Publié le 9 Jun 2012 - 08:56
LES ARCHIVES

Un facteur de développement humain

 

La célébration de la journée internationale des archives qui intervient le 09 juin de chaque année, est une opportunité pour les professionnels de l’archivage de vulgariser les vertus de ce secteur dont la contribution au développement est inestimable. Hélas, la situation des archives reste encore préoccupante pour ce qui est de la prise en charge des exigences liées à sa gestion et de son adaptation aux technologies de l’information, particulièrement dans les pays en développement. Nous nous inspirons d’une étude parue en 1985, de Wilfred I. SMITH (1919- 1998, Archiviste du Dominion au Canada- de 1970 à 1985), pour exprimer une réflexion sur la valeur des archives.

 

Les institutions génèrent de l’information au cours de leur existence, ces informations qui sont consignées dans divers supports, constituent un terreau pour réaliser leur évolution. «Les archives sont un trésor administratif, un patrimoine culturel, un miroir du passé, une mémoire collective» ; si nous considérons ces seuls intérêts, il devient obligatoire de veiller à leur bonne conservation.

 

La gestion des documents peut accroître l'efficacité du gouvernement et de l'administration, en particulier celle des ministères et services responsables du développement économique. Il est difficile de mesurer, quantitativement ou qualitativement, l'impact global de la gestion des documents sur l'efficacité administrative, mais on peut souvent mesurer au moins son impact financier. L'introduction des tableaux de tri, qui permettent l'élimination régulière des documents obsolètes, et des dépôts de pré- archivage pour les dossiers 'en sommeil', permettent de réaliser des économies substantielles. La gestion rationnelle de l’espace devenu très précieuse dans les grandes métropoles, le coût du personnel et de l'équipement dans les bureaux avec celui d'un dépôt de pré-archivage montre clairement l'économie obtenue par le pré- archivage des dossiers. Les documents qui ont une valeur permanente pour le développement ou pour d'autres buts peuvent être identifiés et transférés dans des dépôts afin d'y être conservés.

 

L'information contenue dans les archives est d'utilité pratique pour tout projet de développement. Il est évident que le recours aux expériences déjà faites, au lieu de recommencer celles-ci, permet d'économiser le temps, l'argent et le travail. L'intérêt des archives pour les programmes de développement notamment dans le domaine de la planification et de la recherche opérationnelle, est indéniable. La perte des documents relatifs aux expériences déjà étudiées entraîne une longue et coûteuse répétition de ces mêmes travaux.

 

 

Utilité pratique

 

L'industrialisation nécessite l'étude approfondie de nombreux facteurs différents, dont l'ensemble permet de déterminer les investissements souhaitables. Les archives sont utiles pour étudier ces facteurs sur de longues périodes de temps. L'infrastructure -routes, chemins de fer, canaux, ports, etc. - est essentielle pour le développement de l'économie : là encore, l'utilisation des anciennes cartes et des anciens relevés permet de faciliter le choix des sites, les constructions, les réparations. « La construction rapide d'une digue à Madagascar a été rendue possible grâce à la conservation de vieux dossiers retrouvés par le personnel des archives. A l'inverse, la perte des dossiers relatifs à la construction d'une route au Ghana a entraîné une dépense d'un demi-million de dollars pour reconstituer les documents perdus».

 

Les archives sont d'un intérêt particulier pour la planification à long terme, qui nécessite l'utilisation de données présentes et passées pour prévoir l'avenir. De telles projections sont d'autant plus fiables qu'on dispose de documents s'étendant sur de longues périodes. Même si aucun document du passé n'était conservé, il n'en serait pas moins nécessaire pour les institutions de conserver certaines catégories de dossiers actuels en vue d'une utilisation future. Un service d'archives se justifie même s'il ne s'agit que de l'avenir.

 

Les actes judiciaires font l’objet de la production de plusieurs documents qui permettent de suivre l’évolution de la criminalité, mais aussi de constituer une documentation en matière de jurisprudence pour orienter les décisions. Ces informations qui participent de la continuité de l’action de ce pouvoir très sensible peuvent être considérées comme sa sève nourricière.

 

 

Archives et bonne gouvernance

 

De grands travaux anthropologiques qui ont été réalisés à l’époque coloniale, sont encore conservés au musée Théodore Monod de l’IFAN. Ils renseignent sur les peuples et leur civilisation ; et sont en mesure de nous faire comprendre l’unité culturelle du peuple africain que la balkanisation a disloqué. La recherche de ces informations aiderait à la promotion de la renaissance et peut aider à l’avènement de l’unité africaine (...)

 

Les institutions qui soutiennent les pays en développement devraient insister sur une bonne tenue des archives comme principe de bonne gouvernance, puisqu’elle permet d’assurer la traçabilité des actions menées lors du processus de gestion. Le Manuel des Nations Unies de 1961 constatait que "l'amélioration de l'administration est la condition sine qua non pour la réalisation des programmes de développement". Or, la clef d'une bonne administration est la gestion des documents, c'est-à-dire la bonne gestion de l'information. L'adoption de bons systèmes de classement permet de retrouver rapidement les documents nécessaires pour prendre les décisions ou pour améliorer l'efficacité de l'administration. Par exemple, l'introduction d'un nouveau système de classement a permis, dans un cas précis, de réduire le temps de recherche d'un document. En contraste, on peut citer des exemples où des journées et même des semaines entières ont été passées à chercher dans des dossiers en désordre ou même à refaire des études qu'on n'arrivait plus à retrouver. Ainsi, les archivistes doivent convaincre les décideurs de l’utilité d'un système de management de l’information efficient, et montrer qu'un modeste investissement en personnel, en formation et en équipement peut leur permettre de réaliser un bond économique substantiel.

 

 

Compétitivité et efficacité

 

L’ignorance et/ou la négligence des avantages que les archives sont en mesure d’offrir, constitue un blocage majeur pour la considération dont elles doivent faire l’objet. Si dans les pays occidentaux, la valeur de l’information documentaire est une réalité évidente ; la situation est tout autre chez les africains. En effet, dans les pays en développement, les documents connaissent bien souvent une gestion primitive qui limite à une portion congrue leur participation au développement. De nombreuses raisons que nous ne saurions totalement citer, sont invoquées dans les pays en développement, pour reléguer les archives au bas niveau des priorités. L’on peut en retenir parmi celles- ci : le besoin urgent de développement économique, le besoin d'améliorer le niveau de vie, le besoin en éducation et formation pour fournir des cadres professionnels et techniques etc.

 

Au XXIe siècle, la modernisation des systèmes d’information se pose avec acuité, en raison du flux documentaire et des exigences du respect des délais d’exécution liées à une société de plus en plus concurrentielle. C’est pourquoi il s’avère nécessaire d’intégrer les TIC (technologie de l’information et de la communication), dans la gestion de l’information documentaire. En effet les contraintes liées à la compétitivité et à l’efficacité dans toute activité de gestion, sont suffisantes pour amener les institutions à faire usage des moyens modernes comme la GED (gestion électronique des documents) afin de parfaire leurs systèmes d’administration de l’information.

 

Samba Camara, Archiviste

Bibliographie

(http://www.unesco.org/webworld/ramp/html/r8532f/r8532f08.htm)

 

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