Publié le 6 Feb 2017 - 18:37
COMITE DE SUIVI DE LA REFONTE DU FICHIER

Obligation de respect ou droit de remise en cause d’un consensus

 

Le pôle des Non-alignés  a répondu à l’invitation à la réunion convoquée le  23 janvier 2017, par le Ministre de l’intérieur et de la Sécurité publique, en vue d’installer  le comité de suivi que le Président de la République avait décidé de  créer, lors de l’audience accordée à la plateforme Mankoo Wattu Sénégal, le 1er  décembre 2016.

Cette rencontre qui devait donner corps à une décision présidentielle a été vidée de sa substance par l’initiative du ministre en charge des élections de remettre en cause le consensus  obtenu pour mener les concertations sur  le processus électoral.

Avec le  lancement du dialogue national sur l’initiative du Président de la République, les sénégalais étaient fondés à croire que la tradition de recherche d’accords sur les règles et modalités d’organisation des élections, en cours au Sénégal depuis 1992, allait être préservée.

Il faut rappeler que la rencontre du 9 juin 2016 entre le Ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique et les représentants des partis politiques légalement constitués avait retenu la décision de mettre en place une commission ad hoc composée, comme de coutume, de mandataires des différents partis politiques regroupés autour de trois pôles (Majorité, Opposition, Non alignés) ainsi que des représentants des autres acteurs du processus électoral.

Pour le démarrage  des concertations, comme indiqué plus haut, la tradition a donc été respectée et tous  les partis politiques légalement constitués se sont conformés au schéma arrêté.

Pour l’histoire, il est utile de rappeler  que :

·      En  2011, avec la mise en place du comité de veille,  le consensus trouvé était de travailler avec 6 pôles, alors qu’en 2014 pour une question de rationalisation et d’efficacité, il a été retenu que tous les partis qui ne se retrouvaient ni dans la majorité, ni dans l’opposition devaient constituer le pôle des Non-alignés. Ce consensus  est à la base du regroupement des trois pôles des partis politiques indépendants, non alignés, non coalisés en un seul  portant désormais l’appellation de Pôle des Non-alignés lors d’une assemblée générale  le 9 janvier 2014.

·      Cette  règle  a été reconduite d’un commun accord le 9 juin 2016.

·      L’impossibilité de créer un nouveau pôle est  à la base de  l’invite faite aux deux groupes de partis qui avaient présenté des listes différentes, de les fusionner  pour permettre l’installation de la commission de revue du code électoral.   

·      Dans ses conclusions, la commission technique de revue du code électoral qui s’est réunie du 16 juin au 3 août 2017, a fait cette recommandation  que le Président à validée :

« Créer une commission de suivi de la refonte partielle du fichier électoral en associant les représentants des pôles des partis politiques légalement constitués. »

Au vu de ce qui précède, on comprend  aisément,  la désapprobation qui a accueilli la décision unilatérale, inopportune et inélégante  du ministre, qui remet en cause fondamentalement la confiance attendue entre acteurs du processus électoral.

 Il devient alors clair, que le débat ne porte pas sur la notion de pôle indépendant ou de candidat indépendant mais plutôt sur le respect d’un consensus obtenu depuis  2011.

La  majorité  a voulu jouer à la confusion en tentant de justifier la présence d’un quatrième pôle par l’introduction dans le code électoral de la notion de candidat indépendant, ce qui  m’avait amené à préciser que  l’indépendance en question concerne les personnes n’ayant jamais appartenu à un parti politique ou ayant cessé toute activité politique depuis au moins un an.

Les partis politiques dits indépendants appartiennent aux non alignés depuis 2014.

La classe politique ne saurait accepter que  le  Ministre de l’Intérieur ait la latitude de créer des pôles à sa guise, sans concertation ni consensus, dans le seul but de divertir ou de décrédibiliser  le travail qui est en cours pour permettre au Sénégal d’aller à des élections libres, démocratiques, transparentes et apaisées.

En lui laissant  la liberté de dérouler sa stratégie, on va vers un nombre de pôles avoisinant celui  des partis, puisqu’il suffira simplement d’adresser une correspondance en se donnant un nom pour  créer un nouveau pôle.

Cette politique de déconstruction des acquis n’honore pas notre pays.

C’est justement ce qui a poussé la majorité, à déclarer que «  le comité de suivi n’a aucun caractère obligatoire. C’est sur demande des parties prenantes au processus électoral que le Ministre a accepté sa création »

Je voudrais à ce niveau, demander  ce qu’on fait alors de la décision du Président de la République de créer ce comité, si on veut nous faire croire qu’il n’est pas obligatoire et  découle de la bonne volonté du Ministre.

Cette démarche n’est pas républicaine, car elle sous-entend que l’application de la décision du Président relève du bon vouloir d’un ministre de la République.

Il est regrettable qu’elle soit l’œuvre de la majorité parce que défendre l’indéfendable ne devrait pas pousser à ces incohérences.

On n’a pas besoin d’aller plus loin, car il ne fait l’ombre d’aucun doute que le Ministre a remis en cause des accords de façon inacceptable. Tous les acteurs du processus électoral doivent le lui dire pour que la sérénité revienne.

La politique du forcing, du fait accompli, du coup de pouce aux amis n’est pas de nature à renforcer  le  leadership de notre pays en matière de démocratie.

C’est pourquoi, le Président de la République doit reprendre l’initiative pour pouvoir faire autant ou mieux que ses prédécesseurs.

N’est-ce  pas lui qui disait à l’occasion de la cérémonie de lancement, le 28 mai 2016 : «.. la réponse à mon appel, qui témoigne de l’intérêt que nous portons à notre pays et de notre commune volonté d’assurer son ancrage irréversible dans la modernité démocratique. Le consensus est, également, une forme d’expression de la démocratie. A cet effet, je m’inscris dans la tradition de notre peuple dont le génie a toujours permis de trouver les ressorts pour construire des convergences fortes autour de notre pacte social sur la base de la confiance mutuelle » ?

A n’en pas douter, la démarche du Ministre de l’intérieur est en porte à faux avec cette orientation.

Il faut travailler à ce que les résultats proclamés découlent d’une compétition dont les règles sont acceptées de tous.

Le pôle des Non-alignés  s’est toujours investi pour des concertations qui mettent les intérêts du Sénégal au-dessus des préoccupations partisanes.

Il a toujours promu les vertus du dialogue et du respect des règles arrêtées  d’un commun accord.

C’est pourquoi, j’en appelle au Président de la République et à tous les acteurs du processus électoral,  pour éviter à notre pays les dérives post-électorales porteuses d’instabilité dans une sous-région qui est déjà sous tension dans tous ses compartiments.

Diourbel le 6/2/17

DETHIE    FAYE

Président de la CDR/fonk sa kaddu

Plénipotentiaire du pôle des Non alignés

 

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