Publié le 16 Apr 2012 - 23:53
LUTTE - SUR LES TRACES BALLA GAYE 2

L’histoire d’Omar, la terreur

 

A 25 ans, Omar Sakho alias ''Balla Gaye 2'' va défier Yékini dimanche pour le titre de ''Roi'' des arènes. Avant ce rendez-vous attendu par tout le pays, EnQuête revient les pas d'un enfant ''terrible'' qui porte à juste titre le surnom ''Lion'' de Guédiawaye. Des nattes de l'école coranique à la table des champions de lutte, découvrez la terreur Omar Sakho, devenu Balla Gaye 2.

 

Sa vie est un roman qui s'écrirait en mille et une pages. Et dont la moitié des feuilles pourraient être consacrées à une enfance hors du commun. Car Omar Sakho alias ''Balla Gaye 2'' a marqué, d'une encre indélébile, les esprits des jeunes de sa génération dans le quartier de son enfance. À Guédiawaye, ses camarades gardent toujours en mémoire les moments d'une vie commune avec l'une des stars de l'arène sénégalaise. Chacun est prompt à sortir une anecdote sur Balla Gaye 2, ses passions, ses folies... Et comme si c'était hier, ils ont du mal à s'adapter à son pseudonyme Balla Gaye 2. C'est son nom à l'État-civil ''Omar'' qui sort toujours du bout des lèvres de ses amis, vieux et mamans qui ont vu ce garçon grandir. Et ils vous diront tous une chose : Omar Sakho avait beau essayer de se dessiner une trajectoire en dehors de l’arène, son destin de lutteur ne l’a jamais lâché.

 

 

"Tën" ou "Justo"

 

Omar Sakho, c'est une enfance pleine de vie, avec ses frasques. Une enfance caractérielle pendant laquelle le jeune garçon s'est particulièrement distingué. Jamais (ou presque) Omar ne passait toute une journée sans faire parler de lui. ''Il aimait lutter pour le plaisir. Maguette Sarr, un jeune du quartier, proposait 25 f CFA à Omar pour qu’il reste toute la journée sans se bagarrer. Mais il refusait toujours de prendre la pièce parce qu'il savait qu'il ne pouvait pas rester sage'', raconte le retraité Aliou Diabaye, président du Fan's Club Balla Gaye 2. Par moment, il était devenu le ''jouet'' de ses camarades qui l'ont affublé de surnoms aussi fraternels que moqueurs. ''On s'amusait à l'appeler Justo du nom d'un acteur du feuilleton ''Mademoiselle'' diffusée à la Rts en 1991'', se remémore Abdoulaye Diallo, un de ses fidèles compagnons. Les autres lui attribuaient le pseudonyme ''Tën''. Parce que, semble-t-il, Omar marchait toujours tête haute et buste droit. ''Chez nous, on l'appelait ''le fou'', parce qu'il était très têtu. Il était tellement courageux qu'il ne reculait devant rien, il touchait à tout mais il était réceptif aux conseils'', se souvient Malick Niang, un jeune considéré comme le frère jumeau du lutteur, parce qu'étant né à quelques mois d'intervalle. ''Qu'on l'appelle, entre nous, Justo ou Tën, ça ne le dérangeait nullement pas, dit Abdoulaye Diallo.

 

 

Fou de baby foot

 

Ce jeu fut le véritable dada d’Omar Sakho. C'est là que son caractère d'enfance s'est aussi le plus mis en évidence. Ayant une folle passion pour le baby foot et la Playstation, Balla Gaye 2 est capable de sécher les cours à l’école primaires pour une partie avec ses camarades. Mais le jeune homme de l'époque était tout sauf un joueur fairplay. Qu'il gagne ou qu'il perde, Omar s'emparait toujours de la mise. Ceux qui essayaient de l'en empêcher l'ont souvent payé cher. Car Omar n'hésitait pas à user de sa force pour faire régner sa loi. Ousmane Sy, un ami du Lion de Guédiawaye, l'a appris à ses dépens au début des années 2000. ''On est de la même génération, mais il était physiquement plus fort que nous. Omar n'aimait pas la défaite en baby foot. Un jour, je l'ai trouvé en train de jouer avec un ami qui s'appelle Soulèye Doolé qu'il avait vaincu d'ailleurs. Après sa victoire, Omar m'a sollicité pour une partie. On avait misé chacun 25 f CFA. Lorsque je l'ai battu, il m'a dit que je ne rentrerais pas avec son argent et dans la dispute, il m'a donné un coup de poing à l’œil qui s'est enflé par la suite. Je me suis précipité pour le dénoncer auprès de mon papa. Aujourd’hui, à chaque fois qu'on se rencontre, il ne cesse de me le rappeler : ''Tu avais l'habitude d'appeler ton papa au secours à chaque fois qu'on se bagarrait'', raconte-t-il. Comme avec Ousmane Sy, Balla Gaye 2 était une terreur, au point de susciter une peur chez ses amis. ''On n’osait pas jubiler après l'avoir battu'', informe un de ses amis d'enfance et lutteur, Ansoumana Touré surnommé ''Boy Socé''. Chacun craignait ensuite de l'affronter au baby foot dont il sortait toujours vainqueur de gré ou de force.

