Publié le 3 Dec 2019 - 06:30
BUDGET MINISTERE DE L’ENVIRONNEMENT

Une enveloppe pas à la hauteur des défis

 

Le ministère de l’Environnement et du Développement durable va dérouler ses programmes avec une enveloppe de 33 milliards de francs Cfa. Vu ses charges et la persistance de plusieurs questions environnementales partout au Sénégal, son budget est jugé faible.

 

S’il y a un point sur lequel tous les orateurs (58) se sont accordés, c’est bien que le budget 2020 du ministère de l’Environnement et du Développement durable est faible par rapport aux défis qui l’attendent. Mais aussi et surtout la révision du système salarial et indemnitaire des agents publics exerçant dans les services dudit ministère. Face au programme du ministre Abdou Karim Sall et ses collaborateurs, les députés ont tous plaidé pour le renforcement des finances d’un ministère pourtant transversal, parce qu’à cheval entre la santé, le cadre de vie et même l’éducation.

En outre, dans le combat mené contre la déforestation et la dégradation des sols, les élus locaux déplorent le manque notoire de moyens matériels des agents des eaux et forets qui exercent parfois au risque de leur vie. ‘’Face aux feux de brousse, ils ne disposent d’aucune citerne à même de gérer la situation. Face aux coupeurs de bois souvent armés, ils n’ont aucun moyen de défense. Pourtant, ils jouent un rôle très important dans la protection de nos forêts et de nos terres. Monsieur le Ministre, donnez leur les moyens de travailler. C’est plus que nécessaire’’, a plaidé l’honorable Awa Thiam.

La protection de l’environnement au Sénégal se heurte à plusieurs problématiques que les députés n’ont pas manqué de lister. Ce sont, entre autres, l’agression urbaine de la cité Technopole, l’exploitation de produits chimiques (le cas de Khondio), la disparition de la bande de filaos (notamment à Guédiawaye), la coupe frauduleuse de bois et l’absence de suivi dans les initiatives de reboisement. Sans oublier la pollution de l’air souvent causée par de vieux véhicules toujours en circulation. D’où le plaidoyer pour un renforcement des textes réglementaires et leur application scrupuleuse.

Dans la même veine, le député Aida Mbodj estime qu’il ‘’urge, pour le ministère, de réagir à la dégradation du marigot de Mbao, autrefois source de revenus pour les femmes. Aujourd’hui, il reçoit les eaux usées, les eaux d’inondations et des déchets de toutes sortes. La forêt de Mbao, quant à elle, risque de devenir un souvenir, si vos services ne font rien’’. Pour arriver à une lutte à fort impact, d’aucuns pensent que la solution est d’impliquer tous les acteurs (surtout les femmes et les jeunes), mais de surtout insister sur la compréhension des compétences transférées au niveau des collectivités locales. Qui, très souvent, veulent agir, mais sont limitées pour des raisons budgétaires.

La gestion du plastique, une question d’éducation

Une fois de plus, la gestion des déchets plastiques a occupé une place de choix dans les débats. Et selon les députés seules l’éducation et la sensibilisation peuvent apporter un changement de comportement, en plus d’une collaboration avec les services douaniers pour empêcher l’entrée sur le territoire d’emballages plastiques.

Toutefois, il se trouve qu’au Sénégal, les industries fabricant les sachets plastiques sont une source économique pour le pays et embauchent des milliers de Sénégalais. D’où l’interrogation du député Cheikh Seck : Que va-t-on faire de ces salariés ? A ce jour, le gouvernement a abrogé, il y a environ trois semaines, la loi de 2016 sur l’interdiction des sachets plastiques, dans le but de corriger ses insuffisances.

Selon le ministre, un nouveau projet de loi est établi : ‘‘A la veille de la Tabaski, nous avons fait des descentes sur le terrain, en vue sensibiliser les populations avant de faire appliquer la loi. Le problème qu’il se pose, c’est que l’agent chargé de veiller au respect strict des textes ne peut, au simple toucher, connaitre le micronage du sachet qu’il tient. Raison pour laquelle nous avons proposé un nouveau projet de loi qui prend en compte tous ces aspects.’’

Toutefois, au-delà de l’application de la loi, les députés estiment que l’éradication des déchets plastiques passe par une volonté populaire. ‘’Il faut que chaque Sénégalais se sente concerné par la question environnementale. Nous pouvons nous organiser dans les quartiers pour rendre propre notre cadre de vie sans toujours tout attendre de l’Etat. Monsieur le Ministre, le changement de comportement commence par les enfants. Il faut que vous collaboriez avec le ministère de l’Education pour enseigner les bonnes pratiques aux élèves’’, déclare le député Fatou Sène. 

De son point de vue, il faut apprendre aux ménages sénégalais la gestion des émissions de carbone, en d’autres termes les rendre sensibles et actifs face à l’augmentation des gaz à effet de serre.

Le budget du ministère de l’Environnement tourne autour de quatre programmes. A savoir : la lutte contre la déforestation et la dégradation des terres, la conservation de la biodiversité et la gestion des aires protégées, la lutte contre les pollutions, les nuisances et les effets des changements climatiques, le pilotage, la coordination et la gestion administrative.

Se disant en adéquation avec les interventions concernant la recrudescence de la coupe frauduleuse et illicite de bois, le ministre Abdou Karim Sall affirme que l’Etat du Sénégal prendra toutes ses responsabilités, en agissant face à ce problème accentué par l’exploitation faite par les pays limitrophes du Sénégal. Il propose, à ce sujet, une synergie d’action entre les forces de défense et de sécurité et les agents des eaux et forêts.

M. Sall promet, par ailleurs, un reboisement de 2 millions d’ha de terre, à l’horizon 2030, soit 200 000 ha par an. Ce qui devrait permettre l’absorption de 1,7 giga de tonnes de carbone par an.

DEFORESTATION, INNONDATIONS, AVANCEE DE LA MER

SONKO SE PRONONCE

 ‘’En ce qui concerne l’avancée de la mer, nous ne voyons pas de solutions de votre part. Pour Saint-Louis, il y a eu des solutions de fortune, avec la construction d’une digue de 4 milliards qui a été emportée par la mer avant même sa réception. On nous parlait d’un mur que vous devriez ériger avec la coopération française, allant de Guet-Ndar à Goxou Mbacc. Ce genre d’ouvrage pose beaucoup de préoccupations, parce que le sable va se retrouver ailleurs. Où en êtes-vous avec le projet de lutte contre les inondations en milieu périurbain à Dakar et à Saint-Louis, avec 121 milliards ?

Je pense que, dans l’urgence, il y a des mesures à prendre pour sauver des vies humaines. La forêt de Casamance disparait jour après jour. Replanter des arbres est plus difficile que la déforestation. Aussi, on ne peut avoir la même qualité de forêt. Il faut les moyens qu’il faut. Vous ne pourrez jamais gagner ce combat, si vous ne mettez pas les moyens qu’il faut et une politique d’anticipation.’’

EMMANUELLA MARAME FAYE

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