Publié le 20 Jun 2014 - 19:02
EXÉCUTION DES DÉCISIONS DE JUSTICE

 L’État peine à recouvrer ses biens

 

Même si le préjudice n’est pas évalué, l’État peine à recouvrer son patrimoine dans les procédures où il a obtenu réparation. La directrice de l’Agence judiciaire de l’Etat (AJE) l’a fait savoir hier, lors de la clôture des journées d’études de son institution. 
 
 
‘’Le contentieux pénal : la problématique des infractions portant sur les deniers publics’’. C’est le thème de la dernière communication faite dans le cadre des journées d’études de l’Agence judiciaire de l’État. La directrice de l’AJE, Mme Aïssa Gassama Tall, a saisi l’occasion pour déplorer les difficultés de recouvrement que rencontre son service.
 
Elle renseigne que l’État du Sénégal peine à recouvrer ses biens dans le cas où des dommages et intérêts ou des mesures conservatoires sont prononcées en sa faveur. ‘’L’exécution des décisions de justice est le talon d’Achille de notre mission’’, fulmine-t-elle. Son adjoint, Mafall Fall, renseigne à ce propos qu'un greffier a été affecté à l’AJE pour suivre toutes les décisions où l’État a obtenu une décision favorable. 
 
''Beaucoup de personnes ont vidé leurs comptes à leur sortie de prison’’ 
 
Pour autant le problème reste entier, dans la mesure où la procédure de recouvrement déclenchée n’atteint pas toujours les résultats escomptés. Si son équipe est en train, avec le Parquet, d’exécuter toutes les décisions définitives, Mme Tall renseigne que des difficultés subsistent, notamment concernant les banques. ‘’La plupart des banques ont répondu que les mesures conservatoires ne leur ont jamais été notifiées. Ce qui fait que beaucoup de personnes ont vidé leurs comptes à leur sortie de prison’’, se désole-t-elle.  ‘’Seule la somme de 34 millions de francs a pu être récupérée à la CBAO’’.
 
L’autre difficulté rendant difficile le recouvrement, est liée à la nature des biens. ‘’Quand il s’agit d’un immeuble, il y a une procédure d’immatriculation et pour un véhicule, une procédure de mutations’’, explique M. Fall. Ainsi, le directeur adjoint de l’AJE insiste sur la collaboration des administrations concernées, dans la mesure où il n’est pas facile de transférer un bien privé vers le patrimoine de l’État. Toutefois, malgré ces difficultés, l’AJE a réussi, selon la directrice et son adjoint, à saisir des immeubles et des véhicules, surtout en matière de blanchiment d’argent. 
 
En ce qui concerne les délits de blanchiment de capitaux, de corruption et concussion commis par un agent de l’Etat, le magistrat à la Cour suprême Idrissa Sow a émis l’idée d’offrir la possibilité à l’État de se constituer partie civile. ‘’La constitution de l’Etat doit être sérieusement envisagée comme c’est le cas en France’’, dit-il. Selon son argumentaire, ‘’il n’y a pas certes de dissipation de l’argent public en matière de blanchiment de capitaux, de corruption ou de concussion commis par un agent de l’État’’.
 
Mais poursuit-il, ‘’même si on ne peut pas évaluer le préjudice financier, il existe un préjudice moral découlant de l’infraction’’. Pour arguer son propos, il explique qu’en matière d’enrichissement illicite, c’est le bien de l’Etat qui a servi à s’enrichir. Il s’y ajoute, que le discrédit et l’opprobre sont jetés sur l’administration du fait de l’agent incriminé. 
 
FATOU SY 
 

 

 

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