Publié le 3 Apr 2013 - 14:32
TRAQUE DES BIENS MAL ACQUIS

Karim Wade "liquidé" par Tamaro Seydi et Mansour Gaye

 

Mis en demeure par la Cour de répression de l'enrichissement illicite et invité à justifier un patrimoine total d'un peu plus d'un milliard d'euros (soit 694 milliards de F Cfa), Karim Wade est accusé de détenir en sous-main une quinzaine de sociétés dont la société DP World Dakar. Autour de cette question se joue aujourd'hui une intense bataille d'informations.

 

 

''Toutes les sociétés offshores intervenant dans les secteurs portuaire et aéroportuaire sont liées par des témoignages et des documents à Karim Wade, Ibrahim Abou Khalil dit Bibo Bourgi et Pape Mamadou Pouye''. Autant dire que l'étau se resserre autour de l'ancien ministre de l'Énergie, de la Coopération internationale et tutti quanti, et ses acolytes empêtrés dans la traque des biens mal acquis. Car, on commence à y voir plus clair, notamment dans la nébuleuse de la gestion du terminal à containers du Port autonome de Dakar. Selon des sources proches de l'enquête, le lien entre Karim Wade et DP World Dakar Sa, qui assure cette gestion, est assis par des éléments tangibles.

 

Ces ''éléments objectifs'' recoupés par les enquêteurs sont corroborés par certains témoignages, notamment ceux de la notaire Maître Tamaro Seydi et de l’expert comptable Mansour Gaye. Me Seydi a déclaré sous serment que c’est Karim Wade qui l’a personnellement aidée à maintenir la société DP World Dakar Sa comme client, lorsque l'entreprise voulait changer de notaire. L’expert comptable, lui, souhaitait en devenir le commissaire aux comptes et s'en est ouvert à Karim Wade qui lui a répondu qu'il ne pouvait pas obtenir le poste à cause du ''défaut de signature internationale de son cabinet''.

 

Le rôle de Bara Sady

 

Si le lien a été fait avec Karim Wade, c'est parce que le choix d’un notaire et celui d’un commissaire aux comptes échoient exclusivement à un dirigeant ou à un actionnaire. Mais, il y a surtout l'écheveau qui a conduit au choix de DP World Dakar Sa et dont le maître d’œuvre a été Bara Sady, l'ancien DG du Port Autonome de Dakar.

 

Selon nos sources, c'est le groupe DP World Dubaï FZE, retenu aux termes de la convention de concession et du cahier des charges, qui devait créer DP World Dakar, la société de droit local sous forme de filiale devant exploiter le terminal à containers. Après que Bara Sady eut désigné, lui-même, les membres du comité restreint ayant choisi le groupe DP World Dubaï FZE , ''ces cadres qui lui étaient tous acquis, dit-on, ont reçu 25 millions de francs Cfa par personne après leurs travaux''.

 

Par la suite, alors qu'on s'attendait à ce que le groupe DP World Dubaï FZE crée, comme convenu, une société de droit local sous forme de filiale pour exploiter le terminal à containers, ''c’est une société des îles vierges britanniques dénommée DP World Sénégal Limited qui est devenue actionnaire de DP World Dakar Sa, la société d’exploitation, à hauteur de 86%'', explique-t-on.

 

Tandis que les 10% du capital ont été cédés au port autonome de Dakar, ''en contrepartie de son renoncement au montant de 24 milliards cinq cent millions''. Nos sources regrettent ici que ''Bara Sady ait troqué 24 milliards cinq cent millions de fonds publics contre cent millions de francs Cfa, représentant l’apport du Port de Dakar dans le capital de DP World Dakar qui est à ce jour encore d’un milliard''. Les 4% restants ont été cédés à des administrateurs.

 

 

À partir du moment où DP World Sénégal Limited, société actionnaire majoritaire de DP World Dakar Sa n’est pas DP World Dubaï FZE, il ressort des éléments de l'enquête que ''l’identité des actionnaires de DP World Sénégal Limited est inconnue sur le papier''. Et que ce sont les témoignages combinés de la notaire et de l’expert comptable sus-désignés qui démontrent que Karim Wade dispose d’un pouvoir de décision dans le fonctionnement de DP World Dakar Sa, étant donné qu'il parvient à y faire prendre des décisions.

 

Ici, nos sources expliquent que ''dans le cadre d’une enquête de patrimoine, il s’agit par essence de découvrir des éléments qu’on a entendu cacher, mais qui peuvent se découvrir par des liens de rattachement résultant de témoignages ou de documents''. Or, ces différents témoignages lient le fils de l'ex-président au fonctionnement de DP World Dakar Sa détenue majoritairement par une société offshore. En outre, ''DP World Dakar Sa a son siège au 18 boulevard de la République, propriété des Bourgi, le même immeuble abrite le siège de Blackpearl Finance Sa, cabinet d’ingénierie financière, propriété de Karim Wade via deux sociétés luxembourgeoises''.

 

''L’étau se resserre autour des principaux appuis de Karim Wade''

 

Dernièrement, DP World FZE a sorti un communiqué pour apporter un certain nombre de précisions concernant la mise en demeure adressée, depuis le 15 mars par la Cour de répression de l'enrichissement illicite (CREI), à Karim Wade. Devant justifier un patrimoine total d'un peu plus d'un milliard d'euros (soit 694 milliards de F Cfa), l'ancien ministre est accusé de détenir en sous-main pas moins de quinze sociétés, dont la plus importante est Dubai Ports World Dakar (596 millions d'euros).

 

Ainsi, le communiqué de la firme indique que ''conformément à la convention de concession signée entre DP World FZE et le Port autonome de Dakar, elle détient 90 % des actions de la société DP World Dakar, créée le 22 novembre 2007 pour l’exploitation de la concession».

 

Nos interlocuteurs estiment que cette mise au point est la résultante de ''l’étau qui se resserre autour des principaux appuis de Karim Wade dans le montage des sociétés offshores''. Parmi ces sociétés, ceux-ci avancent le nom de Daport et rappelle que lors d'une ''récente confrontation'', Pape Mamadou Pouye, camarade de classe de Karim Wade, a été confondu par la dame Coumba Diagne comme étant le principal donneur d’ordres dans le montage de Daport.

 

 

 

Gaston COLY

 

 

 

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