Publié le 5 Mar 2018 - 20:51
LITTERATURE

De la magie enfouie entre les lignes

 

« La Révolte des infortunés » vous promène, sur 144 pages, le long d’un chemin fait de passions ardentes, d’amour noble, de convictions ancrées et inébranlables, de dignes renoncements et d’une subtile agressivité. Le tout forgé d’un art exquis et dans un style décapant. L’auteur, Ameth Guissé, fait montre d’un vrai talent d’orfèvre ; peut-être influencé en cela par son expertise des questions sur l’or noir, son domaine de prédilection.

Jean Fara, personnage principal du roman, né avec une cuiller d’or dans la bouche, a fait le choix de la substituer à une coque en bois. Cela pour ne pas seulement se solidariser de ses compatriotes, mais pour combattre la misère, le népotisme et la gabegie. Le bonhomme, avec ses quatre camarades « avant-gardistes », demande « que ce qui est alloué à tous revienne à tout le monde ». Pour cela, ils font face aux puissants dirigeants, ceux-là « qui se servent plus que de droit » et qui sont prompts à confondre les statuts d’élitistes et de privilégiés. Un combat mené avec dévotion et d’énormes sacrifices, mais qui a souffert de la mesquinerie de la force légitime et de l’insouciance des infortunés. 

Le cadre du roman heurte votre familiarité. Les faits évoqués dans une relative fiction invitent la réminiscence. Des personnages aux références, tout renvoie minutieusement à des bouts de notre histoire commune et récente. Les orientations suggérées en filigrane, et qui donnent au titre de l’ouvrage tout son sens, font de l’œuvre un manifeste sur lequel se baser pour dessiner un avenir radieux. Ameth Guissé n’incite pas à la subversion. Il propose plutôt des clefs pour nous libérer des chaines du système nocif et corrosif. Mais il faut lire entre les lignes pour le cerner. Comme pour pouvoir comprendre que ce qui a l’air d’une composition symphonique est en réalité une scène érotique enveloppée de pudeur et de virtuosité lyrique (PP 85-89).

« La Révolte des infortunés », édité en 2017 par les Editions L’Harmattan Sénégal, est le quatrième ouvrage de son auteur. Il se révèle également comme la suite d’ »Une mort magnifique » (2013). Ce dernier lui a valu le grand Prix Cheikh Hamidou Kane pour le roman africain en 2016.

                                                                          Mamadou Oumar KAMARA

 

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