Publié le 24 Jun 2016 - 21:17
DENNONCANT UNE JUSTICE A DEUX VITESSES DANS CE PAYS

Y en a marre entonne ‘’Yoon a ngi Jeng’’

 

Y en a marre conteste le jugement prononcé contre les jeunes de Colobane accusés du meurtre du policier Fodé Ndiaye. Ces membres demandent la réouverture du dossier. Le mouvement entend en sus lancer une campagne dénommée ‘’Yoon a ngi Jeng’’, pour lutter contre cette ‘’justice à deux vitesses’’. L’annonce a été faite, hier, lors de la célébration de l’an 5 des manifestations du 23 juin.

 

‘’Quatre ans après la seconde alternance démocratique et cinq ans, après le 23 juin, on se rend compte que la justice est toujours du côté des forts. Toutes les célébrités ont accès à la liberté provisoire systématique, si ce n’est la grâce annoncée par le président de la République himself. Alors que les fils des paysans, des oubliés, ceux qui sont là et qui constituent le cœur de ce pays, sont emprisonnés et on ne parle pas d’eux’’, se désole le coordonnateur du mouvement Y en a marre Fadel Barro. Il a lancé ce cri du cœur, hier, lors de la conférence publique organisée à Dakar pour analyser la situation du pays, 5 ans après les manifestations du 23 juin.

Leur constat est que le Sénégal a une justice à deux vitesses, une justice inéquitable. Cette dernière serait même en train ‘’de se pencher du côté des forts au détriment des faibles’’, disent-ils. Pour y remédier, Fadel Barro et ses camarades ont décidé d’initier la campagne ‘’Yoon a ngi Jeng’’, lancée hier même. Dans un premier temps, une campagne de sensibilisation sera faite dans les quartiers et chez des familles religieuses, avant l’organisation de grands rassemblements. Y en a marre souhaite ainsi attirer l’attention des Sénégalais sur le fait que ‘’la justice est en train de rendre forts les plus forts et faibles les plus faibles’’. Son coordonnateur ne comprend pas qu’on puisse gracier des voleurs, des violeurs ou accorder la liberté provisoire à de présumés meurtriers, alors que de jeunes ‘’innocents’’ croupissent en prison.

La réouverture du dossier des jeunes de Colobane réclamée

A titre d’exemple, il cite les jeunes de Colobane condamnés à 20 ans de prison pour avoir tué le policier Fodé Ndiaye, lors d’une des manifestations contre une troisième candidature d’Abdoulaye Wade. C’était en 2011. ‘’Les jeunes de Colobane, qui sont détenus, ont été torturés par la police. Ils sont aujourd’hui emprisonnés sur la base de faux témoignages d’une personne qui n’a pas donné sa vraie identité à la barre. A cause d’elle, ces jeunes croupissent en prison pour 20 ans. C’est inadmissible’’, estime-t-il. C’est pour cela que Y en a marre et les familles de ces garçons demandent ‘’la réouverture de ce dossier’’. ‘’Il faut que justice soit rendue à Fodé Ndiaye. On ne demande pas de grâce. On ne demande pas de liberté. On ne demande pas de privilège pour le bas-peuple. On demande juste justice. Et cela commence par la réouverture de ce dossier, parce que ces jeunes ont été torturés’’, précise Fadel Barro.

Alioune Tine : ‘’La torture est un crime international’’

‘’La torture est un crime international. Ceux qui ont torturé doivent être jugés. Il ne peut pas y avoir d’impunité dans ce domaine’’, selon le directeur d’Amnesty international pour l’Afrique de l’Ouest et du centre, Alioune Tine qui prenait part à la rencontre. Lui d’ailleurs, pense comme Fadel Barro que la justice a des problèmes. Ce que confirment en outre les invités du jour du mouvement contestataire. Ils sont des parents de détenus ou tout simplement d’ex-prisonniers. Des membres de leurs familles ont été arbitrairement arrêtés ou attendent depuis longtemps d’être jugés. Ils étaient tous là à raconter leurs vécus. Tous également demandent une justice équitable.

‘’Moi, on m’a arrêtée en 2011. J’ai fait 4 ans 3 mois en prison. J’ai été jugée, il n’y a pas longtemps, et on m’a acquittée sans dédommagement. Mon mari est condamné à 10 ans de prison alors qu’il est innocent’’, a témoigné Aminata Diop. Ndèye Khady Diop pleure elle la longue détention préventive de son fils Oumar Guèye. Son seul vœu aujourd’hui est de voir son fils à la barre et fixé sur son sort. Malal Talla alias Fou Malade de renchérir : ‘’On ne dit pas que tous ceux qui sont dans les prisons sont innocents. Mais ils ont le droit d’être jugés.’’

En plus des longues détentions préventives, le problème des transferts a été évoqué par une hôte de Y en a marre dont le fils purge sa peine à la prison de Kaolack. Ce dernier n’y a aucun parent, mais y a été malgré tout redirigé après son jugement. Pis, dans cette histoire de transfert, ‘’ceux qui veulent être mis dans les prisons des régions se cotisent pour acheter l’essence de la voiture qui les y achemine’’, informe Fou Malade.

BIGUE BOB

 

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