Publié le 27 Nov 2018 - 17:39
DETTE DE L’ETAT AUX EPES

Le double langage d’Amadou Ba

 

Devant la représentation nationale, le ministre des Finances a affirmé avoir dit clairement aux chefs d’établissements privés qu’il ne peut pas dépasser les 8 milliards inscrits dans le budget. Mais si l’on se fie à ces derniers, la version d’Amadou Ba a été toute autre, lors de la réunion tripartite.

 

Alors que le ministre des Finances est accusé, à tort ou à raison, de s’être dédit sur la tension budgétaire que connait le pays, voilà qu’une autre partie de sa déclaration, dimanche dernier, à l’Assemblée nationale, suscite interrogation. Interpellé sur la dette intérieure, notamment celle que l’Etat doit aux écoles privées, aux repreneurs des universités publiques et aux entreprises de Btp, Amadou Ba a déclaré que le non-paiement de cette créance n’est en rien lié à une tension budgétaire. ‘’Il s’agit plutôt de dépenses pour lesquelles le gouvernement n’a pas encore d’autorisation de l’Assemblée nationale. La loi ne nous le permet pas. Si on le fait, on va empiéter sur la souveraineté de la représentation nationale’’, précise-t-il.

En d’autres termes, les autorités ne comptent pas s’appuyer sur des décrets d’avance pour régler la situation. Ce qui veut dire que même si les caisses étaient pleines, les débiteurs ne seraient pas payés en 2018. Ils sont contraints d’attendre 2019 pour rentrer dans leurs fonds. Amadou Ba explique cette position par le fait que, dit-il, quand bien même l’Etat aurait décidé de payer, il serait obligé de faire des coupes ailleurs pour éviter tout dépassement budgétaire. Le ministre dit avoir déjà tenu un langage de vérité aux directeurs des Epes sur le fait que cette année, il est prévu 8 milliards et que s’ils dépassent le montant, il serait dans l’impossibilité de payer le surplus.

4 milliards dans une Lfr en juin

Pourtant, si l’on en croit le porte-parole du cadre unitaire des associations d’établissements privés d’enseignement supérieur, Amadou Ba a tenu un double langage. Daour Diop, qui n’a pas souhaité commenter la sortie du ministre, précise tout de même que les engagements du Mefp étaient tout autres, lors de la rencontre tripartite tenue jeudi dernier entre les chefs d’établissements, le ministère de l’Enseignement supérieur et celui des Finances.

‘’Il n’a pas dit ça au cours de la réunion’’, rectifie-t-il. Selon M. Diop, l’argentier de l’Etat a proposé d’abord à ce que les 3 milliards de francs Cfa du mois de novembre soient payés sous forme de mandat. Ensuite, pour les 8 milliards prévus dans le budget 2019, il s’est engagé à les mobiliser au premier semestre de l’année, avec une partie disponible dès le mois de janvier. ‘’Il a également déclaré qu’au mois de juin 2019, il y aura une loi de finances rectificative dans laquelle il sera prévu 4 milliards pour le règlement de la dette. Il a même demandé au ministre de l’Enseignement supérieur de voir les ajustements qu’il peut faire dans son budget pour l’apurement de la créance’’, révèle Daour Diop.

Ainsi, ce dernier réfute catégoriquement l’affirmation selon laquelle le ministre leur a dit qu’il ne peut pas dépasser les 8 milliards inscrits dans le budget. ‘’Il ne peut pas le dire, d’autant plus qu’il s’est engagé pour 4 milliards dans la loi de finances rectificative. Sinon, d’où sortent ces 4 milliards ? Nous ne les avons pas inventés quand même !’’, s’exclame-t-il. Cet interlocuteur précise que pour éviter tout équivoque, lorsque le ministre des Finances leur a demandé à quand le retour des étudiants en classe, ils lui ont fait savoir qu’ils attendent le procès-verbal de la réunion pour réunir le cadre et apprécier. Et lorsqu’Amadou Ba déclare qu’il ne va pas honorer une dette hors des autorisations budgétaires, Daour Diop rétorque : ‘’Nous savons comment fonctionne l’Etat. Il y a des choses qui peuvent ne pas être prévues dans le budget et qui sont réglées par la suite.’’

BABACAR WILLANE

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