Publié le 12 Jan 2013 - 09:45
INHUMATION DE SERIGNE CHEIKH MAÏ MBACKÉ (1352-1434)

 

Touba regrette un médecin des âmes

 

 Excusez, Mor Soxna et Abdou Khadre, que je rompe la connivence. Permettez, pour la postérité, que je déroge, l'unique fois, à notre commune convenance... celle du Silence absolu et méditatif. Ce tacite pacte qui a spontanément givré le Tout Touba, en cette nuit du dimanche 24 Safar 1434 (6 janvier 2013) nuit inoubliable de sable glacial aux Khassaïdes langoureux, durant laquelle fut mis en terre, devant des milliers de fidèles pétrifiés, l'un des plus illustres Guides contemporains de la Mouridiyya : Serigne Cheikh Maï Mbacké. Il était plus facile de décompter ceux qui, comme Segn Bass Abdou Khadre n'y étaient, pour cause d'absence de la ville Sainte.

 

 

Cet exercice là, était nettement plus aisé que de dénombrer à s'y perdre, ces Cheikh et Petits-fils de Serigne Touba, frères et cousins de la grande famille accourus de Mbacké Khewar à Darou Salam et partout dans Touba et au delà, dès après l'icha (NDLR : la prière de nuit), accompagner leur mentor, leur confident, ami et Guide aux cotés de sa légendaire maman Sokhna Maï Kabir, "l'Agréée de son père". Serigne Mountaga Ibn Bassirou, Abibou Ibn Falilou, Mame Mor Ibn Mourtala, Moustapha Ibn Saliou, Djily, Abo Ibn Abdou Lahat, Cheikh Sey, Abdou Lahat, Fallou, Amsa Ibn Swahibou, Abdoulah Ibn Ibrahima, la famille élargie de Serigne Abdoul Khadre Mbacké et des Boussognbé, tous étaient là, attristés, enveloppant de silencieuses litanies celui qui a su avoir pour chacun d'entre eux, une marque particulière d'attention, d'affection, d'érudition, de constant attachement.

 

Je sais, Mor. Il est d'usage quand un soufi de cette dimension rejoint (avec) bonheur le monde réel auquel il a consacré sa vie, d'en faire peu cas. Ici-bas. De respecter sa mémoire. De ne guère laisser l'univers factice qu'il a admirablement dompté de son vivant, troubler les agapes spirituelles d’âmes qu'il a si majestueusement aidé à apaiser. Oui, j'y aurais souscrit, totalement, n'était-ce mon devoir également impérieux de Témoignage. De transmission. Double impératif qui pose des rails pour les générations montantes et à venir. D'ici... Comme de partout ailleurs ;  du monde de l'intelligence.

 

Deux legs seulement me suffiront. La pieuse BONTÉ et l’HUMILITÉ. Deux grandes leçons que Serigne Cheikh Maï Mbacké a laissées aux milliers de disciples qui ont épuisé dés le lendemain du Magal, ses forces ; jusqu'à ses dernières réserves de disponibilité... État d'esprit plutôt que qualificatif. Ne disons du disponible Serigne Cheikh Maï qu'il était seulement Bon et Humble. C'est peu dire. Il irradiait ces attributs. En toute sérénité dispensatrice.

 

J'ai décrypté à son ombre, essentiellement par l'attitude et le comportement, loin, bien loin des grands discours, qu'il n'y a en définitive dans tout l'univers que deux types de Créatures. Le premier, respectueux des prescriptions, lois et ordres divins... Au nombre duquel les élus de la Bonté, au cœur pur de générosité qu'ALLAH le Très-Haut fait l'Insigne Honneur d'Associer à l'accomplissement des Ses Bienfaits sur l’Humanité. Et, par delà la grande masse de rebelles qui ne méritent guère mention, le second groupe, celui des pervers occasionnels et simples égarés qui s’abandonnent par moment à Satan et l'assistent incidemment dans son sinistre dessein sur des âmes tout aussi distraites. Entre les deux, l'ambition, l'ambition personnelle pour les deux mondes et le destin, font la différence.

 

Serigne Cheikh Maï était aussi, tout en HUMILITÉ. Pour preuve, lequel a appris, depuis presque une semaine, autrement que par la proximité, la disparition de cet illustre soufi qui a pourtant fait l'unanimité à Touba ? Le seul fait que le Rappel de cet octogénaire parmi les plus âgés des petits-fils directs de Bamba soit passé inaperçu des médias, y compris ceux de la ville sainte, en dépit de l'affluence encore continue au cimetière et en sa demeure, de fidèles avisés, atteste, à suffisance, de son degré d'effacement quasi dissimulateur... Sous l'ombre divine. Loin, bien loin des convoitises et oripeaux qu'il savait si bien traiter avec autant de dédain que de souverain détachement. L'adage établit, bien plus à raison qu'à tort, qu'on part en fait de cette vie comme l'on y aura vécu... Avec ou sans attachement majeur à ses leurres et lustres.

 

Fuyant toute forme, même apparente de mondanité, Serigne Cheikh Maï ne quittait Touba que sur injonction d'un corps asservi aux rituels et autres dévotions. Un corps d'humain finalement épuisé, par les sollicitations et l'épreuve ascétique à plus de 80 ans révolus!

Le fils de Sokhna Maï Kabir savait si bien effacer sa personne, au point qu'au temps de sa parfaite santé, il n'était jamais plus haut assis qu’aucun de ses interlocuteurs. Fussent-ils des enfants.

Le neveu et ami du quatrième Khalife Serigne Abdoul Khadre Mbacké personnifiait la crainte révérencielle de ALLAH Le Très-Haut. Tout autant que le culte de l'Humanisme dont le Tout Puissant nous Gratifie, malgré tout, dans son Immense Miséricorde, depuis l’avènement de Adam, le Grand Patriarche. Le petit fils de Khadimoul Rassoul avait pris de son Illustre grand père, par delà la physionomie, jusqu'à cette mystique force tranquille et apaisante, tout en douceur, dont la simple proximité suffisait à décharger de tout fardeau.

 

A Abo, Cheikhouna et Djily, le compagnon de l'intérieur, d'expliquer à leur ainé Mor Soxna que le départ d'un tel Homme de Dieu, qui n'était point le père de ses seuls enfants, mais le patriarche des aspirants et assoiffés de toutes conditions, ne peut laisser durablement aphone des disciples auxquels après ALLAH le Très-Haut, il a fait don de sa vie.

Condoléances à vous tous. A ses épouses et filles. A ses disciples de la Sénégambie. A Moustapha, Mamadou, Amdy, Ibrahima, Diawara, Badara, Souleymane, Bathie... Condoléances attristées du Sénégal à la Mouridiyya ; à son illustre frère et Khalife Serigne Sidy Moukhtar Mbacké.

 

Sidy GAYE

Journaliste

 

 

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