Publié le 16 Mar 2018 - 18:52
ECARTANT LE BLANCHIMENT ET L’ESCROQUERIE

Le parquet requiert 2 ans contre la « mule » de Karim Wade 

 

L’affaire Rilk, du nom du Camerounais présenté comme une ‘’mule’’ de Karim Wade, a été jugée hier, devant le tribunal correctionnel de Dakar. A l’issue des débats, le parquet a requis deux ans ferme contre le prévenu pour les délits de faux dans un document administratif et usurpation d’identité numérique. Le maître des poursuites a requis la relaxe pour les préventions d’escroquerie, de tentative d’escroquerie et de blanchiment.

 

En entendant, hier, le parquet requérir la relaxe de Rilk Wilfrith Dacleu Ngongang des faits de blanchiment, d’escroquerie et de tentative d’escroquerie, les avocats du prévenu n’ont pas manqué d’exprimer de la joie, mais aussi de la désolation. Même si le tribunal ne rendra sa décision que le 19 avril prochain, ils sont persuadés que cette affaire va finir comme un ballon de Baudruche. En fait, leur client a été présenté comme une mule de Karim Wade. Il est accusé d’avoir été mandaté pour convoyer des fonds pour le compte du fils de l’ex-Président Wade en exil à Qatar. L’argent servirait à déstabiliser le régime. Mais, selon Me Ndiogou Ndiaye, leur client a été dénoncé par une autorité avec qui il a partagé l’avion. Car dans l’avion, Rilk a commencé à frimer en parlant de Doha, de Karim Wade. Toujours est-il que c’est à son atterrissage que le prévenu aux multiples nationalités a été arrêté.

Interpellé par la Douane, Rilk a été trouvé détenteur de la somme de 4 millions de francs CFA composée de plusieurs devises. C’est au regard de ce montant que son séjour, prévu pour 48 heures, dure maintenant depuis 8 mois. ‘’Je crois que sa plus grosse erreur a été de citer Karim Wade. S'il ne l'avait pas fait, il serait réparti 48h après’’, s’est désolé Me Luc Detremmerie au cours de sa plaidoirie. Car Rilk a été ensuite inculpé pour blanchiment, escroquerie et tentative d’escroquerie, faux dans un document administratif…

Mais hier, à la barre, Rilk a nié tout lien avec Karim Wade et a expliqué qu’il est venu au Sénégal pour affaires immobiliers. Il a expliqué qu’il est employé par une société basée au Qatar, notamment Qatar investisment autority. ‘’Mon travail consiste à investir des fonds. Nous sommes approchés par des compagnies pour porter leur projet. J'étais venu au Sénégal pour un projet d'investissement immobilier. J’'ai quitté l’Ile Maurice pour aller à Londres, mais j'ai fait escale à Dakar où je devais rencontrer un certain Abdou Karim Ndiaye’’, s’est-il défendu. Seulement, d’après le parquet, après vérification, le numéro du susnommé était suspendu et que celui-ci réside en Italie. Le prévenu de rétorquer que ce n’est pas lui qui avait fixé le rendez-vous avec le contact, mais tout avait été réglé par ses collaborateurs.

Par rapport au délit de faux, Rilk a clamé son innocence et a donné des explications sur ses nombreux passeports. Il a allégué disposer de deux passeports américains afin de bénéficier des charges fiscales. Pour le document français, il dit l’avoir égaré. Toutefois, il a soutenu qu’il n’avait que le passeport camerounais en venant au Sénégal. Le reste des documents dont un passeport belge aussi, les policiers l’ont trouvé dans son ordinateur. En revanche, aucun document physique n’a été retrouvé avec lui. Mais pour le maître des poursuites, cela ne saurait le disculper, puisque nous sommes dans l'air du numérique. ‘’Le fait d'avoir plusieurs noms, c'est pour s'échapper de la justice’’, a fulminé le parquetier, avant de requérir 2 ans ferme pour les délits de faux et d’usurpation d’identité numérique. Pour le reste des délits, il dit ne pas en être convaincu.

Pour Me Arona Bass, leur client a largement duré en prison pour une affaire ‘’gonflée de façon exponentielle’’. Son confrère Me Mamadou Guèye a déploré la manière dont l’enquête a été menée, puisque le parquet a confié avoir fait des recherches sur Google pour avoir des informations sur le prévenu. Embouchant la même trompette, Me Amadou Diallo estime que le parquet s’est fondé sur des rumeurs publiques, car si leur client avait été jugé en flagrants délits, il aurait écopé du sursis. ‘’La politique est en train de causer énormément de tort à la justice et aux justiciables’’, s’est désolé Me Mamadou Wane qui considère que Rilk est arrivé au Sénégal au mauvais moment.

Il a soutenu également que si les passeports étaient faux, l'Ambassade américaine aurait porté plainte. Encore que, selon Me Florance De Cok, la preuve de la fausseté des documents n’a pas été rapportée. Au regard de ces arguments, la défense a plaidé la relaxe, non sans demander la liberté provisoire. Mais elle a été rejetée par le tribunal qui a mis l’affaire en délibéré.

FATOU SY

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