Publié le 31 May 2019 - 18:34
DIALOGUE NATIONAL

Ousmane Sonko crache sur le plat et réfléchit sur son avenir dans le FPDR

 

Ceux qui espéraient qu’Ousmane Sonko allait changer, après l’élection présidentielle, n’ont qu’à déchanter. En conférence de presse, avant-hier, il a craché du feu sur le pouvoir, l’opposition et même Famara Ibrahima Sagna choisi pour conduire le dialogue national.

 

Ousmane Sonko reprend du service. Comme à son habitude, dans le discours, il ne varie même pas d’un iota. Il attaque, il cogne et tire sur tout ce qui bouge. Cette fois, avant-hier, même ses camarades de l’opposition en ont eu pour leur grade. Il fulmine : ‘’Nous déplorons la duplicité et l’incohérence d’une certaine opposition. Vous ne pouvez pas aboyer, il y a quelque temps, pour dire que vous ne reconnaissez pas Macky Sall et être les premiers à se bousculer au portillon du Palais, heureux de serrer la main du Président’’. La question qui se pose est alors de savoir si le leader de Pastef va continuer de rester dans le Front ? Interpellé par EnQuête sur la question, il informe : ‘’Nous allons vous annoncer notre décision, très bientôt’’. A l’en croire, tous ceux qui ont répondu au dialogue national sont ‘’en collision avec Macky Sall’’ et ont fait ‘’un reniement ou à une forme de ralliement’’.

En outre, dans la conception de l’espace politique de Ousmane Sonko, il n’existe pas de non alignés. ‘’Après les élections, dit-il, il n’y a que deux camps possibles. J’ai bien dit deux camps politiques : celui qui gouverne et celui qui s’oppose. Il ne peut pas y avoir de camp hybride. Il faut que ça soit clair. Ces deux camps doivent se respecter certes. Mais chacun doit rester dans son rôle’’.

En fait pour Sonko, s’il doit y avoir dialogue entre politiques, c’est uniquement pour ce qui concerne les questions politiques et institutionnelles. En ce qui concerne les questions sociales et économiques, le Président n’a qu’à s’adresser aux syndicats et autres acteurs économiques. Fort de cette conviction, il assène : ‘’Nous ne participerons pas à cette mise en scène rocambolesque’’. Et propose : ‘’A la place, nous proposons un dialogue avec le peuple. Le véritable dialogue doit se faire avec ce peuple, qui souffre de l’incompétence du pouvoir, du manque de patriotisme, d’intégrité et de probité de l’élite politique’’.

Le candidat malheureux à la dernière présidentielle s’interroge également sur la sincérité de l’appel du chef de l’Etat. Ce dernier, pour lui, a un seul objectif : réduire l’opposition à sa plus simple expression. ‘’Il a déjà essayé de le faire par la violence, des arrestations… Comme ça n’a pas marché, il veut maintenant changer de stratégie. Ça ne passera pas. Il peut peut-être capter une partie de l’opposition, mais il nous aura en face de lui. Macky Sall aura une opposition et une opposition ferme et radicale’’.

Ainsi, le député ne fonde pas beaucoup d’espoir sur le dialogue. Comme pour justifier son propos, il rappelle l’unilatéralisme dont le chef de l’Etat a toujours fait montre, à l’occasion du vote de la loi sur le parrainage, les 15 points de la réforme constitutionnelle qu’il a imposés, en 2016, ainsi que la suppression du poste de Premier ministre ‘’qu’il n’a même pas daigné présenter au peuple’’. Sonko de rappeler également les multiples concertations sur le foncier, les institutions, la justice… Tout comme la demande de l’opposition en ce qui concerne la nomination d’une personnalité neutre pour l’organisation des élections.

‘’Tout le monde se souvient de son refus catégorique, en disant : ‘’doumako deff, doumako deff, doumako deff (nous ne le ferons pas)’’. Nous aussi dougnouko deff, trois fois. Ce n’est pas la peine d’envoyer tous les émissaires du monde. Nous ne sommes pas intéressés par son dialogue. Car la parole de Macky Sall ne vaut pas un kopeck’’. Le dialogue, fulmine-t-il, n’est qu’en réalité qu’un cirque national.

DIALOGUE NATIONAL

Les non-dits du dialogue

100 milliards de déficit budgétaires, un Etat insolvable qui peine à payer ses engagements internationaux, report des élections locales et législatives… Telles sont les véritables raisons qui poussent Macky Sall à appeler au dialogue, selon Patriote en chef.

Et si le dialogue n’était qu’un leurre. En tout cas, c’est là une forte conviction d’Ousmane Sonko qui pense à une manœuvre destinée à masquer ‘’la situation catastrophique que traverse le pays’’ qui ne serait pas loin d’une banqueroute. Il déclare : ‘’Macky Sall veut cacher la réalité des finances publiques, avec un gap budgétaire de plus de 100 milliards FCfa. Et qui, s’il n’est résorbé, pourrait se hisser à 345 milliards FCfa, d’ici la fin de l’année. La situation du pays est dramatique. Je ne veux pas alarmer, outre mesure, mais que les Sénégalais apprennent à souffrir, ces 5 prochaines années. Les choix à la base ont été mauvais et Macky Sall a atteint ses limites’’.

Voilà à, en croire le député, pourquoi le gouvernement veut se réfugier derrière ‘’un semblant de dialogue’’ pour sortir la tête de l’eau. Pire, Ousmane Sonko souligne que l’Etat n’a même pas de quoi organiser des élections locales et il cherche à les reporter. Le Patriote en chef ne s’en limite pas. Il revient également sur les nombreux projets gigantesques et inutiles de l’Etat qui n’ont permis qu’à grever le budget national et qui sont maintenant à l’arrêt.

Dans ses diatribes, Sonko n’épargne personne. Sans le nommer, il décoche des flèches à l’endroit de Famara Ibrahima Sagna, entre autres. ‘’On nous dit personnalité neutre, personnalité respectable… Je n’ai rien contre eux, même si je ne suis pas d’accord qu’ils sont si neutres qu’on veuille nous le faire croire. Mais où étaient-ils pendant ces 7 ans, quand Macky Sall violait la Constitution, emprisonnait des opposants et faisait ce qu’il voulait. Qui les a même vus faire une tribune pour dénoncer l’injustice. Ils n’ont jamais ouvert la bouche. Moi, j’ai plus de respect pour des gens comme Mody Niang qui n’ont jamais démissionné de leur rôle et, pourtant, ils ne sont dans aucun parti’’.

Mieux, Ousmane Sonko se dit convaincu que ces gens sont là, parce que c’est à la demande du président de la République. ‘’Si c’est l’opposition qui avait pris l’initiative de ce dialogue, ces gens n’allaient pas répondre favorablement. Ils sont là, parce que le pouvoir les a appelés. C’est du ‘tapalé’ (tape-à-l’œil)’’.

Toutefois, le responsable politique ne compte pas leur laisser l’espace public. Il annonce une série de rencontres et de manifestations pour que sa formation et sa coalition ne soient pas en reste dans le débat public. C’est en ce sens qu’il faut peut-être comprendre l’organisation prochaine d’un grand congrès de son parti Pastef, mais aussi des questions écrites et conférences de presse.

MOR AMAR

 

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