Publié le 13 Sep 2019 - 09:51
DJIBRIL WADE (PREMIER VICE-PRESIDENT DE LA LIGUE PRO)

‘’Nous sommes encore dans les délais, pour le démarrage du championnat’’ 

 

Le premier vice-président de la Ligue sénégalaise de football professionnel, Djibril Wade, reconnait l’existence de difficultés financières dans le foot local, causées par un manque de sponsor. Le président de Niary Tally-Grand Dakar-Biscuiterie (Ngb), satisfait de l’appui financier de la Fédération sénégalaise de football (Fsf) à leur structure, se prononce sur les dix ans de son équipe, l’avenir de Pape Bouna Thiaw sur le banc des Galactiques, la période de disette de Ngb (2017-2019)…

 

Le Comité exécutif de la Fsf a pris l’initiative d’appuyer la ligue,  à hauteur de 150 millions de francs Cfa, pour l’apurement de ses dettes. Quelle analyse faites-vous de cette décision ?   

J’en fais une lecture extrêmement positive, dans la mesure où la Ligue professionnelle de football était en train de traverser des difficultés, depuis deux ans, à cause de la perte de son sponsor officiel Orange. Elle  s’est ensuite débrouillée pour signer un autre contrat avec une télévision chinoise, Star-times, pour financer son programme et aider les clubs. Malheureusement, on a eu des problèmes après quelques matches disputés.  

La Ligue pro ne pouvait plus continuer  à dérouler ses programmes pour défaut de  financement.  Nous avons eu des arriérés que nous devons à des clubs ayant gagné des titres de champion : Génération Foot, Jaraaf et Stade de Mbour pour la Coupe de la Ligue. Ces arriérés ont avoisinent  10 000 000 F Cfa. La fédération a accepté de prendre en charge cette dette.  Elle a également pris l’initiative d’éponger les honoraires des arbitres.  Les fédéraux se sont aussi engagés à financer les saisons  2019-2020  et  2020-2021. Mais cet accompagnement va être séquencé, parce que si la ligue trouve, entre-temps, des moyens financiers, la fédération va arrêter son appui.  Il faut magnifier ce geste de l’instance du football sénégalais. Elle a résolu nos difficultés à 90 %.

Donc la Ligue pro doit être satisfaite, même s’il lui reste encore des défis à relever. Les problèmes financiers dépassent la Ligue pro et touche les clubs. Les équipes se sont beaucoup investies pour amener le  football là où il est aujourd’hui, grâce à l’implication des centres de formation comme  Diambars, Génération Foot, Dakar Sacré-Cœur et les clubs populaires : Niary Tally, As Pikine, Mbour Pc, Teungueth Fc… La fédération appuyait de manière  épisodique la ligue, mais la situation était grave à tel enseigne qu’il fallait la poser publiquement.  Nous l’avons  fait et les fédéraux ont pris la bonne décision.

Est-ce que les amateurs peuvent s’attendre à un début imminent du championnat de football sénégalais ?        

 Oui, on doit s’attendre à un début imminent. La Ligue pro va réunir d’abord son Conseil d’administration en fin septembre, pour se pencher sur la situation et laisser ensuite aux  clubs le soin d’apprécier la situation.  Il appartient aux équipes de dire si le moment est opportun ou pas parce qu’on peut démarrer et rencontrer des difficultés après. Mais on va discuter et essayer de trouver des solutions. Il faut repenser les relations entre la ligue et la fédération. La Fsf ne doit pas simplement se limiter à financer la ligue. Elle doit essayer de lui trouver des moyens financiers, des sponsors et  des solutions pérennes. C’est à nous de travailler pour que la fédération n’injecte plus de l’argent pour la ligue. Et pour ça nous allons tenir un conseil d’administration pour apprécier.

De toute façon, il n’y a pas encore péril en la demeure, parce que les championnats ont commencé depuis cinq ans au mois de novembre. Donc, nous sommes encore dans les délais. On va on convoquer notre conseil d’administration et faire tout pour commencer probablement le championnat au début du mois de novembre.   

