Publié le 3 Apr 2019 - 00:40
LE MARIAGE AVEC DISPARITÉ DE CULTE

La position de l’Eglise catholique 

 

Le mariage avec disparité de culte ou catholico-musulman devient de plus en plus fréquent au Sénégal. Selon abbé Roger Gomis, celui-ci est interdit par l'Eglise catholique. Mais si un couple arrive à remplir les conditions de le faire, ce mariage est valide, mais n’a pas de valeur sacramentelle.

 

Beaucoup de gens parlent de mariage mixte, quand un catholique et un musulman se marient. Mais, selon abbé Roger Gomis, il faut d’abord procéder à une rectification. Car, selon le prêtre du diocèse de Dakar, le terme "mariage mixte" ne désigne pas un mariage entre une partie catholique et une partie musulmane. Il ne s’applique qu’aux mariages entre chrétiens de différentes confessions, c’est-à-dire entre baptisés appartenant aux Eglises catholique, orthodoxe ou protestante. "Le mariage entre une personne catholique et une autre non baptisée, qui peut être d’une autre religion et même athée, est appelé mariage avec disparité de culte", précise abbé Gomis. A l'en croire, dans un pays comme le Sénégal, le mariage avec disparité de culte est bien fréquent. Mais, prévient le religieux, une telle pratique exige prudence, clarté et surtout une conscience réaffirmée de l’identité chrétienne et de la vision catholique concernant le mariage et la famille.

Le mariage est un mystère ecclésial

Ainsi, abbé Roger Gomis indique la position de l'église et les conditions dans lesquelles ces mariages peuvent être célébrés. Citant les propos de Mgr Jean Laffitte, il souligne que ce n’est pas si simple d’aimer quelqu’un qui ne partage pas la même appartenance religieuse. A cause d'éventuelles implications possibles, le chrétien qui veut participer activement à la vie de foi doit se demander si son conjoint n’entrave pas sa pratique religieuse. "La foi catholique relie le mariage à un mystère qui est plus grand, à savoir celui de l’union entre le Christ époux et l’Eglise épouse. Pour les catholiques, le mariage est le septième sacrement et il ne représente donc pas seulement un signe de la volonté de l’union entre les deux mariés, mais le signe efficace de l’union du Christ avec l’Eglise et du baptisé avec le Christ", développe le religieux.

Abbé Gomis précise, en outre, que pour l’Eglise catholique, le mariage n’est pas seulement l’union entre un homme et une femme, mais un mystère ecclésial. "Lorsque l’on se marie avec une personne de confession différente, il faut se poser les questions suivantes à l’avance pour la pratique du culte : quelles seront les manières familiales de vivre la foi chrétienne à travers, par exemple, la prière commune ou la confession dans laquelle les enfants seront baptisés et éduqués. Ce qui représente un sujet de vie conjugale très important, qui ne peut certes pas être relégué dans l’indécision et renvoyé à la vie familiale, après les noces".

L'Eglise catholique interdit le mariage avec disparité de culte

En effet, selon abbé Roger Gomis, la plupart des problèmes surviennent au fil du temps, après des années de vie conjugale, tels que les conflits sur l’éducation des enfants, la conception de la femme ou tout simplement la différente ferveur religieuse des deux conjoints envers leur propre foi. C’est donc, précise-t-il, en raison notamment des conséquences qui en dérivent au plan religieux, culturel, social et au niveau du dialogue interreligieux, que l’Eglise catholique romaine n’encourage pas les mariages avec disparité de culte. "Ce mariage est même en principe interdit. Car la disparité de culte fait partie des empêchements dits dirimants. C'est-à-dire des empêchements qui rendent le mariage nul. Le droit canonique dit : qu'est invalide le mariage entre deux personnes dont l’une a été baptisée dans l’Eglise catholique ou reçue dans cette église et ne l’a pas quittée par un acte formel, et l’autre n’a pas été baptisée", précise le prêtre.

Ce qui n’empêche pas, toutefois, l’Eglise catholique de respecter le choix d’un couple pour un mariage catholico-musulman et de lui proposer une aide, dans le cadre d’une pastorale du discernement qui aboutit à la dispense canonique. Selon lui, c'est une procédure qui consiste à lever l’obstacle, en donnant l’autorisation à la partie catholique de contracter ce mariage, au nom du droit au mariage que l’église reconnaît à toute personne et au nom de la liberté religieuse déclarée par celle-ci au Concile Vatican II.

Les conditions pour reconnaître le mariage avec disparité de culte

Il n’est pas si facile, pour l'église, de reconnaître le mariage avec disparité de culte. Mais, explique abbé Roger Gomis, si un (e) catholique veut que l’Eglise catholique romaine reconnaisse son mariage avec un (e) partenaire musulman (e), l’intention de mariage doit être annoncée à la paroisse compétente (domicile du partenaire catholique) pour la préparation du dossier de mariage avec disparité de culte. De l'avis du prêtre, un tel mariage doit donc bénéficier de l’autorisation expresse (le terme technique est ‘’dispense d’empêchement de disparité de culte", de l’Ordinaire du lieu (évêque ou son délégué).  "Le canon 1125 stipule que cette autorisation ne sera accordée que si certaines conditions sont remplies". Il faut, entre autres, que la partie catholique déclare qu’elle est prête à écarter les dangers d’abandon de la foi et promet sincèrement de faire tout son possible pour que tous les enfants soient baptisés et éduqués dans l’Église catholique.

Il s’agit, également pour la partie catholique, de se donner les moyens d’une vie spirituelle régulière, en gardant le contact avec sa communauté d’origine, assumant sa responsabilité dans la vie spirituelle du couple, témoignant aussi de sa foi et en veillant avec sérieux à l’éducation religieuse des enfants. "L’autre partie sera informée à temps de ces promesses que doit faire la partie catholique, de telle sorte qu’il soit établi qu’elle connaît vraiment la promesse et l’obligation de la partie catholique. Les deux parties doivent être instruites des fins et des propriétés essentielles du mariage, qui ne doivent être exclues ni par l’un ni par l’autre des contractants", informe le religieux.

Liberté de consentement, indissolubilité du mariage, fidélité…

En outre, le prêtre a précisé que l’église n'impose pas le baptême, mais demande au non-baptisé d'être en accord avec les quatre "piliers" du mariage chrétien, à savoir : la liberté de consentement, l'indissolubilité du mariage, la fidélité et la procréation, et l’éducation des enfants ainsi que l'ouverture vers les autres. 

Dans le cas d’un mariage entre catholique et musulman, a souligné le prêtre, il faut vérifier en particulier que le partenaire musulman est prêt à rester fidèle à un seul conjoint et à vouloir son bien, et que le partenaire catholique déclare son attachement à l’indissolubilité de son union. "Il faut signaler, enfin, qu’un tel mariage est reconnu comme valide par l’Eglise catholique, mais que le mariage lui-même entre une personne baptisée et une autre non baptisée n’a pas valeur sacramentelle", précise abbé Roger Gomis.

VIVIANE DIATTA

 

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