Publié le 22 Aug 2014 - 12:15
EN PRIVE AVEC OMAR PENE

‘’Je joue le 30 pour faire taire les rumeurs’’

 

Absent de la scène musicale depuis un an, Omar Pène a malgré tout vécu 12 mois tonitruants. Les rumeurs les plus folles ont été véhiculées sur lui alors qu’il était à Paris. Sa mort a été même annoncée. De retour au Sénégal, il souhaite donner un concert grandeur nature au Grand-théâtre afin de rassurer les fans mais également de ‘’faire taire les rumeurs’’. C’est ainsi qu’il est entré en studio avec son orchestre pour une série de répétitions. Dans cet entretien, il revient sur les moments vécus loin du pays, son prochain concert, ses relations avec Youssou Ndour et se prononce sur l’actualité du pays.

 

Vous venez de terminer près de 4h de répétition, cela vous fait quoi de retrouver votre bande du Sénégal ?

Cela fait plaisir de retrouver les musiciens et de préparer le concert du 30 août prochain parce que pour moi, cela représente la reprise de mes activités. Cela fait un bon bout de temps que j’étais à l’arrêt comme on dit. J’avais envie de reprendre et de faire plaisir au nombreux public qui m’attendait ainsi que tous les fans qui m’ont témoigné leur sympathie et qui étaient inquiets par rapport à mon état de santé et aux rumeurs véhiculées. On a dit du n’importe quoi sur Omar Pène. Je crois qu’aujourd’hui, pour faire taire les rumeurs, il était important pour moi de reprendre et de montrer aux gens que je suis là, Dieu merci. Je rends grâce à Dieu. C’est tout un plaisir pour moi de reprendre et éventuellement, c’est l’occasion d’inviter mes amis, mes collègues et de revoir les musiciens avec qui j’ai travaillé pendant  très longtemps. Vous avez vu comment ils étaient contents aujourd’hui. Ces retrouvailles sont un immense plaisir pour moi.

Cet arrêt était dû à quoi ?

C’était dû au fait que j’étais fatigué déjà, que j’étais un peu malade. Il fallait faire un break et essayer de voir par rapport à ma santé ce qu’il fallait faire, de me soigner encore une fois. Comme je perdais du poids, j’étais fatigué pendant très longtemps ; les nombreux voyages par rapport à mon métier, j’ai un peu forcé aussi. Mais aujourd’hui, je suis sûr et certain que ça va. Il fallait prendre le temps de revoir les choses. Quand on prend de l’âge, il faut, comme on dit, faire un bilan et savoir ce dont on souffre et dans quelle mesure se soigner. Ce qui va me permettre de bien prendre soin de soi.

Aujourd’hui comment vous sentez-vous ?

Je me sens bien. Le break que j’ai fait m’a permis de me reposer surtout parce que j’étais très  fatigué. Mais je me sens bien. Je rends vraiment grâce à Dieu. Aujourd’hui, je suis en mesure de continuer mon travail même s’il reste des choses à voir mais avec le temps, ça ira.

On a raconté beaucoup de choses sur vous. Comment avez-vous vécu toutes ces rumeurs dont certaines sont macabres ?

Je les ai vécues avec beaucoup de sérénité parce que comme vous savez, quand on est un homme public on s’attend à toutes sortes de rumeurs. Mais ce ne sont que des rumeurs. Cela fait partie de notre quotidien. Mais je crois qu’il est vrai aussi qu’ils ont poussé un peu fort. Quand on annonce quand même dans un journal ou dans la presse que telle ou telle autre personne a perdu la vie ou n’est plus parmi nous, cela peut créer des réactions qu’on ne peut pas contrôler.

Cela a été très gênant. Il y a beaucoup de gens qui étaient inquiets et qui n’arrêtaient pas d’appeler. Il y a des fans qui passaient tout leur temps à pleurer. C’était surtout par rapport à mon entourage. Moi, en ce qui me concerne, j’étais vraiment serein. Cela m’a fait rigoler dans un  premier temps. Parce que ce n’était pas la première fois pour moi d’entendre ce genre de rumeurs. Cela fait partie de la vie. Et heureusement que je suis là en train de vous parler. Ce qui prouve réellement que ce sont des rumeurs non fondées. Ceux qui avaient écrit cela, peut-être qu’en me voyant, ils écriront autre chose.

Pour vous, qui avait intérêt à vous donner pour mort ?

Je ne sais pas. On ne peut pas contrôler les gens. Je ne peux pas dire leurs motivations. Disons simplement qu’aujourd’hui, je ne vois personne. L’essentiel pour moi, c’est d’être là et d’être bien là. Pour moi, c’est le plus important. Tout le reste ne compte pas beaucoup.

