Publié le 2 Jul 2015 - 21:22
LICENCIEMENT DU MEDECIN-CHEF DU CENTRE DE SANTE DE GRAND DAKAR

Ses collègues exigent son rétablissement sans condition

Docteur Mbaye Paye 

 

Le collectif des médecins-chefs des centres de santé du département de Dakar demande le rétablissement de leur collègue du centre de santé de Grand Dakar licencié par le maire de la commune. Il menace d’aller en débrayage, si le problème n’est pas réglé.

 

C’est un collectif des médecins-chefs des centres de santé du département de Dakar très en colère qui a fait face hier à la presse. Il ne demande qu’une chose, le rétablissement sans condition de leur collègue du centre de santé de Grand Dakar licencié depuis le 12 juin, par le maire de la commune Jean Baptiste Diouf, dans ses droits. Et ce, dans les plus brefs délais. Il menace de paralyser le système si le problème n’est pas réglé. ‘’Nous dénions au maire de la commune le droit de licencier arbitrairement un fonctionnaire de l’administration sénégalaise, surtout quand il utilise des prétextes aussi fallacieux que ceux qu’il a mis en avant’’, a fustigé Docteur Mbaye Paye, porte-parole du jour. ‘’Comment un maire d’une commune peut-il licencier un médecin, sous prétexte qu’il a refusé de congédier deux agents de santé communautaires qui relèvent de l’autorité du comité de santé, dans le cadre du dispositif de mobilisation des ressources communautaires au profit de la santé ?’’ s’interroge-t-il.

Ainsi, le collectif demande ‘’la suspension du redéploiement des travailleurs municipaux aux nouvelles communes qui est une substitution d’employeur, et notre réintégration à la Ville de Dakar qui est notre employeur. Mais aussi, nous voulons l’amélioration de nos conditions de travail et de vie et le respect des droits et libertés’’. Selon lui, l’article 44 du titre V de la loi n°2011-08 du 30 mars 2011 relative au statut général des fonctionnaires des collectivités locales stipule que les sanctions des premiers et deuxièmes degrés sont prononcées sans consultation du conseil de discipline. Mais auparavant, le fonctionnaire est mis à même de présenter par écrit ses explications sur les faits qui lui sont reprochés.

En outre, Docteur Mbaye Paye précise que le transfert de compétence santé aux collectivités locales ne peut, en aucune manière, vouloir dire que les maires de commune, même au cas où ils seraient des professionnels de la santé, sont chargés de la gestion quotidienne des structures sanitaires. Pour Docteur Maguette Ndiaye, médecin-chef du centre de santé Gaspard Camara, cet acte posé par le maire découle de son incompréhension manifeste des textes de la décentralisation. ‘’Il ne connaît rien et nous doutons même de sa gestion de la mairie. Il ignore totalement les dispositifs réglementaires de l’acte III de la décentralisation. Le personnel de santé n’est pas en sécurité et nous allons lutter contre lui’’, fulmine-t-il.

L’acte III au banc des accusés

La conférence de presse a aussi été une occasion pour faire le procès de l’Acte III de la décentration qui, selon Docteur Mbaye Paye, est à l’origine de tout ce problème. Il estime que cette nouvelle politique, dont l’idée peut être jugée bonne, a été précipitée et n’est pas cohérente dans ses principes et pas performante dans sa mise en œuvre. Une thèse soutenue par le secrétaire général adjoint de la fédération générale des travailleurs du Sénégal (FGTS), Mamadou Cissokho, qui estime que l’Etat a failli avec cette réforme. A l’en croire, cet acte III de la décentralisation n’est rien d’autre qu’un recul de la démocratie. Car depuis sa mise sur pied, les travailleurs des collectivités locales ne font que vivre un calvaire.

‘’Elle a été faite dans l’impréparation la plus totale et dans la précipitation. Il n’y a pas eu d’étude d’impact ni rien. Cette réforme est venue désarticuler toute l’architecture des collectivités locales du Sénégal. Nous estimons qu’en responsable, normalement, ce qui devait se passer, c’est de discuter avec les acteurs, les impliquer pour voir les tenants et les aboutissants. Les conséquences sont là, c’est la précarité, l’absence de couverture dans la collectivité, dans la gestion même du personnel et tout ce qui s’ensuit, parce que les structures d’accueil n’étaient pas encore prêtes pour recevoir les travailleurs. Ce sont les communes d’arrondissement qui ont été érigées en commune de plein exercice. Certains maires ont dit qu’ils ne pourront plus payer les salaires, parce qu’ils n’ont pas cet argent’’, constate M. Ndiaye. Avec ses collègues, Mamadou Cissokho demande à ce qu’on retourne les travailleurs là où ils étaient. C'est-à-dire à la Ville de Dakar. ‘’Quand on commet une erreur, il faut avoir l’humilité de le reconnaître’’, dit-il.

VIVIANE DIATTA

 

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