 

 

Avant-centre

 

''On croyait qu'il allait réussir dans le foot parce qu'il jouait très bien'', confie Khalifa Niang (29 ans). Avant-centre attitré du quartier Mbode 2 de Guédiawaye, Omar Sakho, avec ses coéquipiers, a sillonné tous les terrains de cette banlieue. Le jeune garçon de l'époque était aussi une terreur pour les adversaires de son équipe. ''Il était rare de nous voir terminer un match en beauté. Quand on perdait, il faisait tout pour récupérer notre argent. Finalement, on avait du mal à trouver des adversaires. On était obligés parfois de ne pas l'informer quand on avait match. Mais quand il ne nous voyait pas, il se lançait à notre recherche'', poursuit Khalifa. Même pendant les ''navétanes'', il ne pouvait se départir de son costume d'anti-sportif. ''Une année, il avait voulu frapper le buteur de Fith Mith qui avait éliminé Manko en quart de finale, narre Malick Niang. Il se muait en protecteur de ses camarades contre leurs agresseurs. Il prenait toujours parti quand on avait des accrochages avec nos adversaires''.

 

 

Momar, la bête noire

 

Courageux, technique et fort, Balla Gaye 2 fait l'unanimité aujourd’hui autour de lui. Ni Saloum-Saloum, encore moins Modou Lô ou Tyson ne diront le contraire. Parmi les jeunes de sa génération, lutteurs comme anciens compagnons, le fils de Double Less sort du lot. Pendant son enfance, il battait presque tout le monde. Presque… parce qu’un certain Momar Kandji, un jeune vivant actuellement en Italie, était la bête noire du fils de Double Less. ''Omar était toujours battu par ce jeune, et pourtant, il était plus fort que lui. Momar était petit de taille, raconte Elhadji Niang, ancien détenteur de l'Arsenal mystique de Balla. Je misais du pain tartiné de chocolat pour le vainqueur et Momar Kandji, qui en voulait le plus, le terrassait toujours. On s'amusait à les voir combattre, et on faisait en toute sorte qu’Omar soit battu. Même quand il était sur ses trois appuis, on tranchait pour donner la victoire à Momar''.

 

 

Fils de...

 

''Bon sang ne saurait mentir'', dit un proverbe. Et pour s'en convaincre, il suffit de retracer le destin de Oumar Sakho alias ''Balla Gaye 2'', devenu un des meilleurs lutteurs du Sénégal. Ce garçon ne cesse de dire ferme, à qui veut l'entendre, que : ''Xaliss lamb legn ma guente (mon papa m'a baptisé avec l'argent qu'il a gagné dans la lutte)''. Non pas pour amuser la galerie mais pour rappeler qu'il hérité des gènes de son papa. Car il est venu au monde au moment où son géniteur, Double Less, régnait en maître dans les arènes sénégalaises. Il suffit de s’arrêter sur sa morphologie et sur... sa trajectoire pour voir que Balla Gaye 2 a presque tout de son père. Aujourd'hui, il est en train de marcher sur les pas du géant Double Less. Né en décembre 1986 à Guédiawaye (banlieue de Dakar), Balla Gaye 2 a vécu dans un environnement où la lutte a dominé les débats. Dès son jeune âge, ce fils de Double Less laissait apparaître les signes d'un futur lutteur. ''Chaque matin, il s'adonnait à la fameuse danse des lutteurs (bak, en ouolof)'', raconte Aïssatou Ndiaye, veuve de feu Cheikh Niang, ''père adoptif'' de Balla Gaye et ami de Double Less. Envoyé à l'école coranique chez Imam Ahmed Sy, Balla Gaye 2 n'a pu percer dans ces études. ''Il n'avait pas la détermination comme son jeune frère Sa Thiès et sa grande sœur. Il avait une grosse tête mais n’était pas très intelligent'', raconte son ancien maître coranique. Pendant tout le temps passé sur les nattes, Balla Gaye 2 n'a pu maîtriser qu'une dizaine de sourates. À l'école française, Omar s'arrête en classe de Cm1. ''Il n'était pas brillant. Je ne me souviens pas qu'il ait une seule fois la mention : leçon sue. Mais il était quand même sage en classe'', se rappelle son ancien camarade de classe à l'école 16 de Guédiawaye, Latsoukabé Soumaré. Après cet abandon prématuré, Omar est envoyé dans l’atelier mécanique d'un des amis de son papa, Cheikh Niang, situé vers la Cité Atepa à Golf avant de se retrouver chez Toubabou Dior comme vendeur de pièces détachées. ''C'est ma maman, qui le considérait comme son fils, qui me l'a confié, souffle le fils du défunt Cheikh Niang, Momar. Il a passé sept à huit ans en mécanique. C'est là qu'il a vraiment commencé à lutter avec les Aziz et Khadim Diop, quand on terminait tôt le travail''. Petit à petit, Omar se perfectionne et éblouit les amateurs de ''mbapatt'' en luttant avec le surnom de ''Mécanicien''. ''On misait un sac de riz, il me disait à chaque fois : ''Je vais apporter le lot à ma maman'', témoigne la veuve Aïssatou Ndiaye.

 

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ADAMA COLY

 

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