Publié le 23 Dec 2012 - 06:05
FIN D'ANNÉE DIFFICILE

Noël sans le père Noël

 

Noël s’est pointée sans le Père Noël! Des dakarois qui ont l’habitude de célébrer toutes les fêtes religieuses ont mis, cette année, la pédale douce.

 

Des rues enguirlandées aux couleurs de Noël, la fête chrétienne qui célèbre la naissance du Christ. Cela scintille partout dans Dakar, même si cette fête ne promet pas d’être féerique. Et pour cause, c’est la dèche un peu partout!

 

Dans plusieurs entreprises secouées par la crise économique, les nerfs sont à vif, en cette période censée être un moment de fête, de partage, de remise de cadeaux. Parler de cette fête ou des mets copieux préparés d’habitude, en cette occasion, fait sortir plus d’un de ses gonds. 'Taloumako !''. ''Avec quel argent vais-je célébrer cette fête ?''. ''Je suis hyper fauché''. ''Je cours derrière des arriérés de salaire''. ''Je n’ai pas encore honoré mes factures d’électricité''. Avec un cœur lourd d’amertume, de colère noire, des dakarois interpellés en veulent à mourir à leurs chefs d’entreprise, au moment où d’autres imputent cette situation drastique au nouveau régime.

 

''La situation va de mal en pis, au fil des ans''

 

''Depuis qu’ils sont là, l’argent ne circule plus dans ce pays. Comment fêter le 24 décembre, alors que nous ne sommes plus en mesure d’assumer les responsabilités qui pèsent sur nos épaules ?'' Partout, les mêmes phrases, les mêmes complaintes. Et le poulet prisé, en pareilles circonstances, de même que les bûches de noël ne promettent pas d’être au rendez-vous, dans plusieurs foyers. ''C’est à vous les journalistes de nous édifier, on est lessivé par cette situation. Si elle perdure, il faudra s’attendre à un mouvement d’humeur généralisé….''

 

Pas lourd, air évasif, le vieux Amadou Sall (nom d’emprunt) est un ancien employé de l’armée française. Rencontré sur l’avenue Ponty, il nous fusille du regard, à l’évocation des préparatifs des fêtes de Noël ou encore de Saint-sylvestre qui approchent. D’un ton glacial, il rappelle qu’il a d’autres préoccupations. Sa priorité c’est de gérer au jour le jour son quotidien. Les enfants, encore à l’école, ne sont pas en mesure d’assurer la relève de ce monsieur qui doit avoisiner la soixantaine. Revenant à de meilleurs sentiments, notre interlocuteur de souligner que « c’est pénible pour les Sénégalais qui bossaient avec l’armée française ; depuis le départ de la Bima française, on est dans la galère. On sort chaque jour pour chercher de quoi nourrir nos familles…. ».

 

Si la morosité semble frapper plusieurs foyers, les rues commerçantes, bien décorées, ne font pas également le plein. La clientèle n’a pas été au rendez-vous. ''La situation va de mal en pis, au fil des ans. Jadis, on n’avait pas le temps de manger à midi, tellement l’affluence était forte, mais maintenant on peut s’offrir une longue sieste. Les clients se font rare, nos affaires n’ont de cesse de péricliter'', explique Moussa Ndiaye, un vendeur de prêt-à-porter, installé sur l’avenue ponty. Il essaie, comme d’autres, de garder le sourire, avec l’espoir que 2013 apportera une bouffée d’oxygène aux Sénégalais atterrés par le marasme économique. C’est le même discours qui est servi par ses collègues.

 

Ce n'est pas le blues pour tout le monde

 

Dans certaines grandes surfaces. Ce n’est point le rush comme les années précédentes, mais dans ces points de vente des Dakarois, des libanais ou autres membres des communautés étrangères montrent leur force de frappe financière. On achète des cadeaux à offrir aux enfants, aux proches, des papiers d’emballage, on sort des liasses… pour bien passer Noël. La fête a un prix, ils en ont les moyens. ''Les temps sont durs, la crise est réelle, mais c’est une fête qu’on prépare à l’avance.

 

C’est notre fête et celle des enfants, on ne peut passer outre'', rassure Robert Thiané, un agent de Mtoa rencontré en train de faire du shooping. Mais, sur un ton réaliste, il souligne que ''les dépenses sont vraiment limitées''. Idem pour Firmin Diédhiou, vendeur à Happy Land. « On aura du mal à célébrer cette fête, si on attend les dernières heures. J’avais mis des économies de côté. Je pense être en mesure de faire plaisir à ma famille et de passer une agréable fête de Noël'' soutient-il.

 

Par ailleurs, comme d’autres grandes surfaces de Dakar, Happy Land, qui était, dans les années précédentes, prise d’assaut par une clientèle hétéroclite, n’affiche pas le plein. Les affaires marchent, mais les clients se manifestent au compte goutte. ''La tendance est vraiment à la baisse. Peut être qu’il y aura un déclic, les jours à venir'', espère Salif Diallo qui officie dans ce magasin de vente d’objets de décoration, de jouets, d’ustensiles, de bijoux, de jouets pour enfants, entre autres.

 

Matel BOCOUM

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