Publié le 29 Jul 2016 - 10:28
CONCOURS GENERAL 2016

Un Classement, des doutes et des questions !

 

Le lycée Seydina Limamoulaye, a-t-il eu raison de se plaindre de son rang au Concours Général édition 2016 ? Sans forcément être dans la contestation, le débat a le mérité d’être posé afin de voir dans quelle mesure le désormais très couru Concours Général, devenu un label pour les écoles, pourrait être plus équitable dans son classement et son principe.

La remise en cause de ce classement par Limamoulaye est relative en fait au système de pondération. ‘’Nous avons eu 15 distinctions et 11 accessits et bien d'autres distinctions. On ne sait pas sur quoi on se base pour classer les établissements. Nous contestons le classement. Je crois que nous ne pouvons pas être deuxième cette année, au regard de ce que nous avons produit’’, avait tempêté un enseignant de l’établissement en l’occurrence, Meissa Ndong, interrogé par Sud FM. Il faisait remarquer que Serigne Mbaye Thiam (ministre de l’Education nationale) a annoncé que Mariama Ba a obtenu 29 points sans toutefois se prononcer sur le nombre de points obtenu par le lycée LimamouLaye et décliner le système de pondération utilisé à cet effet.

Et lors d’un point de presse organisé, la même question de la pondération a, à nouveau été soulevée par Lamine Mbaye, professeur de Français. Irrité par cette situation, celui-ci avait ajouté : ‘’Nous avons entendu le ministre dire que le lycée Mariama Ba est premier, vient ensuite le lycée Seydina Limamou Laye. Je crois qu’il y a quelque part des règles qui ont été modifiées, transformées et changées. Je rappelle à l’opinion qu’on ne change pas d’étalage au milieu du gué’’.

Une situation à laquelle avait naturellement répondu le ministère de l’Education nationale à travers un communiqué signé par le Directeur de l'Enseignement moyen et secondaire, M. Oumar Ba. "Pour plus d’équité́ et de transparence dans le classement des établissements, l’option a été́ prise de tenir compte de la valeur de la distinction pour le classement aussi bien des lauréats que des établissements", faisait savoir celui-ci avant de poursuivre : ‘’à partir de 2015, il a été retenu un système de pondération qui distingue, en termes de points attribués, les prix des accessits, mais également  les distinctions selon le rang. 

En appliquant cette pondération aux distinctions du lycée Seydina LimamouLaye, ledit établissement obtient avec ses 15 distinctions 29 points. Sur la base du même barème, la Maison d’Education Mariama Ba totalise 29,75 points avec 14 distinctions ‘’. Ainsi, Serigne Mbaye Thiam et son équipe sont formels : ‘’le classement des établissements ne se fait plus sur la base du nombre de distinctions, mais plutôt à partir de la somme pondérée des points des distinctions obtenues’’. 

Le nombre de candidats et le nombre de matières, des éléments plus objectifs

Mais au-delà de cette polémique créée, le système de pondération qui implique les coefficients attribués en fonction de l’obtention d’un premier prix, second prix et accessits, comporte quelques limites et est même inéquitable dans son fondement. Il est connu que dans ce concours en question, ce sont des lycées aux effectifs différents en termes de nombre qui sont mis en compétition. Limamoulaye compte par exemple près de 30 terminales tandis qu’un lycée comme Mariama Ba ou le Prytanée militaire n’en compte que 3, si l’on se fonde sur le système classique (A, C et D qui correspondent à des séries L, S1 et S2).

Un autre élément discriminant à relever dans ce Concours général, est le nombre de matières dans lesquelles, les candidats concourent. Il y a en effet beaucoup de matières qui existent dans des écoles telles que Maurice Delafosse, Limamoulaye, André Peytavin de Saint-Louis, etc. telles que la construction mécanique, les techniques comptables, l’électrotechnique, les études islamiques, l’Economie générale et des langues telles que le Portugais, l’Italien et le Russe qu’on ne trouve pas à Mariama Ba ou au Prytanée militaire ; ou  chez d’autres lycées où ne sont pas enseignées ces trois dernières langues précitées.   

