Publié le 1 Jun 2019 - 00:26
COMMISSION CELLULAIRE

Le dream team du dialogue politique

 

C’est une équipe de rêve qui a été mise en place par le gouvernement pour conduire le dialogue politique qui s’annonce palpitant. EnQuête vous présente les heureux élus.

 

Après la nomination du président Famara Ibrahima Sagna pour conduire le dialogue national, le gouvernement a désigné 4 autres personnalités devant présider la commission cellulaire dans le cadre du dialogue politique. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il s’agit d’une équipe de rêve. Tous les quatre qui composent ladite commission sont connus pour leur respectabilité auprès de l’opinion y compris des acteurs politiques. Comme président de la Commission, il y aura le Général Mamadou Niang. Selon certaines informations, Babacar Kanté a aussi été proposé en tant qu’expert en sciences politiques, Aliou Sall proposé comme rapporteur et Mazide Ndiaye également a été choisi pour ses connaissances en matière électorale et ses capacités de négociateur. Des personnes qui ne sont plus à présenter dans l’espace public.

Général Mamadou Niang, l’homme du consensus

Né en 1938 à Podor, il est souvent donné en exemple pour avoir conduit de main de maitre le processus ayant abouti à la première alternance du Sénégal en 2000. En effet, le général a été le président de l’Observatoire national des élections entre 1997 et 1998. En 2000, dans le premier gouvernement de Maitre Abdoulaye Wade dirigé par Moustapha Niasse, il est nommé ministre de l’Intérieur. A ce poste, il avait remplacé, un autre général du nom de Lamine Cissé. Le Général a également servi le Sénégal dans différents pays, en tant qu’ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire. En cette qualité, il a servi d’abord en Guinée Bissau, ensuite au Brésil à partir de 2003 auprès du président Luis Ignasio Lula Da Silva, avant d’être affecté au Royaume-Uni auprès de sa majesté la reine Elisabeth II.

En tant qu’officier, le général est aussi décrit comme un soldat exemplaire qui a servi la nation à différents échelons. Aujourd’hui âgé de 81 ans, il a sous sa charge de faire restaurer la confiance entre les acteurs politiques. Un rôle qu’il du reste déjà joué dans le passé, en tant qu’ancien président de l’ONEL. Son ancien collègue dans cette institution Babacar Kanté, à l’occasion de la cérémonie de dédicaces du livre à lui dédié par la communauté universitaire, se remémore : ‘’Le samedi soir, avant les élections législatives de 1998, il disait : Mesdames et messieurs tout ce qu’on a fait jusqu’à maintenant, c’est de la blague.

L’heure de vérité, c’est demain. Le monde entier nous regarde. Si quelqu’un dans ce pays pense que, moi Général Niang, déjà à la retraite, ayant tous les avantages attachés à ma fonction, on va me prendre pour me mettre à un poste où on va me manipuler… Cette personne… Pardonnez-moi il a utilisé un langage militaire que le cadre solennel de cette rencontre ne me permet pas de répéter’’. Alors que les collaborateurs de l’ONEL, rapporte M. Kanté, se réjouissaient, il continuait : ‘’Mais attention… Je n’accepterai pas non plus qu’un homme politique, en manque de popularité, aille dans un village qu’on ne peut pas situer sur la carte du Sénégal, tombe sur un bulletin ramassé dans une poubelle, pour venir à Dakar et dire que les élections sont frauduleuses et qu’il faut les annuler, je ne l’accepterai pas. J’ai retenu de cette position d’équilibre beaucoup de leçons’’. Il est l’homme du consensus ayant mené vers la présidentielle de 2000.

BABACAR KANTE 

 Le triomphe de l’humilité et de la rigueur

Il est peu connu du grand public. Mais dans le milieu universitaire et scientifique, l’homme n’est plus à présenter. Ancien de l’ONEL, ancien vice-président du Conseil constitutionnel, il a durant toute sa carrière servi l’Université sénégalaise avec dévouement. Ce qui lui a bien été rendu avec les mémoires publiés par la communauté universitaire en son honneur. A cette occasion d’ailleurs, il déclinait sa passion : ‘’Moi, je n’ai jamais été syndiqué, je n’ai jamais fait partie d’aucun parti politique, mais, le jour où je verrai les trois composantes de l’université : enseignants, étudiants et Pats mettre sur la table une revendication au nom de l’Université, je serai le premier à défiler’’. Malheureusement, selon lui, ce qu’il a l’habitude de voir, ce sont des revendications corporatistes de chaque entité. Rigoureux pour certains, sévère pour d’autres, le professeur, qui a enseigné aussi bien à l’Université Cheikh Anta Diop qu’à Gaston Berger, est un homme de synthèse qui n’a pas de frontière.

Et le moins que l’on puisse dire, eu égard à certains témoignages, c’est que les parties prenantes au dialogue vont devoir s’armer de courage et de sciences pour arriver à composer avec lui, dans le cadre d’un dialogue politique. En effet, pour certains, le professeur, en apparence, est assez hermétique, mais, il peut, quand les circonstances le demandent, faire aussi preuve de beaucoup d’ouverture. Une anecdote rapportée par le ministre Ismaïla Madior Fall, à l’occasion de la cérémonie de dédicaces de ses mélanges. ‘’Le seul canal possible pour entrer en contact, en tout cas à l’époque, c’était par email. Il ne répond pas au téléphone.