Après un an de break, Omar Pène a-t-il assez d’inspiration et de souffle  pour son grand retour du  30 août prochain ?

Ce concert, c’est plus pour marquer la reprise de mes activités. Le Super Diamono, c’est un groupe qui a ses fans et qui est très bien suivi. On veut faire la fête avec tous ceux qui adorent le Super Diamono mais aussi avec ceux qui aiment la musique. Cela me permettra d’inviter mes collègues qui m’ont vraiment soutenu durant ces moments-là. Ils sont nombreux et je les remercie en les invitant à venir partager la scène avec moi. C’est pour faire la fête avec ce beau monde-là. On va quand même apporter une certaine gaieté dans la vie des gens.

Youssou Ndour est votre invité d’honneur, quels types de relations entretenez-vous ?

Youssou Ndour et moi, on s’est connus il y a 40 ans pendant qu’on était très jeune. On a gardé ces relations malgré tout ce qui s’est passé entre temps. On a parlé d’une dualité à cette époque-là entre le Super Etoile et le Super Diamono. Cela était plutôt géré par les fans. Aujourd’hui, on a gardé nos relations. On a fait ensemble ‘’Euleuk sibir’’. Il m’a appelé à ses côtés quand il a été nommé ministre et tout cela prouve qu’il y a quelque chose entre nous. Ce sont ces relations qui nous unissent et durent jusqu’à présent. On se parle beaucoup. On se respecte aussi et cela est très important.

Et puis c’est un collègue. Lui m’a invité pendant qu’il organisait des choses. On a partagé la scène avec Diamono, avec le Super Etoile. Aujourd’hui, c’est la fête et il n’y pas que lui. Il y a Thione Seck, Baaba Maal, Ismaël Lô qui sont tous invités. Youssou Ndour et moi avons fait ‘’euleuk sibir’’. Ce sera l’occasion de faire plaisir au public en le jouant. Il y a des gens qui seront contents. C’est l’occasion pour nous de nous retrouver une fois encore et pour moi de leur témoigner les sentiments que j’éprouve pour eux, parce qu’ils m’ont tous soutenu pendant que les choses n’allaient pas. Aujourd’hui, c’est pour leur dire merci. C’est aussi une manière de prouver au public que bien qu’on soit des concurrents comme certaines le conçoivent, le courant passe entre nous tous. Et de fort belle manière.

Après la fête des 40 ans du Super Diamono, l’un de vos plus anciens instrumentistes a quitté le groupe. Comment avez-vous pris son départ ?

Je ne prends pas cela comme un départ. Vous savez dans une famille il peut se passer des choses. Dembel est mon jeune frère. On a joué ensemble pendant plus de 20 ans. On a appris à se connaître. Aujourd’hui vous avez vu, il est présent (ndlr Dembel a répété hier avec Omar Pène). Moi je ne prends pas cela comme un départ. A la limite, c’est une sorte d’incompréhension. Cela arrive et fait partie de la vie. Pour des gens qui se connaissent, s’apprécient et se respectent, cela ne pose pas de problèmes.

Les équivoques sont-elles levées ? Vous vous êtes retrouvés à Paris puis à Dakar. Qu’en est-il exactement ?

Rien que sa présence ici à mes côtés prouve qu’entre nous, il n’y a pas de problèmes. Franchement, je ne veux pas m’attarder sur ces choses-là. J’avoue que les gens en ont beaucoup parlé mais en ce qui nous concerne, nous nous  connaissons très bien et pour moi, c’est l’essentiel.

Vous avez joué à  Paris avec au moins trois anciens du Super Diamono.  Peut-on s’attendre à un retour old school de votre orchestre ?

Je crois que les choses évoluent avec le temps. On a eu l’occasion de réunir tout ce beau monde  lors des 30 ans de l’orchestre. On a fait venir tous ceux qui ont pratiqué le Super Diamono ou presque. Ce sont des occasions comme ça qui nous permettent de nous retrouver. Aves tous ces gens-là, on entretient de bons rapports même avec ceux qui sont à l’étranger.

Ils nous arrivent de les rencontrer lors de nos tournées. Alors je les invite sur scène, on partage un morceau ou deux. On se rappelle des choses. Après, la vie suit son cours. Vous savez, il y a beaucoup de musiciens qui sont passés dans cet orchestre. Aujourd’hui les évènements nous permettent de nous retrouver tant soit peu, chacun selon son calendrier et sa disponibilité. Pour moi, la vie c’est la vie et les gens grandissent et progressent. Chacun a ses occupations. Mais le Super Diamono reste le Super Diamono et tous ces gens-là éprouvent énormément de plaisir à se retrouver.

