Publié le 12 Oct 2015 - 23:04
FLUX FINANCIERS ILLICITES EN PROVENANCE DE L’AFRIQUE

La société civile veut barrer la route aux fraudeurs

 

Les organisations de la société civile qui ont lancé à Dakar une campagne contre les flux financiers illicites sont déterminées à stopper le phénomène. Un combat difficile qu’elles sont prêtes à mener.

 

Les organisations de la société civile africaine (OSC) veulent ‘’stopper l’hémorragie’’ des flux financiers illicites qui quittent le continent africain pour aller vers d’autres lieux. Elles ont lancé, hier, à Dakar, une campagne pour mettre fin à ces flux en provenance du continent africain. Selon les estimations, c’est plus de 60 millions de dollars, environ 40 milliards de F Cfa, qui sortent de l’Afrique, chaque année, pour être planqués dans des paradis fiscaux à l’étranger. Le phénomène ne fait pas que commencer. Il existe depuis plusieurs années. Aujourd’hui, si on fait l’addition de toutes ces sommes, c’est des milliards de F Cfa que l’Afrique a perdu. Plus du double de l’aide publique au développement dont bénéficie le continent de la part des grandes puissances. La société civile africaine veut mener le combat pour faire rapatrier tous ces fonds qui peuvent servir pour le développement du continent. L’Afrique n’est pas pauvre, elle a été appauvrie.

Selon Mamadou Goita, membre de la société civile africaine et Directeur exécutif de l’Institut de recherche et de promotion des alternatives en développement basé au Mali, les OSC vont faire en sorte que cet argent puisse revenir. Si l’Afrique réussit à rapatrier ces fonds, c’est des milliers d’emplois qui seront créés dans un continent où la question de l’emploi des jeunes est devenue une bombe. ‘’Certains qui n’ont plus d’espoir de réussir socialement en Afrique prennent des pirogues de fortunes pour tenter de rejoindre l’Europe. Des milliers de jeunes y laissent leurs vies. Ce qui, de plus, constitue des pertes énormes pour l’Afrique’’, a dit M. Goita.

Rapatrier l’argent

Par ailleurs, en plus de vouloir faire rapatrier ce trésor africain caché dans des paradis fiscaux européens, les organisations de la société civile souhaitent que le phénomène puisse s’arrêter définitivement. Elles ne veulent plus voir l’argent des africains ‘’émigrer clandestinement’’ vers l’extérieur. Le combat est déjà lancé dans plusieurs pays : le Kenya, le Congo, le Togo et le Sénégal. Toutefois, l’hémorragie n’est pas seulement externe. Car, à en croire Mamadou Goita, elle est aussi interne dans la mesure où ‘’beaucoup de dirigeants africains se sont enrichis illicitement. Même si l’argent n’a pas transité, il est caché dans des mallettes, des coffres-forts, logé dans des maisons et ne bénéficient qu’à une élite. C’est une ‘’injustice’’, d’après lui et il faut un mettre un terme.

Les spécialistes de ces flux financiers illicites ne sont pas seulement des africains qui sont dans des sphères de décision. Toujours, D’après M. Goita, les entreprises multinationales sont les premiers acteurs de ces mouvements illicites. Et  selon, l’économiste Moustapha Kassé, ces sociétés réussissent leurs forfaits grâce à un système financier organisé, ‘’difficilement punissable’’. Le doyen honoraire de la faculté des sciences économiques et de gestion de l’université Cheilkh Anta Diop de Dakar d’ajouter que le combat des OSC ‘’est légitime, nécessaire’’mais il est de plus en plus difficile. M. Kassé renseigne que les fraudeurs ont une longueur d’avance car ils utilisent les dernières technologies pour qu’il n’y ait aucune traçabilité. ‘’Chaque pays développé a son paradis fiscal (USA, France, Grande Bretagne). On a beau dénoncé, mais ils sont là. Il faut qu’on continue le combat et que cette bataille change de cap en agissant sur les politiques qui ont une double fonction : celle de complicité et d’intéressement’’, conseille le professeur Kassé. 

ALIOU NGAMBY NDIAYE

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