Publié le 26 Mar 2015 - 09:38
CRASH DE L’A320

Le BEA n'exclut aucune hypothèse

 

Généralement, dans les enquêtes sur les accidents d'avions, l'analyse des boîtes noires est une étape très attendue car elle permet d'en apprendre davantage sur les causes et les circonstances. Pour l'avion de la Germanwings, qui s'est écrasé mardi 24 mars dans le sud des Alpes françaises, une seule des deux boîtes noires a été retrouvée pour l'instant. Les experts du Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA) se sont penchés dessus, ils ont rendu les premières conclusions.

 

« C'est une scène très difficile d'accès », avait d'emblée prévenu le général de gendarmerie David Galtier, mardi après-midi. Mais une des boîtes noires, le CVR (Cockpit voice recorder), de l'appareil a été retrouvée et, selon les dernières informations disponibles, il s'agit de celle enregistrant les sons et des conversations à l'intérieur du cockpit. Elle est exploitable mais « endommagée », a précisé une source proche de l'enquête à l'AFP. Elle a été transférée à Paris hier matin, au Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA).

Lors d'une conférence de presse, Rémi Jouty, le directeur du BEA, a expliqué, hier, que les travaux d’exploitation et de lecture de la boîte noire trouvée mardi sur l’épave de l'avion ont démarré dès son arrivée à Paris et se sont poursuivis ce mercredi tout au long de la journée. « Quelques difficultés ont été rencontrées pour les lire, cependant nous avons à l’instant réussi à en extraire un fichier de données audio utilisables. Nous savons que c’est bien relatif à ce vol-là ». Une très bonne nouvelle au vu de l'état très dégradé de cette boîte noire.

Il est trop tôt pour tirer la moindre conclusion, il faudra plusieurs jours encore, a expliqué le directeur du BEA. « A ce stade, on ne ferme aucune hypothèse ». Rémi Jouty a toutefois estimé que la concentration des débris n'était pas compatible avec une explosion en vol et que le scénario d'une dépressurisation n'était pas privilégié. L'avion a volé « jusqu'au bout » avant de s'écraser. Le dernier message émis de l’avion était un message de routine, explique encore le directeur du BEA.

Les enquêteurs du BEA épaulés par leurs homologues allemands et espagnols, vont désormais s'atteler à un travail détaillé pour comprendre et interpréter tous les sons entendus sur ce fichier audio. Mais pour tirer la moindre conclusion, l'exploitation des sons devra absolument se faire en coordination avec les paramètres de vol, contenus, eux, dans la seconde boite noire, dite FDR (Flight Data Recorder), qui n'a pas encore été retrouvée, contrairement à l'information donnée par François Hollande, selon qui « l'enveloppe » de cette boîte aurait été retrouvée.

Des gendarmes passeront la nuit de mercredi à jeudi autour des débris de l'avion, à environ 1 500 mètres d'altitude, puis les investigations reprendront jeudi matin après le lever du jour pour retrouver la deuxième boîte noire de l'appareil. Le directeur du BEA s'est dit « raisonnablement optimiste » de la localiser.

De son côté, le patron du groupe aérien Lufthansa, Carsten Spohr, a affirmé ce mercredi que l'avion était « techniquement irréprochable » et a qualifié l'accident d'« inexplicable ».

Selon le patron de la compagnie Germanwings, l'Airbus A320 aurait commencé à perdre de l'altitude vers 10h32, mardi 24 mars, et aurait chuté durant huit minutes avant de s'écraser. La descente modérée de l'avion et sa trajectoire linéaire le conduisant directement sur les montagnes traduisent un comportement inexplicable de l'équipage, avancent des experts aéronautiques. L'équipage peut avoir été rendu inconscient, en raison d'une dépressurisation lente et d'un manque d'oxygène. Le pilote peut avoir été suicidaire ou obligé par un tiers à s'écraser contre la montagne. L'équipage n'a pas émis d'appel de détresse. Le contrôle aérien a pris l'initiative de déclarer l'avion en détresse car il n'avait plus aucun contact avec l'équipage et l'avion.

Une chapelle ardente et un PC opérationnel ont été installés à Seyne-les-Alpes où des familles de victimes se succèdent ce mercredi. François Hollande, Angela Merkel et Mariano Rajoy sont sur place. Ils se sont entretenus avec des médecins, des pompiers et militaires impliqués dans la recherche des corps. Deux nouvelles victimes espagnoles ont été d'ailleurs été identifiées parmi les passagers.

 « Toutes les hypothèses doivent être regardées », a précisé ce mercredi matin le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, mais un acte terroriste n'est pas à ce stade l'hypothèse privilégiée. Une possibilité que semble écarter aussi Jean-Claude Bück, ancien pilote de ligne et commandant de bord chez Air France, et ancien président de l’Académie de l’air et de l’espace, interrogé par RFI. « D’une part parce que l’accès au cockpit est sécurisé, explique-t-il. Il y a une porte plus ou moins blindée et il faut un code pour y rentrer. Après, sous la menace, on peut obliger une hôtesse à composer le code, mais ça suppose une préparation en amont et ça suppose une revendication en aval. Et d'autre part, car cet avion-là ne semble pas être une cible particulièrement intéressante. »

La nationalité des victimes se précise

Les victimes du crash sont originaires d'une quinzaine de pays, d’après les autorités françaises. Le chef de la diplomatie française Laurent Fabius a évoqué, lors d'une rencontre avec la presse, « les nationalités qui sont avérées ». Sur un bilan de 150 morts, l'Allemagne et l'Espagne ont annoncé 72 Allemands et au moins 51 Espagnols décédés. Mais « il y a des nationalités confirmées qui sont aussi l'Argentine, l'Australie, la Belgique, la Colombie, le Danemark, la Grande-Bretagne, Israël, le Japon, le Maroc, le Mexique et les Pays-Bas », a ajouté Laurent Fabius. « On n'a pas encore une liste absolument définitive mais c'est lié aux procédures des compagnies aériennes », a précisé le ministre des Affaires étrangères. « Normalement, c'est l'Etat de départ de la compagnie aérienne, là en l'occurrence c'était l'Espagne, qui doit donner ces renseignements mais il faut aussi faire des vérifications. »

Le Premier ministre français a aussi évoqué la présence parmi les victimes d’un Américain. « Il appartient à la compagnie Lufthansa et aux autorités espagnoles et allemandes de fournir, je l'espère le plus vite possible, l'ensemble de ces données », a confirmé Manuel Valls en sortant d'une visite à la cellule de crise mise en place au ministère de l'Intérieur.

(Rfi.fr)

 

Section: