Publié le 30 May 2016 - 22:15
DIALOGUE NATIONAL DU 28 MAI

Macky Sall réussit son pari

 

Le dialogue national convié par le président de la République est ouvert. Samedi, pendant plus de 8 tours d’horloge, l’ensemble des forces vives de la nation ont amorcé le dialogue avec le président de la République qui, d’ores et déjà, a réussi son pari. 

 

C’est depuis une tente érigée pour la circonstance, sur le parvis de la salle des banquets du palais présidentiel, à travers un poste téléviseur, que la presse a suivi le dialogue national convoqué par le président de la République. Les lieux, grouillant de monde, ne pouvaient contenir toutes ces personnalités convoquées à cet effet.

16h, le président de la République, entouré de ses gardes, déboule accompagné d’une horde de personnalités religieuses et politiques. Il s’engouffre aussitôt dans la salle où l’attend une société sénégalaise en miniature composée de presque tous les segments de la nation. Hommes politiques, chefs religieux et coutumiers, acteurs de la société civile, syndicalistes, patronat, ont tous répondu à l’appel du chef de l’Etat pour un dialogue national inclusif.

À peine Macky Sall a-t-il franchi le seuil de la salle des banquets, que l’hymne national retentit avec toute la solennité qui sied. Le chef de l’Etat, tout de blanc vêtu comme pour véhiculer un message de paix, trône sur le présidium avec à ses côtés la présidente du Conseil économique, social et environnemental (Cese), Aminata Tall, du président de l’Assemblée nationale, Moustapha Niasse, du ministre de l’Intérieur, Abdoulaye Daouda Diallo et de son ministre-directeur de cabinet, El Hadji Oumar Youm.

L’hymne national épuisé, le président de la République fixe les règles du jeu dans son discours d’ouverture. ‘’L'impact de la dernière réforme sur l’arsenal juridique de notre pays est considérable : une dizaine de titres et une vingtaine d’articles de la Constitution ont été amendés. Il s’y ajoute le nombre important de textes législatifs qui doivent être pris. (…) C’est pourquoi la mise en œuvre de la réforme constitutionnelle constitue, à mes yeux, une opportunité historique offerte aux forces politiques et sociales de notre pays de communier pour s’entendre sur la matérialisation de la volonté exprimée par le peuple sénégalais’’, souligne le président de la République. En dehors de ces textes relatifs aux institutions créées par la Constitution, il a décidé de soumettre à la concertation tous les autres textes qui doivent être modifiés ou adoptés à la lumière de la réforme constitutionnelle.

A cet effet, Macky Sall indique que cinq points, au moins, nécessitent des convergences voire le consensus le plus large pour les traduire en règles partagées et acceptées par tous. A ce propos, il rappelle à l’auditoire qu’il est nécessaire de procéder à la modification de la loi de 1981 sur les partis politiques ou adopter une nouvelle loi pour consacrer le projet de modernisation du système sénégalais de partis politiques.

Dans cette volonté de réformer les institutions, il est également utile, selon lui, de modifier le Code électoral pour tirer les conséquences de la participation des candidats indépendants à tous les types d’élection. Mais aussi pour définir les modalités de l’élection des députés de l’extérieur. Mis à part ces réformes, il faut avoir une législation sur le statut de l’opposition et de son Chef, ainsi que le financement public des partis ou coalitions de partis politiques qui sont des préoccupations récurrentes de la démocratie sénégalaise. A cet effet, ‘’l’Assemblée nationale doit adopter un nouveau Règlement intérieur qui sera désormais une loi organique et qui intègrera les innovations résultant de la réforme constitutionnelle’’. ‘’Je recommande fortement des échanges entre majorité et minorité parlementaires pour aboutir à un Règlement intérieur consensuel’’, déclare le Président Sall. Selon qui, ‘’il importe, aussi, de revoir la loi portant Code général des collectivités locales et les textes relatifs à la déconcentration’’. Ce Code, selon lui, deviendra désormais un Code général des collectivités territoriales incluant les principes de la phase II de l’Acte III de la décentralisation qui consacre un nouveau système de financement des collectivités territoriales et l’avènement des pôles territoires’’.

A cette liste de textes portant sur la gouvernance politique et administrative, Macky Sall ajoute d’autres relatifs à la gouvernance économique et aux droits économiques et sociaux des populations sur lesquels la concertation est tout aussi importante. Pour lui, ‘’le renforcement des droits des citoyens par la réforme constitutionnelle - droits à un environnement sain, sur leur patrimoine foncier, sur les ressources naturelles - doit trouver sa traduction dans les lois de notre pays’’. Car, ‘’une telle innovation, dans notre dispositif constitutionnel est d'autant plus impérative que notre pays est désormais crédité de conséquentes ressources minières, pétrolières et gazières’’.

