Publié le 26 Apr 2016 - 20:36
DESTITUTION DE LA RESPONSABLE LIBERALE DU CONSEIL DEPARTEMENTAL DE BAMBEY

L’Etat laxiste, Aïda Mbodj cumularde

 

Bien qu’elles soient obsolètes, les dispositions de la loi n° 96-11 du 22 mars 1996 relative à la limitation du cumul des mandats électifs et de certaines fonctions épinglent Aïda Mbodj. La responsable libérale a en effet trop tardé à démissionner de son poste de conseillère municipale de Bambey. Pour autant, le régime de Macky Sall a péché sur la procédure ayant conduit à sa destitution si on se réfère aux dispositions de l’article L56 du Code général des Collectivités locales.

 

Après le référendum, l’affaire ‘‘Aïda Mbodj’’ ravive la tension entre  le pouvoir de Macky Sall et la principale force de l’opposition, le Parti démocratique sénégalais (Pds). Elle soulève désormais une polémique où chacun tente d’incriminer l’autre à travers des arguments juridiques. Du côté de l’Etat, l’on se défend de n’avoir appliqué que les textes en vigueur, notamment les dispositions de l’article n°96-11 du 22 mars 1996 relatives à la limitation du cumul  des mandats électifs et de certaines fonctions.

Au Pds, l’appréciation est tout autre. Selon son Coordonnateur et non moins Secrétaire général adjoint, Oumar Sarr, ‘’la destitution d’Aïda Mbodj de la tête du Conseil départemental de Bambey procède tout simplement, outre la violation des textes en vigueur, d’une volonté manifeste de museler les responsables du Pds qui résistent aux chantages multiformes et rejettent toute idée de transhumance’’.

Gourmandise d’Aïda Mbodj

Mais dans cette affaire, les dispositions de la loi sont claires et ne souffrent d’aucune ambiguïté. A son article premier, la loi n° 96-11 du 22 mars 1996 relative à la limitation du cumul  des mandats électifs et de certaines fonctions, stipule clairement que ‘’nul ne peut cumuler plus de deux mandats électifs’’. Or, Aïda Mbodj a en effet été trop ‘’gourmande’’ en cumulant trois mandats électifs. Elle a été à la fois députée, conseillère municipale de Bambey et conseillère départementale. Mais la loi tranche de façon plus nette le débat à son article 3 qui dit que ‘’tout citoyen investi d'un mandat électif ou nommé à une fonction le plaçant dans un des cas d'incompatibilité visés par les articles 1er et 2 de la présente loi, dispose d'un délai de trente jours à compter de la date de l'élection ou de la nomination pour démissionner du mandat ou de la fonction de son choix’’.

Par ailleurs, la loi précise qu’‘’à défaut d'option dans le délai imparti, le mandat acquis ou la fonction exercée à la date la plus récente prend fin de plein droit’’. Cette disposition de la loi appliquée dans toute sa rigueur aurait permis de destituer Aïda Mbodj de son poste de présidente du Conseil départemental de Bambey un mois après sa prise de fonction en 2014. Cela, d’autant plus que la responsable libérale qui cumule trois mandats électifs n’a démissionné de son poste de conseillère municipale que le 2 mars 2016 dernier, c’est-à-dire, deux ans après son élection pour quelqu’un qui avait un délai de rigueur d’un mois. Une négligence qui lui a coûté son dernier poste électif.

Laxisme de l’Etat 

Cependant, si la négligence d’Aïda Mbodj est avérée dans cette affaire, le laxisme de l’Etat du Sénégal l’est également. Pendant plus de deux ans, l’Etat qui est censé veiller au respect strict de la loi a laissé la responsable libérale exercer trois mandats électifs en violation flagrante des textes et règlements en vigueur. Pourquoi a-t-il tardé à réagir ? Est-ce parce que d’autres responsables de l’Alliance pour la République (Apr) ou encore des partis alliés sont dans la même situation qu’il n’a pas voulu réagir ? Pourquoi a-t-il attendu le lendemain du scrutin référendaire pour agir contre la responsable libérale qui a su conserver jalousement son fief ? Autant de questions qui taraudent mais qui, jusqu’ici, restent sans réponse. Quoi qu’il en soit, la tournure des choses laisse soupçonner des logiques de règlement de comptes politiques surtout que cette situation n’a attiré l’attention du régime qu’après le scrutin référendaire du 20 mars 2016. Aïda Mbodj qui, en réalité, a résisté à la vaste offensive de la mouvance présidentielle, semble gêner le pouvoir dans le Baol. Le régime de Macky Sall, dans sa conquête de cette partie du Sénégal, a été tenu en échec à Touba, à Mbacké, à Bambey commune et dans bien d’autres contrées du Baol.

Vice de procédure

Si, au nom du droit, l’Etat  a destitué Aïda Mbodj de la présidence du Conseil départemental de Bambey pour cumul de plus de deux mandats électifs conformément aux dispositions de la loi n° 96-11 du 22 mars 1996, il a par contre péché dans la procédure ayant abouti à cette décision. Selon les dispositions de l’article 56 du Code général des Collectivités locales, ‘’Le président du Conseil départemental nommé à une fonction incompatible avec son mandat est tenu de faire une déclaration d'option dans un délai de trente jours. Passé ce délai, il peut être invité par le ministre chargé des Collectivités locales à abandonner l'une de ses fonctions. En cas de refus ou quinze jours après cette mise en demeure, le président est déclaré démissionnaire par décret’’. Or, dans la procédure ayant conduit à la destitution d’Aïda Mbodj, c’est un simple arrêté préfectoral qui aurait notifié à la responsable libérale la destitution de ses fonctions de présidente du Conseil départemental de Bambey. Ce qui constitue une violation des textes et règlements en vigueur. 

ASSANE MBAYE

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