Ce n’est donc pas un hasard si Limamoulaye a par exemple obtenu un 2ème prix en Economie Générale (le 1er prix n’étant pas décerné) et un 2ème prix en Construction Mécanique en classe de terminale (1er prix non décerné) ou encore que le Lycée André Peytavin ait obtenu le 1er prix en Electronique-Electrotechnique, ou encore Immaculée conception, un 2ème prix en en Techniques comptables (1er prix non décerné). Des résultats qui s’expliquent par le fait que beaucoup d’autres écoles n’enseignent pas ces matières-là.   Elles sont les rares à intégrer celles-ci dans leurs enseignements.

Ce qui revient à dire que le système de pondération en question choisie, devrait plutôt tenir compte du nombre de candidats présentés et du nombre de matières dans lesquelles les candidats peuvent concourir. Comment en effet comparer celui qui présente 100 candidats et celui qui en présente 20 ? Il existe assurément une probabilité plus importante pour une école qui présente plus de candidats, d’obtenir plus de récompense.

Si en plus, celle-ci compose dans plus de matières pour lesquelles, ne peut composer une autre école, il y a de quoi s’inquiéter pour cette dernière. Pour pousser plus loin ce raisonnement, prenons l’exemple d’un lycée X qui ne peut présenter que dans 10 matières, il ne peut, si on raisonne de manière extrême, obtenir que 10 prix. Par contre le lycée qui peut postuler dans ces 10 mêmes matières en plus de l’Economie générale, la construction mécanique, l’électrotechnique et dans 3 langues supplémentaires que sont le Portugais, le Russe et l’Italien, peut en obtenir bien plus ? Doivent-elles être à partir de ce moment, classées de la même manière ? Assurément non.

Et même en occultant ces exemples qui soulèvent la question de la pondération, l’on se rend bien compte que les 2 premières écoles de ce Concours (Mariama Ba et LimamouLaye), n’ont pas toutes les deux obtenu de 1er prix, alors que respectivement, les 3èmes ex-aequo et 5ème du classement Yavuz Selim, Ecole de Thiaroye et le Prytanée ont chacune, au moins obtenu, un 1er prix. Ironie de la pondération !

La notion de ‘’meilleur établissement ‘’ à relativiser

Une autre forme d’injustice à déplorer, c’est l’argument qui consiste à désigner tel ou tel autre lycée, meilleur établissement à partir du simple nombre de prix ou d’un classement issu du Concours général. Il serait en effet bien plus intéressant de corréler les résultats du Concours général avec ceux du baccalauréat et du Bfem. Car, beaucoup d’écoles qui apparaissent dans le classement du Concours Général, n’obtiennent pas forcément de bons résultats au Bac et au Bfem.

Ce qui signifie, qu’en se basant sur le Concours général, l’on se fonde uniquement sur les résultats de l’élite sans tenir compte du système plus démocratique que sont les examens et que tout le monde partage. C’est dire que la raison d’être du système n’est pas à la base de produire une élite, mais de promouvoir un enseignement de qualité, accessible à tous. Beaucoup d’écoles déploient beaucoup de moyens à cet effet pour être cités dans ce Concours si couru de nos jours, en oubliant la grande masse d’élèves qui paient des sommes faramineuses pour des études de qualité.

Continuer à créer une saine émulation via le Concours Général, est certainement une bonne chose, mais innover par un système de classement plus juste et plus équitable, serait encore mieux, sans bien entendu occulter les résultats du Bac et du Bfem qui permettent de franchir des étapes vers la vie professionnelle. Loin de dévaluer le Concours Général, l’on a vu des lauréats de ce prestigieux concours, réussir au Bac au second tour. Simple ironie du sort.    

Abdelkader NDIAYE

CONSULTANT

 

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