Parlons maintenant de l’actualité. Vous avez composé une chanson en l’honneur des étudiants. Comment appréciez-vous la situation qui prévaut à l’UCAD ?

C’est une situation déplorable. Parce que simplement quand on arrive à ce qu’un étudiant perde la vie, cela devient dramatique. C’est même très pénible. L’université, comme on dit, c’est le temple du savoir. Ces jeunes sont au campus pour apprendre. On doit trouver des solutions pour leur permettre de faire cela correctement. Je pense que l’essentiel, c’est ça. Le problème de l’université  traîne depuis de nombreuses années. Une solution durable n’a pas encore été trouvée et c’est ce qu’il faut aujourd’hui. Aussi bien le corps enseignant, les étudiants, le peuple, l’Etat, les autorités doivent œuvrer pour ramener le calme et la sincérité à l’UCAD.

Cependant, il faut surtout mettre les étudiants dans des conditions optimales afin qu’ils puissent s’en sortir. C’est extrêmement difficile pour eux mais je pense qu’autour d’une table, les gens arriveront à se comprendre. Ce sont des jeunes qui ont besoin de leurs bourses pour survivre, surtout ceux qui n’ont pas leurs parents à Dakar et qui ont d’énormes difficultés. Ils ont besoin de soutien. Ces étudiants sont nos enfants et on est responsable par rapport à eux. Il faut qu’on s’occupe d’eux. Je ne dis pas qu’ils ont toujours raison mais dans la vie, on peut se tromper.

C’est aux adultes de les comprendre et de les aider en les mettant dans de bonnes conditions de travail. Ils sont appelés à gérer demain les affaires de la cité. Ceux qui gèrent le pays aujourd’hui sont passés par l’université Cheikh Anta Diop. C’est une université qui porte le nom d’un homme qui est respecté en dehors du Sénégal. C’est quelqu’un qui a beaucoup fait pour l’Afrique et pour son pays. Rien que pour le parrain de ce temple du savoir, je crois qu’il faut éviter qu’on y tue des étudiants. On a tué des étudiants à l’université Cheikh Anta Diop sonne très mal. Cheikh Anta Diop lui-même ne mérite pas cela.

Que vous inspire la traque des biens mal acquis ?

Il faut que les gens comprennent que nous avons besoin de dirigeants qui soient là pour servir leur pays. Quand on est homme politique, on est motivé par une seule chose : servir son pays. Cela parce qu’on a les capacités, les qualités pour quand même amener les gens à vivre bien et mieux. Mais on ne doit pas être là pour se servir. Cela pose un réel problème. Dans les grandes démocraties, ce dont on a besoin, c’est le progrès afin qu’on parle de développement. Tel n’est pas le cas actuellement. Il y a tellement de priorités qui ne sont pas prises en compte. Les gens souffrent.

Les jeunes ne trouvent pas de travail. On a besoin d’infrastructures pour vivre, d’électricité pour travailler, d’eau. On a besoin que le panier de la ménagère soit bien garni, que les travailleurs aient de bons salaires pour vivre. Mais aujourd’hui, on a quand même des dirigeants qui pensent à eux. On voit même des gens qui rentrent dans la politique parce que c’est un raccourci pour s’enrichir. Il faut que cela cesse. Tant qu’on n’a pas trouvé les dirigeants qu’il faut, qui savent qu’ils sont là pour servir leur pays, on aura toujours de sérieux problèmes.

Et le procès de Karim Wade ?

Moi, je ne suis pas dans le secret des dieux pour savoir ce qui se passe. S’il n’a rien à se reprocher, peut-être qu’il ne va pas moisir en prison. Moi je crois qu’aujourd’hui, ceux qui sont là et qui gèrent les affaires de la cité ont des comptes à rendre tout simplement. Quand on gère le pays et qu’on occupe certaines responsabilités, si l’on se comporte comme il se doit, on n’aura pas de problèmes. Moi, je suis certain que cela va permettre aux gens de savoir qui est qui et qui a fait quoi tout simplement. Il faut laisser la justice faire son travail. Et si jamais ce pourquoi il est poursuivi n’existe pas, ce sera bien pour lui. Je le pense sincèrement.

La situation dans le monde rural est préoccupante. Quel commentaire cela vous inspire ?

Il faut trouver une solution à ce problème-là. Les gens ont besoin de la pluie pour semer, cultiver et récolter. Il y a un retard, il faut aider ces gens-là. Il y a des gens qualifiés pour trouver des solutions acceptables et durables afin que les agriculteurs s’en sortent. 

BIGUÉ BOB

 

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