Qu’est-ce qui bloque le contrat de sponsoring entre la Ligue pro et Star-times avant même la fin de la première saison ? 

Star-times a rencontré des difficultés,  car il lui est reproché de concurrencer une autre chaine sénégalaise dans la télévision numérique terrestre (Tnt). Et son concurrent dit qu’il est en porte-à-faux avec les lois sénégalaises. Mais aujourd’hui on a remarqué que ce n’est plus le cas.  Certes, Star-times avait au début deux décodeurs, un Tnt et un Dth, mais il a régularisé sa situation après. La ligue a écrit une lettre à l’Agence de régulation des télécommunications et des postes (Artp) mais celle-ci n’a pas encore répondu. C’est pourquoi nous attendons l’arbitrage du président de la République pour que la chaine Start times puisse dérouler ses programmes convenablement.  La justice doit vider très rapidement ce  contentieux. Cela permettra à la ligue de se déterminer dans sa recherche de sponsors.  

Qu’est-ce que la ligue doit faire pour éviter les difficultés financières dans les prochaines années ?

Nous devons faire recours au financement. Le football professionnel doit être financé. Les mécanismes de financement sont là, mais nous on ne les exploite pas. Il s’agit principalement de la billetterie et du  sponsoring.  A côté de ces deux, il y a le transfert des joueurs qui est une source de financement exceptionnelle. Mais au Sénégal le transfert de joueurs est devenu une source principale, alors que c’est quasiment impossible. On ne peut pas financer un club sur la vente d’un ou deux joueurs par année.

Aujourd’hui, les ressources de notre football doivent provenir du Sénégal. Nous devons compter sur notre propre force, c’est-à-dire la billetterie, le sponsoring et les droits de télévision. On ne peut faire un football professionnel sans en avoir ces trois éléments. Maintenant, pour avoir la billetterie, il  faut que les clubs fassent l’effort de disposer des infrastructures, poser un bon jeu et populariser le football. Cette popularisation passe d’abord par une transmission des matches par une chaine de télévision pour que les amateurs et les supporters puissent venir massivement. Donc, c’est au club de trouver la solution. Nous pouvons compter sur le soutien et la solidarité de l’Etat, de la fédération et du ministère des Sports. Mais il faut que les dirigeants continuent à investir et que les autres acteurs  jouent leurs partitions.  

Votre club, Niary Tally, a fait dix ans en Ligue 1. Quel bilan tirez-vous de ce séjour dans l’élite du football sénégalais ?

Je dis que c’est un bilan positif, dans la mesure où Niary Tally est issu du championnat populaire, c’est-à-dire le mouvement ‘’Navétanes’’. Nous sommes en Ligue 1 depuis 2010. Il s’y ajoute que Niary Tally,  Casa Sport et Jaraaf sont les seuls clubs qui n’ont pas connu la 2e division sous l’ère du football professionnel. Mais notre objectif ce n’est pas uniquement de rester en Ligue 1. Nous voulons bâtir un grand club de football. Et ceci nécessite la construction de grandes infrastructures sportives dans le futur. Aujourd’hui, on a commencé à mettre en place les bases de notre complexe sportif. J’avais dit, lors de ma réélection en 2017, que mon objectif est de trouver un terrain pour Niary Tally. Dieu merci ! C’est fait depuis mars 2019. Le président de la République a affecté le terrain situé derrière la Société immobiliers du Cap-Vert au club de Niary Tally. Il nous reste maintenant à régulariser les papiers administratifs et entamer les constructions. C’est un acquis important. Le club va poser  sous peu les jalons et travailler pour faire d’autres résultats. Je peux dire qu’on a déjà de bons résultats. Le club n’a pas certes gagné le championnat, mais il a terminé deuxième à deux reprises. La première fois, c’était en 2010 contre le Jaraaf. Nous avons gagné la manche aller (1-0) et perdu (1-3) au retour. Pour la deuxième on a disputé le titre à couteaux tirés avec la Douanes jusqu’à la dernière journée, en 2015. Nous avons finalement perdu à la différence de buts marqués.

La satisfaction, c’est que nous avons quand même remporté la Coupe du Sénégal contre le Casa en 2016 et la Coupe de la Ligue devant l’As Pikine en 2012.

