Publié le 24 Oct 2014 - 14:30
KOLDA

Firdawsy, les misères d’une localité assoiffée

 

L’accès à l’eau potable et aux soins médicaux est un casse-tête quotidien pour les habitants de Firdawsy. A cela s’ajoute le manque d’infrastructures éducatives et de pistes de production. Ce village, situé dans la nouvelle commune de Kéréwane, à 51 kilomètres de Kolda, compte mille habitants. Abandonnées à elles-mêmes, les populations demandent le soutien des autorités locales et du président de la République.

 

Alors que l’hivernage tire à sa fin, dans le ciel, de gros nuages assombrissent le village de Firdawsy en cette matinée. Malgré cette menace, une douce chaleur règne. A perte de vue, une nature généreuse étale sa verdure. Cette beauté grandiose étreint le visiteur. Mais, pas sûr que les populations de la localité y soient encore sensibles, à cause d’un quotidien fait de tracasseries. Le village manque d’eau potable, d’électricité et de poste de santé.

Il est éloigné de tout. Un seul puits de 45 mètres fonctionne. Dès le petit matin, les femmes et les enfants effectuent le trajet jusqu’au puits pour y chercher l’eau nécessaire à la famille. Ce liquide précieux, qui sert de boisson, à la cuisson des aliments et permet à toute la famille de faire sa toilette, constitue ici un enjeu majeur. La corvée d’eau dure toute la journée, dans un incessant va et vient. Et ce combat, exclusivement mené par les femmes, donne une idée précise de la féminisation de la pauvreté.

Malgré cette vie de galère, elles se chamaillent, s’esclaffent, devisent tranquillement et naturellement avec les visiteurs qui ont du mal à comprendre comment elles supportent cette situation pénible et désagréable savamment masquée par des sourires larges et gentils. Que dire de la belle parade des ovins, caprins et bovins qui égaient les alentours du puits. A les voir puiser, faire la navette entre les concessions et le puits, on a l’impression qu’une malédiction est tombée sur elles.  

Ces braves femmes, qui parfois portent sur leur dos des bébés, sont obligées de faire ce trajet un nombre incalculable de fois par jour. « Nous nous réveillons à 4 heures du matin pour puiser de l’eau. Nous passons presque toute la journée au puits, jusqu’à 22 heures, pour pouvoir se ravitailler en eau. A 7 heures du matin, nous nous affairons autour du petit-déjeuner pour la famille, lavons les enfants et nettoyons la cours. Nous utilisons aussi cette eau pour faire laver les ustensiles ayant permis de préparer le repas. Nous l’utilisons pour boire, pour faire la lessive et pour abreuver le bétail », explique Ndèye Sène, porte-parole des femmes du village.

Plus tard, El Hadji Diop, chef du village, renseigne que les populations ont cotisé pour creuser les deux puits du village. « L’autre puits, que vous voyez là-bas, date de la création du village, en 1996. Il ne fonctionne plus, parce qu’il est enseveli par le sable. Un seul puits fonctionne actuellement. Et pendant la saison sèche, il tarit. Vraiment, nous souffrons énormément », dit-il.

La diarrhée, un problème quotidien

Le manque d’eau n’est pas le seul fardeau qui pèse sur les populations de Firdawsy qui luttent, en cette période de soudure, pour survivre. En effet, dans ce village, la diarrhée fait partie du quotidien. L’eau est potable à la source, mais toute l’activité autour du puits laisse des traces. Des objets jetés par les enfants, des substances d’origine animale et des bactéries infectent le puits. « Dans ces conditions, les personnes ne sont pas épargnées par la diarrhée. Nos enfants sont souvent victimes de la diarrhée et des maux de ventre, surtout en cette période de pluie. D’ailleurs, mon âne souffre de la diarrhée », révèle le chef du village.

Absence d’un poste de santé

A Firdawsy, localité située dans la nouvelle commune de Kéréwane, département de Médina Yoro Foula, rien ne va.  Ici, l’accès aux soins médicaux constitue un véritable casse-tête pour les malades. Pour se faire soigner, il faut faire 16 km et rallier le poste de santé de Pata, ou avaler 51 km pour aller à Kolda. « Parfois, certaines femmes enceintes accouchent en cours de route sur la charrette, avant d’arriver au poste de santé. L’état de dégradation des pistes pose problème », se désole Ndèye Sène.

Pour El Hadji Diop, il n’est plus question que les femmes de Firdawsy continuent d’accoucher sur les charrettes, de rendre l’âme en cours d’évacuation sanitaire et de passer le plus clair de leur temps au puits pour chercher de l’eau. Il est temps que les autorités locales et le président de la République, Macky Sall, mettent tout en œuvre pour satisfaire la demande sociale à Firdawsy et ses alentours.

En plus de l’absence de structure de santé, l’on dénonce également les difficultés auxquelles sont confrontées les femmes pour accéder au crédit, la nécessité de disposer de semences de qualité, d’engrais, d’intrants et de matériels agricoles pour mettre en valeur des parcelles maraîchères. Selon les habitants, Firdawsy a besoin d’électricité, d’une école primaire à six classes bien clôturée, d’un forage et d’une piste de production bien aménagée. Ces infrastructures de base permettront à coup sûr d’alléger les souffrances des mille âmes qui vivent dans ce village.

EMMANUEL BOUBA YANGA (KOLDA)

 

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