Publié le 11 Mar 2016 - 23:02
LIGUE 1 - LE CONSULTANT TASSIROU DIALLO, SUR LA PHASE ALLER

‘’Sur le plan du jeu, c’est là que le bât blesse’’

 

A quelques jours de la reprise de la Ligue 1, l’ancien joueur de la Police, Tassirou Diallo, livre son analyse de la phase aller du championnat dans les colonnes du journal EnQuête. Le technicien a également donné son avis sur la seconde phase de l’élite qui va démarrer ce week-end.

 

Le championnat national de la Ligue 1 a bouclé sa phase aller avec 13 matches joués. L’As Douanes est championne à mi-parcours avec 21 points. Dans l’ensemble, quelle analyse faites-vous de cette première étape ?

‘’Le niveau du championnat ne satisfait pas totalement. Car l’écart entre la Linguère, qui est dernière (14 pts), et le leader As Douanes (21 pts), il n’y a que 7 longueurs. Ce qui veut dire que la situation peut changer. Si lors des trois prochains matches, la Linguère gagne, elle pourrait se retrouver en haut du classement. On tire par le bas. Sur le plan du jeu, c’est là que le bât blesse. J’ai eu l’impression, lors de cette première moitié de championnat de Ligue 1, que la majeure partie des équipes cherchaient plus à ne pas perdre qu’à gagner. Sur le plan de l’animation offensive et de la percussion de la défense, ça reste encore.

Pourriez-vous nous faire une lecture de la prestation des différentes équipes ?

L’As Douanes a été éliminée en Coupe de la Ligue (1-1, 4 tab 2) par le Guédiawaye FC, puis battue (2-1) par Dakar Sacré-Cœur au Trophée des champions, dimanche dernier. Les Gabelous ont inscrit 15 buts et en ont pris 10. Et tout récemment, après un 0-0 à domicile, l’As Douanes est partie jouer contre Horoya en Guinée où elle a pris 4 buts. Cela montre qu’au niveau de la défense, ça laisse à désirer. Ce n’est pas l’idéal pour le haut niveau, surtout pour une formation qui était engagée en compétition africaine. Après son retour, cette équipe continue à nous donner des sueurs froides. Le Ndiambour perd beaucoup de points en déplacement. Mais s’il devient un peu plus performant à ce niveau, il faudra compter avec lui pour la phase retour. C’est pareil aussi pour Mbour Petite Côte. Si l’équipe mbouroise contrôle son animation offensive et essaie de bien s’organiser en défense, elle va bousculer la hiérarchie de notre championnat.

L’Olympique de Ngor est en train de jouer les trouble-fêtes. C’est une équipe qui gagne contre de grandes écuries comme le Jaraaf. Mais lorsqu’il a en face une équipe de dimension inférieure, elle finit par perdre la rencontre. Le Stade de Mbour était bien placé mais s’est séparé de son coach, Ousseynou Sène. Ce dernier était dans le timing puisque comptant 18 points, à 3 longueurs du leader. Il n’a pas échoué car il est classé 4e. Il y a de l’indécis dans notre championnat. Il y a eu 4 ou 5 journées où Ndiambour était leader, Mbour Petite Côte, Linguère et Olympique de Ngor et Casa Sport aussi. Le Jaraaf, 2e  meilleure attaque avec 15 buts, à égalité avec l’As Douanes, a encaissé 19 buts. Cela explique aussi que nos équipes n’ont pas la constance. La Suneor aligne des paradoxes.

Elle est capable d’aller gagner à l’extérieur, notamment chez Ndiambour, Casa Sport, Diambars, et de perdre à domicile. On dit qu’un championnat se gagne à l’extérieur mais à domicile aussi. Si tu perds à domicile et que tu gagnes à l’extérieur, cela veut dire qu’il y a un problème global. C’est toutes nos équipes qui ont du mal à s’affirmer lors de certains matches décisifs. Dans un championnat, il y a des matches à ne pas perdre. La Suneor a perdu contre Douanes à domicile. Ce qui n’est pas normal car l’équipe de Diourbel sortait d’une victoire contre le Casa à Ziguinchor. Le Casa Sport est une équipe inconstante. Cette irrégularité s’explique par les départs de nombreux titulaires en début de saison. Le coach Demba Ramata Ndiaye fait jouer beaucoup de juniors. Si ces derniers parviennent à s’habituer au rythme, ils feront mal.

Qu’est-ce qui explique ces contreperformances ?

Les équipes ont du mal à garder leurs meilleurs joueurs. Chaque année, il y a 2 à 3 dans chaque club qui partent à l’étranger. Ils vont au Maroc, au Gabon, en Guinée. Ce sont ces mêmes clubs qui nous éliminent. Il y a des Gambiens qui ont du mal à s’imposer chez eux et qui sont titulaires dans certains de nos clubs. Si on ne parvient pas à garder nos footballeurs, on ne pourra pas faire des performances sur le plan africain. Il faut qu’on revoie notre football.

