hier, les députés de l’opposition ont lancé cette bataille procédurale, en déposant un recours devant le Conseil constitutionnel. Pour beaucoup d’observateurs, un tel recours n’a aucune chance d’aboutir.

Telle est la conviction de cet avocat qui a préféré garder l’anonymat. Il déclare : ‘’Le Conseil constitutionnel va se déclarer incompétent, parce que la décision de lever l’immunité parlementaire d’un député est une prérogative de l’Assemblée nationale. En vertu de la séparation des pouvoirs, le conseil, qui relève du pouvoir Judiciaire, ne peut s’immiscer dans les compétences du pouvoir Législatif.’’

Mais, en attendant cette décision, la question qui se pose est de savoir si ce recours a un caractère suspensif ou non. A en croire M. Ngouda Mboup, la réponse est affirmative. Sur sa page Facebook, il affirmait : ‘’La décision de levée d'immunité parlementaire est une résolution qui doit être notifiée immédiatement au député concerné… S'il n'y a pas de recours dans les délais de six jours francs, l'autorité judiciaire qui avait formulé la demande en est immédiatement informée.’’

Selon lui, dans la lettre de convocation du député, le magistrat doit viser la résolution qui donne une base légale à son action. ‘’Le non-respect de telles formalités serait une violation des droits des députés et des pouvoirs du Conseil constitutionnel’’, expliquait-il. 

Revenant à la charge hier, suite au dépôt du fameux recours par les députés de l’opposition, il peste : ‘’Le juge du 8e cabinet ne peut procéder à l'audition (de Sonko). La saisine du Conseil constitutionnel suspend l'acte de levée d'immunité parlementaire. Le Conseil constitutionnel a le pouvoir du dernier mot.’’

Pendant ce temps, la gendarmerie qui avait fini d’isoler carrément le leader politique, même de sa garde rapprochée, n’attendait plus que les instructions. Pour certains, il aurait suffi d’un mandat d’amener. Mais pour la plupart des spécialistes du droit parlementaire que nous avons réussi à joindre, le recours étant suspensif, le président du Pastef/Les patriotes n’avait plus l’obligation de déférer à la convocation.

Alors que tout le monde attendait la résolution de cette controverse, l’Etat a dégainé, contre toute attente, le chef de trouble à l’ordre public et conduit directement l’opposant à la Section de recherches de la gendarmerie de Colobane. Et avec une telle incrimination, tout change.

En effet, si l’on se fie aux explications du Pr. Mboup, Ousmane Sonko pouvait, jusqu’à ce moment, bénéficier de son immunité parlementaire, du fait du caractère suspensif de son recours. Du coup, on retombe sous le coup de l’article 51 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale.

En revanche, dès lors que le trouble à l’ordre public a été invoqué, cet argument devenait inopérant, parce qu’on tombe sous le coup de la flagrance, estime cette robe noire. Qui renvoie à l’article 45 du Code de procédure pénale. 

Aux termes de cette disposition, plusieurs cas de figure sont considérés comme relevant de la flagrance. En effet, ‘’est qualifié crime ou délit flagrant : - celui qui se commet actuellement’’, prévoit l’article 45 ; ‘’celui qui vient de se commettre’’ ; ‘’celui où la personne soupçonnée est poursuivie par la clameur publique’’ et enfin ‘’celui où, dans un temps voisin de l'action, un individu est trouvé en possession d'objets ou présente des traces ou indices laissant penser qu'il a participé au crime ou au délit’’.

Ousmane Sonko ayant été arrêté au moment où l’infraction supposée se commettait, tombe alors sous le coup des dispositions de l’article 45 CPP.

M. AMAR

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