Publié le 21 Dec 2017 - 19:39
LENTEURS AU PORT DE DAKAR

Les explications de Dubaï Port Word

 

Les difficultés de faire sortir un container du Port autonome de Dakar n’est pas de la responsabilité de Dubaï Port World. C’est, en substance, le message de la société manutentionnaire, lors d’une journée de partage avec la presse organisée hier au terminal. Les responsables de l’entreprise estiment que la seule solution, face à la congestion, est de délocaliser le port.

 

Le Port autonome de Dakar connait actuellement des difficultés de fluidité. Lors du dernier Conseil présidentiel sur l’investissement comme dernièrement au palais, le patronat s’en est plaint auprès du président de la République. Les transporteurs également étaient en grève. Assez pour que les dirigeants de Dubaï Port World (Dpw) brisent leur long silence. Ils ont organisé hier une journée de partage avec la presse pour expliquer que leur société n’est en rien responsable des lenteurs au port. ‘’Un camion, à partir du moment où il franchit la porte d’entrée (du terminal), il passe en moyenne 26 minutes pour prendre son container et sortir’’, assure le directeur général de Dpw Sénégal, Assane Diop. Si l’on en croit ce dernier, de gros investissements d’un montant de 125 milliards de francs Cfa ont été faits depuis l’arrivée de la société, en janvier 2008. Un aménagement des lieux, l’utilisation de haute technologie et de l’informatique ont permis, selon lui, d’améliorer sensiblement le service.

Le problème, dit-il, découle de la congestion qui a lieu en amont, du fait que l’environnement portuaire n’offre qu’une seule porte d’entrée. Or, le nombre de camions est important. A titre indicatif, le terminal de containers de Dpw, à lui seul, connait environ 900 mouvements par jour, pouvant atteindre un pic de 1 400 mouvements à certains moments de l’année  (ramadan et Tabaski). Cette situation oblige les camions à se mettre dans de longues queues avant d’arriver au rond-point donnant l’accès au port. Si l’on en croit le directeur commercial Fulgence Deguenonvo, la question a été posée depuis plusieurs années. Il y a de cela deux ans, la réflexion a été menée avec différentes approches de solution. Mais, depuis lors, tout est resté lettre morte.

Parmi les explications, il y a aussi la faillite de la société des chemins de fer. Le Mali est le premier partenaire du port de Dakar, Dpw en particulier. Bamako représente 30 % des volumes de containers qui sortent de ce quai. Selon M. Deguenonvo, 90 % des débarquements destinés à ce pays frontalier se font au terminal de Dpw. Or, précise justement le directeur commercial, jusqu’en 2015, le trafic ferroviaire prenait 40 à 45 % du transport. Aujourd’hui, le rail ne représente que 5 à 6 % du trafic. En d’autres termes, il faut plus de camions pour acheminer les containers. ‘’Ça  explique également les difficultés, parce qu’avec le train, c’est plus de sécurité, plus de fluidité et plus de rapidité’’, souligne-t-il.

Ainsi, avec l’accumulation des containers  du  fait de la difficulté de les évacuer, le port atteint progressivement ses capacités de stockage. M. Deguenonvo regrette que la durée moyenne d’attente d’un container soit de 21 à 22 jours à Dakar, alors que la durée standard est de 5 jours. De ce fait, le terminal de Dpw est occupé à 65, voire 70 %. Pendant la période de la Tabaski, il est allé jusqu’à 91 %, alors que la norme mondiale est de 75 %, limite à partir de laquelle il est  considéré que le lieu est saturé pour l’activité. Dpw affirme que d’ici deux ans, il ne pourra plus opérer sur place.

Démarrage des travaux du port de Ndayane

Par ailleurs, les patrons avaient également dénoncé les longues attentes des navires qui causaient même des ruptures en matières premières importées. Le directeur commercial reconnait que sur les trois derniers mois, dans le cadre des investissements destinés à améliorer les capacités de rotation des navires, seule une partie du quai a été exploitable pendant plusieurs semaines. De ce  fait, il n’y a qu’un navire qui pouvait être déchargé à la place de deux ou trois habituellement. Une étape aujourd’hui dépassée. Selon M. Deguenonvo, une solution d’accostage en fenêtre a été proposée aux armateurs. C’est-à-dire qu’on fixe à chacun un jour, avec une heure précise où son bateau sera déchargé. ‘’Lorsqu’un navire ne vient pas dans les délais impartis, naturellement, il est obligé d’attendre pour rattraper la queue. Cela peut prendre plusieurs jours. Ça peut expliquer les attentes en rade’’.

Mais même à ce niveau, quelles que soient les performances opérationnelles côté navire, la situation actuelle risque de perdurer, si les mêmes performances ne sont pas enregistrées en entrées et sorties côté terre. ‘’Si nous avons un flux de containers déchargés à l’import qui est largement supérieur à ce qui sort dans une journée, il va de soi qu’à un certain moment, on va dans une situation de blocage et on ne pourra plus réceptionner les containers des navires’’, souligne M. Deguenonvo. La Direction générale du port a essayé de trouver une solution, en proposant un terrain appartenant à la Sonacos pour abriter les containers vides.

En effet, la grève des transporteurs s’expliquait essentiellement par le fait que les camions ne trouvaient plus un espace pour déposer les containers. Une solution a été donc trouvée pour lever le mot d’ordre. Mais Dpw reste convaincue que ce ne sont que des palliatifs, la seule solution étant de migrer ailleurs. ‘’On le dit et on le répète, la solution définitive pour régler la question de la congestion, c’est le transfert des activités du port de Dakar vers Ndayane (département de Mbour, à 70 km de Dakar), le site du nouveau port’’, affirme M. Deguenonvo. La construction de ce port du futur a été confiée à Dpw.

 Selon son directeur général Assane Diop, les études d’impact sont avancées. Les travaux vont démarrer au quatrième trimestre 2018 pour un démarrage effectif des activités en fin 2021. Le  financement du projet n’a pas été dévoilé, Dpw promettant de communiquer sur le sujet ultérieurement.   

BABACAR WILLANE

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