Publié le 15 Nov 2013 - 12:03
DÉPART DE JACQUES DIOUF DU PALAIS

 Les dessous d’une démission

 

La démission de Jacques Diouf de son poste de conseiller spécial du président la République Macky Sall serait liée à un ''problème d'ego'', a-t-on confié à EnQuête.

 

On en sait un peu plus sur la démission de Jacques Diouf de son poste de conseiller spécial du  président de la République, comme l'a annoncé la presse mercredi. Selon des sources au Palais, le départ de l’ancien directeur général de l’Organisation des Nations-unies pour l’alimentation (FAO) serait plus liée à un ''problème d’ego'' qu’autre chose. M. Diouf serait ''déçu de n’avoir pas été choisi comme Premier ministre'' par le président Macky Sall après le départ de Abdoul Mbaye.

Annoncé dans le premier gouvernement, Jacques Diouf, souffle-t-on,  a toujours nourri l’espoir d’occuper un poste ''digne de son rang''. ''Puisqu’il voulait être candidat à la présidentielle, il se considère comme l’alter ego de Macky Sall. Il a pensé qu’il pouvait être Premier ministre'', disent nos sources. ''En réalité, il n’a jamais été dans l’esprit du président de faire de lui un Premier ministre. Depuis la formation du gouvernement, il est déçu ; quand il venait au Palais, il faisait le service minimum.''

Cependant, ce qui a précipité le départ de Jacques Diouf, c’est surtout la nomination du Dr Abdoulaye Seck au poste de ministre de l’Agriculture. Selon nos interlocuteurs, l’ancien patron de la FAO n’a pas digéré que ce poste soit confié à un autre alors qu'''il avait le meilleur profil''. Ce que nos sources relativisent : ''Il a vécu pendant  20 ans à l’étranger, donc il est déconnecté des réalités du terrain sénégalais.''

Quoi qu’il en soit, Jacques Diouf a adressé une correspondance au président de la République, dans laquelle il souhaite prendre ''43 jours de congés''. Actuellement en séjour au Maroc, il dit vouloir s’''occuper d’une fondation'' que son père avait créée.

Moubarack Lo, Marième Badiane, Zahra Iyane Thiam ‘’frustrés’’

Mais, à en croire nos confidences, Jacques Diouf ne serait pas le seul ''frustré'' dans l’entourage de Macky Sall. Elles soufflent que le statisticien-économiste Moubarack Lo ne se retrouverait pas dans ses habits de directeur de cabinet adjoint. A l’instar de Jacques Diouf, il a aussi demandé, la semaine dernière, ''deux mois de congés''. La raison ?  ''Il n’a pas digéré la nomination de Abdou Aziz Tall au poste de directeur de cabinet. Il voulait que le président de la République le confirme comme directeur de cabinet ; il estime qu’il maîtrise bien l'administration''. Moubarack Lo ignorerait peut-être que Macky Sal ‘’lui en veut’’ suite à l’incident qui l’avait opposé à un membre du groupe de réflexion dénommé ''Sénégal émergent'' logé au Palais''.

(Moubarack) a eu une prise de gueule avec Amadou Kane à qui il avait envoyé un mail très salé. Et le président était très remonté contre lui'', soutiennent nos interlocuteurs. Et ce n’est pas tout, ajoutent-ils, notant que le président n’aurait pas apprécié le ''comportement'' de son Dircap adjoint lors du dernier sommet de l'Union africaine à Addis-Abeba : ''Moubarack avait privé la parole à un responsable d’une ONG sénégalaise, cela avait frustré les chefs d’État africains. Dans ces genres de rencontres, les ONG peuvent s’exprimer au même titre que les États.''

Pour sa part, la ministre d’État Marième Badiane n’a pas demandé (pour l’instant) des jours sabbatiques, mais ne serait pas moins ''frustrée'', elle également. En plus de n’avoir pas été ''zappée'' du gouvernement - elle lorgnait le ministère de la Femme - la présidente du Mouvement des femmes de l'APR ''ne supporte plus la cohabitation'' avec  le directeur de cabinet politique du président dans le gouvernement. ''Elle pense que la nomination de Mahmout Saleh met celui-ci au dessus d’elle dans l’ordre protocolaire. Si vous observez bien la première photo officielle, Mahmout est un peu en retrait. Parce qu’avant la prise de la photo, les gens sont allés lui parler pour la convaincre de venir'', font observer nos sources.

Jointe par téléphone hier soir, Marième Badiane a déclaré n’avoir jamais eu l’intention de ''démissionner du gouvernement''. Quid de ses rapports avec Saleh ? Elle a préféré répondre par le mépris : ''Mahmout Saleh, je le conjugue par zéro. Ce n’est pas mon nawle (alter ego en wolof) dans les tous sens. Je m’adresse à des gens qui font avancer le parti et non à des manœuvriers.''

Par ailleurs, celle dont la démission ne devrait pas surprendre, c’est Zahra Iyane Thiam, conseillère technique du président de la République. La secrétaire générale de l’Union pour le développement du Sénégal-Innovation (UDS-I) penserait qu’elle n’a pas été ''récompensée à sa juste valeur''. ''Elle a voulu qu’on la nomme ministre parce qu’elle est leader de parti'', disent nos confidents.

Nos tentatives pour avoir la version de Moubarack Lo et de Zahra Iyane Thiam sont restées vaines. 

''Chantage''

''Puisqu’ils n’ont pas obtenu ce qu’ils veulent, ils exercent tous une forme de chantage. Mais le président n’est pas du genre à céder au chantage'', avertit cependant un proche du chef de l'État. Par contre, Macky Sall, souligne notre interlocuteur, a ''regretté'' la démission de Me Doudou Ndoye de la Commission de réforme foncière depuis quelques mois. Notre source parle d’’incompréhension’’ entre l’ancien ministre de la Justice et Macky Sall. ''La commission a été créée en mars, et à ce moment, le budget était déjà voté. Tout le monde connaît les lourdeurs administratives, et c’est au moment où les choses étaient en train d’être réglées que Doudou Ndoye a démissionné'', confie-t-on.

DAOUDA GBAYA

 

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