Publié le 26 Jan 2017 - 20:04
GARDE A VUE ET RETOUR DE PARQUET

Le plaidoyer de Me Ousmane Sèye pour l’application du règlement de l’Uemoa

 

L’avocat au barreau de Dakar, Me Ousmane Sèye, a invité hier tous les acteurs judiciaires à travailler davantage pour parvenir à l’application du règlement de l’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa) sur la garde à vue et le retour de parquet.

 

Adopté en 2014 par le Conseil des ministres, l’article 5 du règlement de l’Uemoa relatif à la garde à vue et au retour de parquet tarde à se matérialiser au Sénégal. L’application de cette mesure, qui prévoit l’assistance d’un avocat commis dès l’interpellation du suspect par la police ou la gendarmerie, fait encore l’objet de discussions au Sénégal. Selon Me Ousmane Sèye qui s’exprimait hier, lors d’un panel axé sur la ‘’garde à vue et la pratique du retour de parquet’’, le Sénégal, à l’instar des autres pays membres de l’organisation sous-régionale, doit appliquer cette disposition. 

‘’Il y a un règlement qui a été adopté par l’Uemoa, depuis 2014. Ce dernier dispose que la personne interpellée par la Police ou la Gendarmerie a droit à être assistée par un avocat, dès son interpellation. Beaucoup de pays membres l’ont appliqué, sauf le Sénégal. Récemment, il y a eu une loi du 08 novembre 2016 qui a essayé d’intégrer ce dispositif dans le code de procédure pénale. Mais, l’application effective pose problème’’, a déclaré Me Sèye.

De l’avis de l’avocat, il n’y a eu aucun changement avec la modification de l’article 55 du Code de procédure pénale du Sénégal. ‘’Même avec la modification de cet article, on a l’impression que l’avocat ne doit intervenir qu’après 48 heures de garde à vue. Cela est inexact’’, a soutenu Me Sèye, tout en ajoutant que la garde est une atteinte aux droits fondamentaux du suspect. L’avocat de soutenir que, dans l’exposé des motifs, le législateur a bien indiqué qu’il s’agissait de permettre l’assistance d’un avocat dans l’interpellation. Dans le corps de l’article, le législateur a évoqué l’interpellation de la personne. Donc, la personne interpellée doit obligatoirement être assistée par un avocat. ‘’Il faut accorder un minimum de respect à la personne suspectée pour ne pas bafouer sa dignité humaine. Au Sénégal, on a tendance à minimiser cet aspect aussi important qu’est la dignité humaine. Et c’est inadmissible’’, a déploré Me Sèye devant ses confrères et des étudiants en Droit.

‘’Le retour de Parquet est une détention arbitraire’’

L’avocat au barreau de Dakar a indiqué qu’il n’y a pas que le problème de l’interpellation qui se pose, dans le cadre de la garde à vue. D’après lui, il y a également le problème des locaux où doivent se faire les gardes à vue. Sur ce cas précis, Me Ousmane Sèye a souligné que le Code de procédure pénale stipule que les mineurs de 13 à 18 ans, s’ils sont ‘’gardés à vue, doivent l’être dans un local spécial’’. Il y va de même pour les femmes en état de grossesse et les personnes vivant avec un handicap. Malheureusement, soutient-il, rien n’est fait dans ce domaine au Sénégal. ‘’Il est grand temps qu’on arrive à régler définitivement cette question, en construisant des salles de garde à vue répondant aux normes internationales. Dans la même logique, il faut séparer les hommes et les femmes dans les lieux de garde à vue’’, a préconisé Me Ousmane Sèye.

Abordant le retour de Parquet, l’avocat, par ailleurs homme politique, a estimé que celui-ci n’est rien d’autre qu’une ‘’détention arbitraire’’. Pour lui, le suspect doit être présenté au juge au terme de la première enquête préliminaire. Et à ce niveau, précise-t-il, il appartient au législateur sénégalais de trouver une autre formule pour y mettre un terme.  Ainsi, le 5ème vice-président du Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT) a demandé à ses pairs de mener un combat ‘’décisif’’ pour la réforme du Code pénal et de procédure pénale, au grand bonheur des justiciables. 

GAUSTIN DIATTA

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