Publié le 18 Dec 2014 - 15:41
MAMADOU LAMINE NDIAYE, PRESIDENT CNP DE BOXE

’Il faut d’abord financer le sport local’’

 

A la tête du Comité national provisoire de la boxe (CNP) depuis 2004, Mamadou Lamine Ndiaye expose sur EnQuête ses réalisations, les difficultés auxquelles la discipline fait face. De même que ses perspectives.

 

Cela fait dix ans (2004-2014) que vous êtes à la tête du Comité national provisoire de la boxe (CNP). Quel bilan faites-vous de votre mandat ?

Je cois que le bilan est positif. Disons dans l’ordre de 10/20 parce qu’il y a des hauts et des bas. On ne peut pas participer à toutes les compétitions. Au niveau international, il y a un budget. Comme il y a plusieurs fédérations, le ministère fait un arbitrage budgétaire et attribue une petite somme à chacune. Mais le problème, c’est qu’au niveau local, il n’y a rien ; il n’y a pas de subvention. Pour participer au niveau international, il faut avoir une base alors qu’on n’a pas assez de compétitions. Ce qui fait que nos boxeurs n’auront pas suffisamment d’expériences. Il faut que le gouvernement renverse la situation. Il faut d’abord financer le sport local. Mais c’est le contraire qui se fait.

Ce qui est positif durant ces 10 ans, c’est qu’on a participé régulièrement à plusieurs championnats d’Afrique où on a remporté des médailles. Dans l’administration de la Fédération internationale de boxe amateur (plus connue sous le nom d’Association Internationale de Boxe Amateur, AIBA), le Sénégal est membre très important du Comité exécutif. On est reconnu à la zone 2 (Confédération africaine de boxe, CAFB). La fédération internationale organise un camp d’entraînement 10 jours avant les Championnats du monde ou les Coupes du monde et le Sénégal y est toujours invité. Tous les frais sont pris en charge par l’AIBA.   

Quelle était la situation de la boxe quand êtes arrivé ?

C’est depuis 2004 que le ministre des Sports Youssou Ndiaye a installé le CNP de boxe. De 2000 à 2004, il n’y avait pas de structure. Il m’a contacté pour que je dirige le CNP. J’ai donné mon accord parce que je voulais me rendre utile pour mon pays qui m’a tout donné. Il nous a soutenus. A ce moment, il n’y avait rien. Il a financé un ring pour les compétitions. On a commencé nos compétitions nationales et internationales. Youssou Ndiaye est parti au bout de deux ans. Ensuite, plusieurs ministres se sont succédé et le même problème s’est posé à chaque fois, celui du financement du sport en général et de la boxe en particulier.

On pense plutôt au football qu’aux autres disciplines. On reconnaît que c’est un sport qui mobilise du monde, mais qu’on attribue au football ce qui lui revient et qu’on n’oublie pas les autres disciplines. Quand Bacar Dia est venu, il a vu l’importance que la boxe pouvait avoir dans ce pays, il a initié le programme ‘’Une région un ring’’ car il en manquait. Sans ring, il ne peut y avoir de compétitions. Le football a besoin de terrain, le basket d’un parquet, la boxe d’un ring. A l’époque, on avait un seul ring pour tout le Sénégal. Il a commencé par financer un ring. Malheureusement, il est parti très tôt. Et ses successeurs n’ont pas suivi le programme. Nous sommes restés au même stade : toujours le manque de rings et de moyens.

Quelle est la mission qui vous a été assignée ?

La mission du CNP était de développer la boxe au Sénégal en essayant de la vulgariser dans toutes les régions. Il fallait aussi représenter le Sénégal sur plan international. Il faut maintenant arrêter, notre mandat doit se terminer en janvier 2016. Pour le moment, on a revu les statuts et le règlement intérieur de la Fédération sénégalaise de boxe. On l’a étudié et envoyé aux clubs. Ces derniers vont l’examiner et nous faire part de leurs propositions, d’ici fin novembre (dernier). C’est à ce moment qu’on va adresser tout cela au ministère (Sports) pour validation. On s’est fixé un délai jusqu’en janvier 2015. Si le ministre valide ces statuts d’ici à juin 2015, on va soit renouveler soit monter les ligues. En décembre 2015, on pense à la tenue de l’Assemblée générale élective pour mettre en place la fédé. C’est d’ailleurs la volonté du Comité olympique et du ministère des Sports. 

La boxe sénégalaise n’est pas tellement visible. Qu’est-ce qui explique cela ?

C’est vrai que la boxe n’a pas de visibilité. Il y a des gens qui ne savent pas qu’il y a la boxe au Sénégal. Pourtant on organise souvent des galas de boxe. Malheureusement ça ne passe pas à la télévision. Pour y remédier, on avait, il y a 2 ans, signé un contrat avec la 2Stv pour filmer nos matches. Cela aurait permis d’avoir des sponsors. Malheureusement la convention n’a pas abouti. Actuellement, on cherche à ficeler un partenariat avec une chaîne de télé pour filmer nos galas. J’ai écrit à une vingtaine de sociétés pour du sponsoring. Elles me disent que nous n’avons pas de monde, qu’elles préfèrent aller à la lutte. C’est ça notre handicap.

Qu’est-ce que vous faites pour permettre aux boxeurs des autres clubs de l’intérieur du pays de se frotter à ceux de Dakar ?

Quand on organise des galas, on invite des boxeurs d’autres régions : Mbour, Kaolack. Mais ça ne va pas au-delà. S’il faut inviter un boxeur de Saint-Louis ou Kolda, il faudra prendre en charge son transport alors qu’on est très pauvre.

Avez-vous prévu des formations pour vos techniciens ?

La formation est un point extrêmement important. Jusqu'à présent, on forme des entraîneurs. On en a formé plusieurs. Mais après, ils vont entraîner les lutteurs. C’est dans la formation des arbitres-juges qu’on souffre. Au plan local, on a déjà organisé des séances. Mais si un arbitre veut aller au niveau international, il faut que ce soit agréé par la Confédération africaine de boxe ou la fédération internationale. Là, c’est à l’ occasion des grands événements que des stages sont organisés pour les arbitres-juges. Le problème est que c’est l’arbitre-juge lui-même qui paie son billet.

C’est coûteux. C’est un problème général pour toute l’Afrique. On ne trouve pas d’arbitre-juge subsaharien dans les compétitions internationales. Il n’y a que des Maghrébins. Ceux-là sont plus près de l’Europe où ils vont faire des formations. C’est parce que la confédération africaine de boxe (CAFB) n’a pas fait son travail. On va vers un congrès en novembre. C’est un problème à poser.  

Avez-vous prévu de promouvoir la boxe féminine ?

C’est même dans la politique de la fédé de favoriser la boxe féminine. C’est la raison pour laquelle, cette année, on a nommé un nouvel entraîneur, Ibrahima Touré Diouf. Les filles s’entraînent au stade Iba Mar Diop. On est en train de monter une équipe nationale féminine. On verra beaucoup de filles venir à la boxe quand elles s’apercevront qu’il y a de nombreuses perspectives. On voudrait que dans tous nos galas, il y ait des combats de filles. Et le 5 décembre 2014, on envisage d’ouvrir la saison avec un gala purement féminin.’’ 

LOUIS GEORGES DIATTA

 

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