Publié le 25 Jun 2016 - 19:08
LIBERATION DE KARIM WADE

La séance d’explication de Me Sidiki Kaba 

 

Depuis avant-hier nuit, Karim Meïssa Wade hume l’air de la liberté. Mais il le fera sans beaucoup d’argent, puisque bénéficiant juste d’une grâce, après 3 ans d’emprisonnement. Il est donc tenu de payer, entre autres, l’amende arrêtée par le juge, lors de sa condamnation. Il en est de même pour ses coïnculpés que sont Ibrahim Aboukhalil dit Bibo Bourgi et Alioune Samba Diassé, selon le Garde des Sceaux, ministre de la justice Sidiki Kaba qui a fait face à la presse, hier.

 

Le ministre de la justice, Garde des Sceaux est monté au créneau, hier, lendemain de la libération de Karim Wade, pour communiquer sur les tenants et les aboutissants de cet élargissement controversé. Me Sidiki Kaba a tenu, d’emblée, à préciser que si l’ex-ministre d’Etat et ses deux complices Ibrahim Aboukhalil et Alioune Samba Diassé ont bénéficié de la grâce présidentielle, c’est eu égard à des ‘’considérations d’humanité et d’équité’’. Le Garde des Sceaux faisait face à la presse, dans la salle de conférence du département qu’il dirige. ‘’Il faudrait préciser que la remise partielle de la peine d’emprisonnement qui leur est accordée n’efface pas la condamnation qui figure toujours dans leurs casiers judiciaires. 

Il en est de même, en l’espèce, des peines d’amendes, des intérêts civils et des biens confisqués qui concernent le préjudice subi par l’Etat. Leur recouvrement sera poursuivi, tant au niveau national qu’international, par l’agent judiciaire de l’Etat qui s’y attelle déjà activement’’, a-t-il fait savoir. Ainsi, Karim Meïssa Wade et Cie ne jouissent que de leur liberté, avec cette grâce. Car, Wade fils, par exemple, a actuellement l’obligation de payer la somme de 10 milliards à titre de dommages et intérêts, arrêtée lors de sa condamnation à 6 ans de prison en sus de l’amende de 138 milliards 239 millions 86 mille 396 F Cfa, ainsi que la confiscation de ses biens. ‘’C’est une décision de justice, il faut s’y conformer’’, a indiqué Me Kaba.

Ces précisions faites, le ministre a annoncé que les procédures se poursuivent. Il a annoncé la présence, en France, des avocats de l’Etat pour défendre les intérêts du Sénégal. Me Sidiki Kaba renseigne qu’actuellement, il y a même une procédure à Monaco et une autre ‘’procédure exécutoire’’ est prévue, le 27 juin prochain à Paris. ‘’Beaucoup de biens sont saisis. Maintenant, il s’agit de permettre à la justice française de valider les requêtes de l’Etat du Sénégal’’, a-t-il indiqué.  Et ce n’est pas qu’en France où l’Etat du Sénégal essaie de recouvrer certains biens. Il y a différentes commissions rogatoires. Seulement, il n’est pas facile de récupérer l’argent caché dans les banques des pays du Nord. En effet, on oppose aux vérificateurs le prétexte du secret bancaire, selon M. Kaba.

Par ailleurs, beaucoup ont trouvé incongrue l’heure à laquelle Karim Meïssa Wade a été libéré. Cela se serait fait pourtant naturellement, selon l’hôte des journalistes. ‘’Il n’y a eu aucune volonté de le faire nuitamment’’, a-t-il assuré. A l’en croire, il y a toute une procédure à respecter dans le décret de grâce, avant son exécution. Après la prise de la décision et signature du décret, il est envoyé au ministère de la justice pour enregistrement, puis à l’administration pénitentiaire pour exécution. ‘’Dès l’instant que vous avez ce décret, la direction de l’administration pénitentiaire de l’Etat doit l’exécuter. Cela peut être de jour comme de nuit’’, a-t-il affirmé.

L’énigme du Procureur de Qatar 

Aussi, dès sa sortie, Karim Wade se serait envolé aux bords d’un jet privé pour le Qatar. Mais, Me Sidiki Kaba n’a pas voulu s’avancer sur la question. Il laisse à la presse le soin de faire ‘’ses investigations’’ pour trouver la réponse à cette question. Quoi qu’il en soit, ‘’dès l’instant où Karim Wade a franchi la porte de Rebeuss, il est libre d’aller où il veut. Là où il est n’est plus la question de l’Etat du Sénégal. Il peut être partout, parce qu’il est libre’’, a-t-il lancé. Où il veut avec qui il veut, comme le Procureur de Qatar ? M. Kaba a éludé cette question, préférant s’en tenir à la simple explication qu’il n’y a eu, en aucun cas, des négociations pour la libération de Karim Wade.

Il a même essayé de démonter les arguments de ceux qui soutiennent également qu’il y a des calculs politiques dans cette affaire. M. Kaba pense que si le Président Sall voyait en Karim un candidat qui pourrait lui faire ombrage à la prochaine présidentielle, il ne l’aurait pas élargi de prison. Il le laisserait y croupir jusqu’en avril 2019, après les échéances de février de la même année. Avant d’ajouter : ‘’Ce n’est mentionné nulle part dans la décision rendue qu’il y a une suppression de ses droits politiques.’’ Par conséquent, en 2019, Karim Wade peut se présenter à la présidentielle, s’il le souhaite et briguer les suffrages des Sénégalais, si le Conseil constitutionnel valide sa candidature. 

TRAQUE DES BIENS MAL ACQUIS DE KARIM WADE ET CIE

50 milliards récupérés par l’Etat du Sénégal

Pas plus tard que le 23 juin passé, le mouvement Y en a marre demandait la transparence dans le recouvrement des biens mal acquis de certains dignitaires de l’ancien régime. Leur demande a été entendue par le Garde des Sceaux, ministre de la justice, Sidiki Kaba. Face à la presse hier, suite à la libération par grâce présidentielle de Karim Meissa Wade, il a fait un premier point sur la question. ‘’En ce qui concerne les personnes dont nous parlons aujourd’hui, au moins 50 milliards ont été recouvrés’’, a-t-il assuré. Il a promis que l’agent judiciaire de l’Etat va faire le point prochainement sur cette manne recouvrée, en y revenant plus en détails. ‘’Nous ferons le point pour dire le montant global qui a été recouvré, pour montrer que toutes ces procédures ne sont pas inutiles’’, a-t-il annoncé.

50 milliards déjà, en attendant d’autres rentrées. Mais certains s’offusquent que quelqu’un qui a autant volé soit gracié. Il est même avancé que c’est la première fois, dans l’histoire du Sénégal, qu’un criminel financier ait ce privilège. C’est mal connaître l’histoire de ce pays, selon M. Kaba. ‘’Il faut retourner aux décrets de grâce, depuis le Président Senghor. Chaque année, des citoyens de tous bords bénéficient de la grâce. Il faut regarder ces décrets qui sont dans le journal officiel et les compiler et vous verrez que nous ne nous retrouvons pas dans ce seul cas’’, a-t-il affirmé.

B.BOB

 

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