Publié le 23 Jul 2018 - 19:20
CESSION LAGUNE MBALING A HAROUNA DIA

Mbour appose son veto  

 

Le collectif pour la défense des intérêts de Mbour (Cdim) a organisé hier une marche verte pour contester le déclassement de la lagune de Mbaling. Ils dénoncent l'occupation illégale du domaine public qui fait partie du poumon vert de la Petite Côte.

 

La population de Mbour est désespérée. Elle est à bout de souffle et ne sait plus à quel saint se vouer. Depuis plusieurs mois, elle manifeste et proteste contre l'occupation illégale de la lagune de Mbaling. Ainsi, les populations, regroupées dans le collectif pour la défense des intérêts de Mbour (Cdim), dénoncent cette occupation, qu'ils jugent illégale en lançant : ''Sos Deegu Mbaling''.

Cette marche verte a gagné le pari de la mobilisation. Jeunes, vieux, hommes, femmes, enfants ont tous, main dans la main, fait une procession de la mairie de Mbour à la lagune de Mbaling, situé dans ladite commune. Fadel Barro, coordonnateur du mouvement Y en a Marre, venu prêter main forte à la Cdim, explique les raisons de sa présence : ''On n’a pas attendu d'être invités. Nous avons vu l'alerte sur les réseaux sociaux et nous nous sommes sentis concernés. On est là parce que nous estimons que c'est une cause juste. On vient renforcer ceux qui sont à Mbour et qui se battent. On leur dit que c'est un combat pour tous.'' Le Sénégal étant un Sénégal de tous et pour tous, comme l'avait prétendu le premier ministre Boun Abdallah Dionne, cette lutte n'est pas seulement celle des Mbourois. ''Nous nous sommes sentis concernés parce que nous sommes des Sénégalais. Le problème du littoral, c'est le problème du littoral sénégalais. 

Quand ça s'est posé à Dakar, on s'est battus et on continuera de nous battre. On se bat pour préserver tout le bien commun qui est aujourd'hui en train d'être pillé, d'être dilapidé, d'être violé par des projets cupides. Des gens qui ne sont intéressés que par l'argent ruinent notre cadre de vie, et ce que nous avons de plus beau au Sénégal. Ce pays n'est riche que par son environnement. Si on détruit ça, qu'est ce qui nous restera ? '' se demande Fadel Barro. Seulement les propos du Premier ministre ne semblent pas convaincre l'activiste de ‘Y en a marre’. Car, il dénonce le fait qu'au Sénégal, il y a de plus en plus des privilégiés à qui on accorde certains privilèges, au grand dam des populations.

''Y a que les riches qui doivent voir la mer. Si à ce rythme on n’arrête pas toute cette mafia cupide qui ne cherche que l'argent, demain les ‘‘badolo’’ (moins nantis) ne verront pas la mer. On n’aura pas où respirer. Je ne parle même pas des dégâts sur l'environnement. Si on arrête cette entrée de la mer vers la lagune, ça aura un impact jusque dans le delta du Saloum. On ne peut pas détruire ça pour quelques maisons. On ne peut pas détruire toute cette beauté de la nature pour quelques maisons, pour des privilégiés qui ont droit à l'oxygène, alors que d'autres étouffent ailleurs ''. En effet, cette réserve qui joue une importance capitale sur le plan de la biodiversité et de l'environnement a été octroyée à travers un décret présidentiel au milliardaire Harouna Dia.

Ce domaine public naturel, d’une superficie de 2ha 83a 48ca, commence déjà à être remblayé. Le Cdim interpelle le président Macky Sall pour qu'il revienne sur sa décision, en prenant un décret d'annulation de déclassement de la lagune, à réhabiliter la réserve ainsi que la lagune, mieux à inclure Mbaling dans la liste des zones humides protégées conformément à la convention de Ramsar. '' Au minimum, 1200 espèces végétales y vivent. Sur les 650 espèces animales qui sont répertoriées au Sénégal, les 450 sont sur ce site.

Nous sommes étonnés que le Président, dans sa démarche de protéger l'environnement, puisse signer un tel décret. Nous pensons que notre Président a été abusé. Nous lui demandons solennellement, au regard de ce que représente cette lagune pour l'environnement, que ce décret soit retiré '', soutient Lamine Diop, porte-parole du Cdim. Pour Fadel Barro, il est paradoxal qu'avec tout ce que l'Etat fait et entreprend pour lutter contre l'érosion côtière, de tels actes puissent être posés. ''On va aller quémander des milliards aux occidentaux pour arrêter l'avancée de la mer alors que notre action sur notre propre environnement pour arrêter la mer, personne ne s'en occupe '', déplore l’activiste.

KHADY NDOYE (MBALING)

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