Les juniors ne jouent pas assez parce qu’un joueur doit avoir beaucoup de matches dans les jambes en venant dans l’élite. Il y a des joueurs qui quittent le ‘navétane’ alors qu’ils n’ont pas 30 matches. Au temps où les équipes comme la Police, le Jaraaf, l’Asfa, l’Us Gorée, etc. faisaient les beaux temps du football sénégalais, il y avait des équipes réserves espoir, junior. Toutes ces catégories étaient dans l’antichambre de l’équipe A. Il y a toujours quelqu’un pour remplacer le titulaire en cas d’indisponibilité. Aujourd’hui, si un Daouda Ndiaye Guèye à l’As Douanes n’est pas en forme, il n’y a pas son remplaçant.

Qu’avez-vous retenu de positif dans cette première moitié du championnat ?

Il faut saluer la performance des équipes qui occupe les 5 premières places. C’est le cas de l’As Douanes qui a 21 points, du Ndiambour (2e, 20 pts) qui vient de la Ligue 2 et Ngor (3e, 18 pts), Mbour Petite Côte (4e, 18 pts) et du Stade de Mbour (5e, 18 pts). Il ne faut pas aussi oublier le Casa Sport (6e, 17 pts).

Avez-vous relever des déceptions ?

Au chapitre des déceptions, il y a Diambars. C’est une académie de football, ce qui sous-entend que ses pensionnaires doivent pouvoir bien réciter les leçons footballistiques. Ce qui n’est pas le cas. C’est pareil également pour la Linguère. L’équipe saint-louisienne qu’on attendait à une meilleure position est lanterne rouge (14 pts). On peut mettre dans cette même catégorie le Jaraaf, Niary Tally et Suneor. Toutes les autres équipes sont à mettre dans la catégorie des trouble-fête.

Au plan des individualités, que peut-on retenir ?

Concernant les individualités, le niveau est moyen. Il y a eu beaucoup de détails, beaucoup d’arrêts de jeu. Il n’y a pas eu de rythme, pas d’animation. Sur le plan offensif, nos attaquants ne marquent pas beaucoup de buts. Le meilleur buteur compte 7 buts. Pour les révélations de cette phase aller, il y a Pape Djibril Ba de la Linguère, l’attaquant de Mbour Petite Côte, Benoît Toupane, qui marquent presque contre toutes les équipes. Au milieu de terrain, on a Boubacar Cissokho de la Suneor qui fait partie des meilleurs, tout comme Amadou Boiro du Casa Sport, Ousseynou Diouf de Ouakam, Nwachukwu Ugochukwu et Raul Mendy de Guédiawaye FC. On ne peut pas ne pas parler de Mamadou Aly Diouf de la Linguère, Alhassane Sylla de Diambars, Karifa Camara et Babacar Ndiaye de Ngor. Sans oublier la révélation de l’Us Gorée, Mor Nguer.

C’est un jeune joueur qui est en train de faire de belles choses. En défense, on a Diarga Fall du Ndiambour qui brille à chaque match. Pour les gardiens de buts, on retiendra Pape Seydou Ndiaye de Niary Tally, appelé en sélection nationale par Aliou Cissé. Il est monté en puissance depuis les Jeux africains avec les U23. Il y a aussi Pape Diatta Ndiaye de l’As Douanes et Khadim Thioub du Jaraaf qui nous donnent de la satisfaction. Il y a certains entraîneurs qui ont confirmé dans cette première partie du championnat et qui se sont relevés. A l’image de Sidaty Sarr qui, n’ayant pas encore de grands joueurs de talent dans son équipe, est en train de se positionner. On a Karim Séga Diouf et Boucounta Cissé qui sont deux vieux routiers de notre championnat. Sans oublier Abdou Karim Mané de Mbour Petite Côte, Demba Ramata Ndiaye du Casa et même Ousseynou Sène, malgré son limogeage à la tête du Stade de Mbour.

Comment voyez-vous la suite du championnat ? Avez-vous des favoris ?

La seconde partie du parcours sera beaucoup plus dure. Ce sera le cas pour tout le monde. On a vu que l’As Douanes a été éliminée de la Coupe de la Ligue. Il ne lui reste que le championnat et la Coupe du Sénégal. Les équipes se tiennent de près, à tel point que 2 revers suffisent pour se retrouver au fond du classement. A l’inverse, 2 succès suffisent pour se propulser devant. Il faut réorganiser notre football et l’exécution du jeu pour qu’il soit beaucoup plus rapide. Je dis qu’il n’y a pas de tueur dans le championnat sénégalais.

La plupart des joueurs ne regardent pas leurs adversaires jouer. Pour être un bon défenseur ou attaquant, il faut partir au stade regarder ses adversaires pour les matches à venir, pour connaître leur faiblesse et leur point fort. Mais ils ont tendance à voir le FC Barcelone ou le Real Madrid. Ce n’est pas une référence. Je veux dire par là que le joueur du championnat local doit suivre ses adversaires. Cela fait partie de la performance des joueurs. Il y a aussi le fait qu’on trouve des joueurs connectés sur facebook à des heures tardives alors qu’ils ont match le lendemain. Cela aussi dénote du manque de professionnalisme de nos joueurs.’’

LOUIS GEORGES DIATTA

 

Section: