Publié le 25 May 2017 - 14:10
LUTTE CONTRE LA MALNUTRITION

L’urgence de repenser ses politiques de nutrition

 

La malnutrition fait perdre aux pays africains 11% de leur Produit intérieur brut (Pib), selon le rapport 2016 sur la nutrition mondiale. Ainsi, le chef de la Division Nutrition et Alimentation au ministère de la Santé et de l’Action sociale, Dr Maty Diagne Camara, a appelé hier les pays africains, notamment ceux de l’Ouest et du Centre, à repenser leurs politiques de nutrition  pour lutter efficacement contre le phénomène.

 

Dakar a abrité hier un forum sur la nutrition qui a regroupé des experts et spécialistes de la question d’Afrique de l’Ouest et du Centre. Dans ces espaces, selon le Dr Ndèye Khady Touré, de la Cellule de Lutte contre la Malnutrition (Clm) du Sénégal, les pays font face à une triple menace que sont le retard de croissance, l’émaciation et le surpoids. ‘’Concernant le surpoids et la malnutrition aiguë, le taux de prévalence est de 5%. Cela veut dire que la situation est préoccupante par rapport au retard de croissance qui a atteint 35%. Ce qui constitue un problème sur lequel  nous devons réfléchir sur les actions pour pouvoir réduire de manière importante ce retard de croissance chez les enfants’’, a-t-elle indiqué.

Dr Ndèye Khady Touré a fait savoir qu’au niveau de l’Afrique de l’Ouest et du Centre, la prévalence augmente régulièrement, passant entre 1990 et 2014, de 20 à 28%. ‘’Concernant les femmes en âge de reproduction, on se rend compte qu’en dehors du Cap-Vert, la plupart des pays ont atteint le seuil critique 40% pour lequel l’OMS dit que la malnutrition constitue un problème de santé publique. Alors que cette  prévalence est de plus de 50% pour certains pays. Pour ce qui est du surpoids et de l’obésité, on se rend compte que les prévalences restent encore très élevées. En dehors du Niger, tous les pays, sont dans une situation élevée’’, a-t-elle ajouté.

Pour ainsi trouver des solutions adéquates à ces équations, le chef de la Division Nutrition et Alimentation au ministère de la Santé et de l’Action sociale, Dr Maty Diagne Camara, a préconisé une révision des politiques mises en place par les Etats. ‘’Nous pensons simplement, qu’il faut repenser les politiques de nutrition dans nos pays en développement, en tenant en compte du double facteur nutritionnel. En effet, le monde connaît aujourd’hui deux formes de malnutrition qui semblent être en apparence contradictoires. La sous-nutrition qui indique les carences en micronutriment et la surnutrition généralement marquée par un surpoids’’, a-t-elle affirmé.

En général, poursuit la représentante d’Awa Marie Coll Seck, la problématique de la malnutrition dans ces parties du continent est abordée par une majorité d’acteurs tiers, notamment des organisations internationales et ONG. Elle a aussi souligné que ‘’les pays risquent de ne pas atteindre les Objectifs de développement durable, avec près de 159 millions d’enfants de 0 à 5 ans en retard de croissance’’, avec les défis nutritionnels auxquels ils font actuellement face. Dr Maty Diagne Camara a ainsi relevé que 50% des femmes en âge de procréer sont anémiées, 38% sont en sous poids et 15% sont obèses.

Le défi du financement

L’autre obstacle sur lequel butent les pays d’Afrique et du Centre, c’est le financement de la nutrition, souligne par ailleurs Dr Ndèye Khady Touré. ‘’Elle est financée plus par les partenaires au développement que les gouvernements. Les sommes qui sont allouées au secteur sont généralement faibles au sein des pays. L’autre aspect, c’est la cohérence des politiques. Il faudrait que les gouvernements puissent avoir des politiques cohérentes dans les projets de nutrition’’,  préconise la spécialiste de la nutrition du Clm. Aujourd’hui, estime Dr Touré, si les gouvernements veulent avoir un impact sur les communautés, particulièrement sur les cibles vulnérables, il faudrait que la couverture des interventions sur la nutrition puisse atteindre plus de 80% de la population.

‘’Par rapport à l’alimentation des enfants, la fréquence est correcte pour l’ensemble des pays. Mais la diversification alimentaire et le régime minimum acceptable, tous les pays n’ont pas encore atteint un niveau considérable pour avoir un impact sur la croissance des enfants’’, dit-elle. Dès lors, Dr Ndèye Khady Touré plaide pour que les gouvernements s’engagent davantage dans la lutte contre la malnutrition, en définissant des cibles nationales. Mais aussi pour qu’en fonction des défis nutritionnels, de la prévalence, chaque pays puisse définir une cible à atteindre. ‘’Cela nécessite en même temps la signature et la ratification des différents engagements internationaux. Il est obligatoire d’avoir des systèmes alimentaires durables qui permettent aux populations de s’alimenter de manière efficace’’, souligne-t-elle.

Pour sa part, l’administrateur général de Nestlé Sénégal, Xavier Beraud, a admis que les questions liées aux défis nutritionnels doivent interpeller tout un chacun. Il s’agit, pour lui, d’une responsabilité à la fois individuelle, mais aussi collective. ‘’L’effort à faire en matière de formation nutritionnelle reste immense en Afrique. C’est pourquoi, le rôle fondamental des pouvoirs publics en matière de nutrition est de promouvoir l’éducation nutritionnelle au sein des populations en les sensibilisant sur les maladies liées à la malnutrition’’.

 L’administrateur général de Nestlé Sénégal d’assurer que pour accomplir cette tâche, les pouvoirs publics peuvent compter sur la collaboration des ONG, des entreprises privées, des médias et de la société civile. ‘’Nous devons tous faire des efforts pour arriver à travailler en synergie pour un partenariat multipartite, en vue d’obtenir des résultats probants’’, ajoute-t-il. Il faut noter que le forum sur la nutrition a été initié par Nestlé. 

MARIAMA DIEME

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