Aussi, il est impossible de se présenter devant lui à l’improviste’’. Ce témoignage du professeur Demba Sy est également assez illustratif et devrait servir d’exemple aux politiques. ‘’Une fois dans un pays d’Afrique, il était président d’un jury. Un professeur de ce pays, très connu et respecté dans ce pays, est arrivé en retard, alors qu’il était membre du jury, le professeur lui dit qu’il ne va pas siéger’’. S’ensuivit un branle-bas et les choses finirent par se passer comme le veut l’ancien doyen de la faculté des Sciences juridiques et politiques, camarade de promotion de l’ancien Premier ministre Mamadou Lamine Loum. Un exemple d’humilité, selon Ismaïla Madior Fall, Co-directeur avec le professeur Aliou Sall des mélanges en l’honneur de Babacar Kanté. ‘’C’est un homme multidimensionnel. Je ne vais pas m’aventurer à parler de lui’’, disait-il, lors de la même cérémonie. Les mélanges, finissait-IMF, c’est le triomphe de l’humilité.

Alioune Sall, l’expert des relations internationales

Parmi les personnalités devant conduire le dialogue politique, il est sans doute le plus jeune. Mais son parcours, déjà riche de plusieurs expériences au plan national comme international, force le respect de ses pairs. Co-directeur des mélanges en l’honneur du professeur Kanté, il connait bien la matière électorale et les dures réalités des négociations entre hommes politiques. Homme de lettre, avocat international, le Professeur très connu des étudiants de l’Université Cheikh Anta Diop est aussi juge à la Cour de justice de la CEDEAO. Il a, à son actif, plusieurs publications dont : ‘’La justice de l’intégration’’, ‘’Les relations extérieures de la CEDEAO’’, ‘’L’affaire Hissène Habré’’, les Mutations de l’intégration des Etats en Afrique de l’ouest’’. Agrégé des facultés de Droit, il a fait ses études primaires à Rufisque, avant de rejoindre le prytanée militaire de Saint-Louis. Alioune Sall a été rapporteur général et porte-parole de la Commission chargée de mettre en place la CENA, en 2005, au Sénégal. Il a également été membre de la mission UE-USAID chargée de préparer les termes de référence de l’audit du fichier électoral au Sénégal.

Mazide Ndiaye, Pacte : L’éternel médiateur

Infatigable, irréprochable, très respectable. Les mots ne manquent pas à nos interlocuteurs pour saluer le dévouement et l’engagement de ce grand Monsieur de la société civile, connu pour son rôle éminemment important dans l’apaisement des relations souvent conflictuelles entre pouvoir et opposition. A bientôt 80 ans, l’homme qui, visiblement, reste en pleine forme, ne se lasse pas d’œuvrer pour la seule cause de la République : la préservation de la paix sociale. Depuis les années 1990, nous informe-t-on, il a été au-devant de tous les combats ‘’civils’’, en tant que ‘’médiateur’’. Un rôle qu’il exerce à merveille de par ses qualités humaines incommensurables, indiquent certains témoins.

A titre d’exemple, en 2011, dans le contexte délicat de l’organisation de l’élection présidentielle de 2012, quand tous les acteurs avaient eu du mal à trouver un personnage consensuel pour diriger le Comité de veille et de suivi des élections, tous les esprits s’étaient tournés vers lui. Malgré son âge avancé, il a toujours son bâton de pèlerin pour tenter de réconcilier les différentes parties autour de l’essentiel. Il est aujourd’hui le président de la Plateforme des acteurs de la société civile pour la transparence des élections (Pacte). Sa neutralité et son intégrité ne sont plus à démontrer.

Dans le secret des tractations

Ce n’était pas évident de trouver des personnalités qui font l’unanimité au sein de la classe politique, mais à l’arrivée, opposition et pouvoir et non-alignés sont parvenus à un accord, comme indiqué plus haut. Pourtant, les choses n’ont pas été si aisées, bien qu’elles se soient déroulées dans un esprit de dépassement. En effet, les trois pôles avaient, dans un premier temps, chacun en ce qui le concerne, retenu une liste de fortes personnalités connues pour leur neutralité. Du côté des non-alignés, le choix a vite été fait et a porté sur les professeurs d’université Babacar Kanté et Alioune Sall.

Pendant, ce temps, la société civile, elle, s’était mise d’accord sur Mazide Ndiaye et le professeur Babacar Gueye, connus pour leur engagement actif dans la société civile, ainsi que leur maitrise de la matière électorale. Le pôle de la majorité, elle, avait jeté son dévolu sur les professeurs Kanté et Sall, ainsi que le Général Niang. Pour l’opposition, cinq noms ont été avancés dont le Général B. Keita, Mazide Ndiaye, Babacar Kanté…

A l’arrivée, Mazide a été retenu, tout comme Kanté, leurs noms étant revenu plusieurs fois. Alioune Sall a été aussi été choisi comme une proposition des non-alignés et le Général Niang comme celle de la majorité. Hormis le bureau, certaines informations signalent que chaque bloc politique aura droit à 15 représentants (même si le nombre n’est pas encore fixé). Certains ont, en effet, demandé à ce qu’il soit porté à 20. La société civile, par contre, aura 4 représentants, en l’occurrence Moundiaye Cissée, Waldiodio Ndiaye, Youssou Dao et Djibril Gningue. La commission sera installée, aujourd’hui.

MOR AMAR

Section: