Publié le 14 Sep 2012 - 08:05
HARMONISATION DES LÉGISLATIONS CONTRE LA DROGUE

Les administrations sommées de lever le secret professionnel

 

C’est une avancée notoire dans la lutte contre la drogue en Afrique de l’Ouest. Désormais, les administrations sont sommées de lever le secret administratif pour faciliter la tâche aux services de répression.

 

Ce n’est un secret pour personne, plusieurs administrations de la sous-région sont infiltrées par les narcotrafiquants. Mais désormais, la tâche ne sera plus facile pour les cartels et leurs taupes tapies dans l’ombre des administrations et toujours prêtes à vendre la mèche. Avec la décision de lever le secret professionnel, les différentes administrations qui ont toujours opposé, quand il s’agit du droit commun, le secret professionnel, sont contraintes de coopérer.

 

Si pour le Sénégal, c’est contenu dans le code de la drogue de 1997, beaucoup de pays de la sous-région n’ont pas encore mis ce dispositif dans leurs législations. Grâce à l’atelier de trois jours qui a pris fin hier à Dakar, sur l’harmonisation des législations dans la lutte contre la drogue en Afrique de l’Ouest, les choses vont changer. Plusieurs autres dispositions ont été prises, lors de cette rencontre qui a servi également d’évaluation de l’initiative de Dakar. Sur le plan institutionnel, il y aura des services centraux opérationnels qui vont contrôler la lutte dans les différents pays et les services collaboreront entre eux.

Toujours dans l’administratif, les Comités interministériels de lutte contre la drogue (CILD) seront mis en place. Ils regroupent tous les ministères qui se chargent de lutter contre le fléau, aussi bien au niveau préventif qu’au niveau répressif. Par rapport à la législation, des instruments juridiques exorbitants du droit commun ont été mis à la disposition des services de répression pour accroître leur capacité d’intervention sur le terrain.

 

Ainsi donc, renseigne le commissaire Abdoulaye Niang, directeur de l’Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants (OCRTIS) : ''Il est possible maintenant de pénétrer dans les domiciles à tout moment.'' Par ailleurs, d’autres armes, cette fois-ci secrètes, ont été prises pour lutter efficacement contre la drogue, selon Abdoulaye Niang. La menace pour la sous-région ouest-africaine proviendrait également du fait que la drogue est un phénomène mondial qui, en se développant, s’est associée avec d’autres phénomènes comme le blanchiment d’argent et le terrorisme, ce qui aggrave beaucoup plus la situation.

 

De la nécessité de coordonner les actions

 

Pour lutter efficacement contre la drogue, la sous-région est condamnée à unir ses forces. Une idée partagée par les différents experts. L’ambassadeur Américain Lewis Lukens s’est appesanti sur l’impérieuse nécessité d’une approche régionale, pour venir à bout du phénomène de la drogue. Réitérant l’engagement du Sénégal qui ne faillira pas dans cette lutte, le Premier ministre Aboul Mbaye reste également convaincu qu’aucun État ne peut parvenir à vaincre le fléau à lui seul. ''Avec une loi harmonisée, les pays de la sous-région s’en sortiront davantage et cela est bien possible, car ils partagent tous certaines valeurs'', dixit Abdoul Mbaye. Au Sénégal, le combat n’est pas encore gagné, mais la progression est bien là, poursuit-il.

 

À ce niveau, le commissaire Abdoulaye Niang de l’Ocrtis donnera une vision plus claire. Il dira que malgré les efforts intenses fournis par les services de répression : douane, gendarmerie, police, chaque année on constate un accroissement de la consommation et du trafic du chanvre indien qu’on appelle Cannabis. Mais en ce qui concerne l’héroïne et la cocaïne, on constate une ''nette régression de ces deux drogues, aussi bien sur la consommation que sur le trafic'', informe-t-il. Il faut noter que d’autres rencontres viendront mettre en application les différentes recommandations qui ont été dégagées en février 2010, lors d’une conférence ministérielle pour une certaine stratégie dénommée ‘’Initiative de Dakar, le temps de l’action’’.

S’exprimant sur les peines, les experts ont informé que pour le trafic international de drogue, la personne est condamnée entre 10 et 20 ans, avec une amende qui équivaut au triple de la valeur de la drogue saisie. Il y a aussi d’autres peines complémentaires, comme l’interdiction de séjour pour les étrangers, de même que la fermeture des hôtels etc. Pour le trafic intérieur, la peine varie de 5 à 10 ans et une amende qui équivaut au triple de la valeur de la drogue saisie.

 

Afrique de l’Ouest, les raisons de la ruée des narcotrafiquants

 

C’est en 2005 que les trafiquants de drogue ont jeté leur dévolu sur le continent ouest-africain. Auparavant, les pays de consommation avaient changé de stratégie, en mettant à contribution leur marine nationale pour barrer la route de la drogue sur l’atlantique et sur la méditerranée. En réponse à cette nouvelle stratégie des États, les organisations criminelles internationales ont adopté de nouvelles démarches. Elles ont choisi de passer par l’Afrique de l’Ouest, un espace qu’ils ont transformé en dépôt pour essayer de remonter la drogue vers d’autres destinations.

 

Plusieurs États en sont devenus des plaques tournantes du trafic de drogue. De l’avis du commissaire Abdoulaye Niang, cela s’explique naturellement, car toutes les conditions recherchées par les trafiquants existent dans cet espace. Parmi ces conditions, il y a d’abord la porosité des frontières, ensuite il y a un bon circuit de transfert d’argent, car à tout moment, à l’aéroport, on peut avoir une correspondance ou une communication vers l’Europe ou les États-Unis. Il y a aussi la pauvreté ambiante et l’infiltration de certaines administrations par les trafiquants internationaux de drogue. Les faiblesses notées dans les législations nationales également profitent aux trafiquants d’où l’intérêt de cette conférence qui a voulu pallier les disparités et les carences dans les législations au sein des différents pays.

 

Amadou NDIAYE

 

 

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