Publié le 24 Oct 2014 - 08:53
COMMENTAIRE

La chasse aux contradictions est ouverte !

 

«Le jeu en vaut-il vraiment la chandelle?» Voici, sans aucun doute, la question que doit se poser Cheikh Diallo à l’issue, hier, de son troisième jour d’interrogatoire… Surtout quand on sait que ce n’est pas fini, puisqu’il lui faut, ce jeudi encore, faire rebelote à la barre. Le jeu en vaut-il donc réellement la chandelle, quand on voit la quantité d’énergie qu’il lui faut déployer pour éviter de s’emmêler dans le jeu quasi-mortel de questions-réponses auquel le soumet depuis deux jours la défense de Karim Meïssa Wade ?

Soyons honnête : il importe peu, dans le cas échéant, que Karim Wade soit, oui ou non, coupable de ce dont l’accuse Cheikh Oumar Diallo… De cela, seule la CREI est apte à décider. En ce qui nous concerne (et en ce qui concerne l’opinion dont nous sommes, en vertu de notre statut de journaliste, le relais), le problème est tout autre : il s’agit d’un problème humain. Comment, ainsi, comprendre l’attitude, à la barre, de Cheikh Oumar Diallo qui, on le rappelle encore, ne s’est pas montré hâtif de ‘’tout dire’’ devant les gendarmes et n’a finalement parlé qu’une fois s’être rendu compte que les carottes étaient cuites ?

Ce n’est pas le comportement d’un ‘’manifestant de la vérité’’, contrairement à ce qu’il prétend, depuis le début de son audition… Le choix correct pour qualifier ledit comportement serait plutôt le mot ‘’déloyal’’. Si l’énervement l’emporte chez nous sur la sacralité des faits, ne serait-ce qu’un court instant, il convient de replacer ces affirmations dans le contexte du procès et de consigner, point par point, les raisons qui valent un tel jugement de valeur.

Arrivé, pour le 3e jour d’affilé, vêtu du même ensemble immaculé agrémenté d’une écharpe nouée à son cou, Cheikh Oumar Diallo s’est donc plié à l’exercice de répondre aux questions posées par la Défense… Sauf qu’il ne s’est pas arrêté à faire cela. Viennent, en premier, ses commentaires désobligeants (voire discourtois) à l’encontre des avocats ayant à dialoguer avec lui par l’intermédiaire de la Cour.

Ainsi, depuis lundi, Cheikh Diallo avait, entre autres, fait des allusions aux convictions politiques douteuses de Me Amadou Sall et à la probable origine douteuse du patrimoine de Me Madické Niang… Hier, ce fut au tour Me Clédor Ly d’y passer, puisque le journaliste a balancé sur une tragédie familiale vécue par ce dernier pour se dédouaner quant à ‘’la prudence’’ que l’avocat lui imputerait lors de l’instruction ! Mieux encore, il a même égratigné l’inculpé principal, en faisant allusion à ‘’sa dame’’ qui aurait été témoin d’un échange houleux entre eux deux, suite à la fameuse ‘’mise en demeure’’ que Cheikh Diallo persiste avoir reçue de la part des avocats de ce dernier.

À ce qu’on sache, à moins de citer nommément la personne en question et de la faire comparaître, son existence potentielle n’intéresse personne devant ce tribunal… Connaissant le témoin, on doute qu’il s’en serait privé, si c’était ne serait-ce qu’un tant soit peu possible.

Lapsus

Que dire des lapsus répétés de Cheikh Diallo ? Outre le fait de confondre les mots ‘’prête-nom’’ et ‘’faire valoir’’, il s’est surpris à plusieurs reprises à répéter des choses qui trahissent, chez lui un agenda. En effet, ‘’jurant par Allah’’ qu’il ne ‘’veut pas’’ qu’on ‘’l’enfonce’’, qu’on le ‘’défonce’’ (étonnant choix de mots) et que ‘’sa priorité numéro un (NDLR : au moment de son incarcération) était de sortir de ce trou’’ qu’est Rebeuss, Cheikh Diallo a aligné dénégation sur dénégation… À croire qu’il aurait presque peur (malgré le ‘’non-lieu total’’ dont il bénéficie) de retourner en prison !

Ainsi, comment croire l’homme, quand il dit être animé d’une soif de vérité, alors qu’il laisse lui-même échapper que c’est autre chose ?  Enfin, le talent particulier de Cheikh Diallo à nier les contradictions ballantes qu’il fait lui-même à la barre, parfois littéralement à cinq minutes d’intervalle, grâce à une sorte de funambulisme lexical souvent, par ailleurs, mal à propos…

Ainsi, on ne lui aurait pas ‘’donné’’ mais ‘’octroyé’’ 30% des parts de CD média. Il serait donc ‘’propriétaire’’ des dites actions et ‘’ce serait tout à fait normal’’ qu’il bénéficie des éventuelles retombées économiques, tout en restant pour autant ‘’un simple prête-nom’’… Il aurait, ensuite, immatriculé deux voitures du parc automobile du groupe de presse au nom de sa propre société Stratégia, mais soutient quand même que ‘’le véritable propriétaire’’ des dites automobiles est ‘’celui qui en dispose’’ et, donc, pas celui dont le nom figure sur la carte grise des véhicules...

De pareils exemples, il y en a légion dans ses déclarations. Mais, ultimement, ce que soutient Cheikh Diallo est que, fi du fait que son nom se trouve sur l’ensemble ou presque des documents officiels ayant trait à CD Media (sans parler du fait que ce sont ses propres initiales, diantre!), il ‘’insiste, persiste et signe’’ n’avoir jamais rien possédé dans cette affaire, ni compris qu’être un prête-nom était répréhensible…

Il faut reconnaître qu’il est bougrement fort !

Sophiane  Bengeloun

 

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