Donc, sur le plan sportif, Niary Tally a fait beaucoup de progrès pendant ses dix années de présence dans l’élite du football sénégalais.

Mais Ngb a frôlé la relégation, ces deux dernières saisons. Qu’est-ce qui explique cette mauvaise passe ? 

L’équipe se bat depuis 2017 pour survivre. C’est extrêmement difficile pour les joueurs, le staff technique, les dirigeants et les supporters. L’explication, c’est qu’on n’a pas un retour sur investissement, après 10 ans d’existence dans la Ligue professionnelle. Le club a besoin d’être soutenu financièrement pour pouvoir rebondir.   Les causes de ces contre-performances sont nombreuses. Il y a d’abord la fermeture du stade Demba Diop. Nous sommes aussi confrontés à un problème d’instabilité sur le banc de touche. Demba Mbaye, notre coach en 2016-2017, a démissionné en peine saison à cause de notre élimination au premier tour préliminaire de la Coupe Caf. Son départ a créé une instabilité, parce qu’il est parti avec quelques membres de notre staff technique. Après lui, d’autres techniciens sont venus et partis. Cela ne nous a pas découragés. Nous sommes en train recoller les morceaux avec l’arrivée de Pape Thiaw. Il est venu au cours de la saison 2018-2019 et l’avons reconduit pour l’année 2019-2020.  

Pensez-vous que Pape Bouna Thiaw peut faire rebondir le club de Niary Tally ?

Il est capable de réussir avec nous. C’est ce qui explique d’ailleurs le choix qu’on a porté sur sa personne. Pape Thiaw est un jeune du quartier de Niary Tally qui veut aider ses jeunes frères à surmonter les difficultés. Aujourd’hui, nous voyons tous des anciens joueurs comme Deschamps, Zidane ou Aliou Cissé réussir en tant qu’entraîneur. Donc, pourquoi pas Pape Thiaw ? Il a la légitimité parce qu’il est diplôme de l’Uefa au même titre que Deschamps et Aliou Cissé. Il est aussi ancien international sénégalais. Je crois donc qu’il a les capacités pour réussir dans son terroir, mais il faut que nous soyons patients et qu’on se mobilise derrière lui pour pouvoir surmonter les difficultés qu’on rencontre depuis trois ans. 

Quel est l’objectif de Niary Tally, cette saison ?

Nous voulons faire mieux que les années passées. C’est-à-dire figurer parmi les cinq premiers du championnat. L’équipe a l’ambition de reconquérir la Coupe du Sénégal qu’elle n’a plus gagnée depuis 2016. Niary Tally veut aussi insister dans la formation, pour réaliser ses ambitions dans le long terme. La méthode classique consistant à renouveler son effectif chaque année est révolue. Il faut travailler dans la formation, pour bâtir une équipe compétitive dans l’avenir. 

Génération Foot reçoit Zamālek d’Egypte ce samedi, pour le compter de la phase aller du dernier tour qualificatif à la phase de poules de la Ligue africaine des champions. Croyez-vous à une qualification du champion sénégalais en titre ?  

J’aime le modèle de Génération Foot. Je suis en train de voir ce qu’ils sont en train de faire et j’ai envie de les copier. Je pense que Génération Foot peut tirer son épingle du jeu dans cette double confrontation avec Zamālek. C’est vrai qu’ils sont tombés sur une grande formation, mais les Egyptiens sont des Africains comme eux. L’académie de Mady Touré a déjà disputé trois Coupes Caf et une Ligue des champions. Donc, elle a acquis une certaine expérience pouvant lui permettre de s’en sortir. Le seul problème est que le championnat sénégalais n’a pas encore démarré.  Mais leur staff technique mise sur les matches amicaux pour combler ce déficit de compétitions.  C’est un match ouvert où on peut jouer des coups. Et je crois que Génération Foot peut réaliser le hold-up. Le coach Djiby Fall sur le banc de touche et l’expertise d’Abdoulaye Sarr peuvent les aider à décrocher une qualification en phase de poules de la Ligue africaine des champions.

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