Publié le 20 Jul 2015 - 10:41
COMMENTAIRE

Imam hors sujet !

 

Nos traditions bien africaines, donnent une place centrale à la parole donnée à l’époque où la simple déclaration suffisait à la personne qui la faisait, à ne pas y renoncer sous peine de perdre son honneur, sa dignité. Le récent exercice auquel Moussa Samb a voulu livrer Macky Sall n’est rien d’autre que le reniement. « Nous les électeurs, nous avons voté pour que vous fassiez sept ans à la tête du pays. Nous vous demandons d’aller au terme de votre mandat ; il faut faire les sept ans car c’est ce que demande le peuple, même si nous comprenons ce qui vous a pousséà vouloir le ramener à cinq ans »,  a déclaré l’Imam dans son sermon, ce samedi 18 juillet. Curieux quand même pour un imam que de prodiguer de tels conseils !

M. Samb a tout simplement raté l’occasion d’honorer sa fonction. Sa seule parole doit être celle de Dieu sans toutefois être celle d’un flagorneur et encore moins celle d’un courtisan. La grande mosquée si populaire et si officielle que le Président de la république y prie à chaque grande fête religieuse, ne connaît ni libéral, ni socialiste, ni trotskyste et encore moins d’ethnie ou de groupes particuliers. Elle ne reconnaît qu’une communauté une et indivisible.

On y attendait sans doute une dissertation construite et d’explications sur cette inextricable équation des deux korités, ou sur les enseignements des textes sur des sujets tels que l’apparition de la lune pour apaiser le désarroi des Sénégalais, voire un discours sur l’éthique du travail, contre la corruption et en faveur de la solidarité dans la communauté, au moment où, le Sénégal ne brille pas par les résultats de son économie et la sauvegarde de ses ressources financières.

Moussa Samb doit juste comprendre que quels que soient les avantages qu’il puisse tirer de sa fonction, il les doit aux deniers des Sénégalais qui attendent de lui qu’il soit dans une posture de neutralité et non de propagande.

Mais heureusement que Le Conseil supérieur des Grands Dignitaires de la Collectivité Léboue (M. Samb est de la communauté léboue) ayant été le témoin de cette dérive, n’a pas perdu de temps pour se fendre d’un communiqué désavouant l’imam, relevant de ce fait que « depuis trois ans, il ne se passe pas une prière collective de l’Aïd-el-Kébir ou de l’Aïd-el-Fitr sans que l’écrasante majorité des musulmans du pays n’aient à souffrir dans leur foi du dévoiement de la noble mission de la «mînbar» (chaire) de cet illustre lieu de culte qu’est la Grande Mosquée de Dakar’’. Aussi a-t-elle tenue à s’excuser : « La Collectivité Léboue présente (encore une fois !) ses excuses à toute la Oumma islamique, pour cette échappée dont ce n’était ni le lieu (la Grande Mosquée), ni le jour (l’Aïd-el-Fitr), et qui aura davantage été source de discorde que de concorde nationale »,

Une situation qui laisse tout de même songeurs les Sénégalais et qui donnent à réfléchir sur la politisation rampante de tous les espaces et même religieux. Et l’on ne peut manquer de s’interroger sur le respect des critères qui doivent gouverner l’éligibilité de l’Imam dans les mosquées, mais en particulier dans une mosquée où ont lieu les prières officielles. Mais, il faut tout de même dire que Moussa Samb n’est pas à son premier coup d’essai. Il avait, lors d’une récente fête religieuse, pris fait et cause pour Abdoulaye Makhtar Diop quant au titre de Serigne Dakar à l’intérieur de cette même grande mosquée pour une affaire qui ne concernait que la communauté léboue. Et pourtant personne ne lui avait demandé de trancher, puisqu’il n’était pas représentant de celle-ci. Ce qui pousse à se demander si cet imam est encore apte à assumer son statut. En voulant en tout cas être plus royaliste que le roi, M. Samb a rendu un très mauvais service à Macky Sall, en le mettant à dos d’une certaine opinion. Une question tout de même : « pour qui avait voté l’Imam Samb, lors de la dernière élection présidentielle ? Pour Wade ? Pour Macky ? Qui sait ?

 

 

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