Le président de la République prévoit aussi des concertations sectorielles qui seront conduites par le Premier ministre. Ainsi, Macky Sall a instruit le gouvernement d’organiser, sous la supervision de Mahammed Boun Abdallah Dionne, et la conduite du ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique, la concertation avec les partis politiques et la société civile en vue de définir, de manière consensuelle, le contenu des lois relatives aux questions électorales. ‘’Je veux que le dialogue et la concertation se poursuivent, selon des formats inclusifs appropriés, avec les acteurs indiqués, toujours sous la supervision du Premier ministre et la conduite des ministres concernés sur des thématiques nationales prioritaires, en l’occurrence l’adoption future du Code général des collectivités territoriales et des textes relatifs à la déconcentration qui va inaugurer l’entrée en vigueur de la phase II de l’Acte III de la décentralisation ; la nouvelle législation foncière qui sera retenue après analyse des travaux de la CNRF et les réformes des codes de l’environnement, minier et pétrolier dans le but de garantir l’exploitation de nos ressources naturelles dans la transparence et l’intérêt des populations’’.

La crise scolaire au cœur du dialogue

Ce dialogue national initié par le président de la République ne concerne pas seulement les questions relatives au processus électoral ou encore à la mise en œuvre des réformes constitutionnelles issues du référendum du 20 mars. La crise scolaire est également au cœur de ces concertations. Et selon le président de la République, l’éducation est un sujet du temps présent, mais également et surtout une question d’avenir. ‘’Comme la plupart d’entre nous ici présents, je suis un produit de l’école publique sénégalaise, symbole de l’égalité des chances. Cette école et ses enseignants, qui nous ont tout donné, qui ont tant fait pour notre épanouissement, souffrent d’un malaise certain. Elle peine à trouver des solutions durables de sortie de crise, malgré les dépenses publiques élevées qui lui sont consacrées’’, diagnostique-t-il. Avant de poursuivre : ‘’Je veux replacer l’école au cœur de la République, comme lieu de transmission du savoir et comme espace de construction de la citoyenneté pour permettre à nos enfants d’accéder à toutes les dimensions de la vie. C’est pourquoi je souhaite asseoir, à travers nos concertations, un consensus national durable sur l’école sénégalaise et conclure avec tous ses acteurs un pacte de stabilité’’.

Chefs religieux et coutumiers tancent politiques et syndicalistes

Tous les foyers religieux du pays, y compris l’église, ont pris part à la rencontre. Leurs représentants ont été unanimes à appeler les différentes chapelles politiques à une mutualisation des efforts dans la construction du pays. ‘’Le pays est en construction. Il nécessite l’apport de toutes les forces vives de la nation, si nous voulons avancer’’, a déclaré le représentant du Khalife général des Layènes, Mamadou Lamine Laye. ‘’Nous avons besoin de moins de paroles et plus d’actes pour venir en aide aux populations sénégalaises, surtout les franges les plus démunies’’, renchérit le représentant du Khalife général des Mourides, El Hadji Bara Matilèye. Le fils de Serigne Cheikh Sidy Makhtar Mbacké en a profité pour demander au président de la République, Macky Sall et ses ex-compagnons du Parti démocratique sénégalais (Pds) d’enterrer la hache de guerre. ‘’Vous êtes issus d’une même famille politique. Vous devez pouvoir travailler ensemble pour l’intérêt supérieur des populations sénégalaises’’, leur a-t-il lancé.

Le Grand Serigne de Dakar, Pape Ibrahima Diagne, a lui déploré l’attitude des partis politiques et des syndicats d’enseignants. Aux partis politiques, il reproche d’avoir pris en otage le peuple sénégalais, à travers des querelles inutiles et des débats de bas étage qui ne participent en rien à faire avancer le pays. ‘’Les partis politiques ont pris le pays en otage. Il va falloir que vous changiez d’attitude et que vous vous intéressiez plus à l’intérêt de la Nation’’, soutient-il. Aux syndicats d’enseignants, le Grand Serigne de Dakar reproche d’avoir hypothéqué l’avenir de nos enfants, à travers des grèves cycliques qui ont fini par mettre à genoux l’école sénégalaise.

Les représentants des Khalifes généraux de Médina Gounass et de la famille omarienne ont surtout insisté sur la nécessité de prévenir le terrorisme, à travers un renforcement du dispositif sécuritaire dans nos frontières. A ce propos d’ailleurs, le président de la République leur a annoncé le déploiement, dans de brefs délais, du Programme d’urgence des axes frontaliers pour prévenir de ce fléau que représente le terrorisme.

ASSANE MBAYE

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