Publié le 26 Jul 2017 - 12:03
MANIFESTATION AVORTEE DE ME WADE

La place  de l’Indépendance bunkeurisée

 

Abdoulaye Wade a tenté hier de marcher sur la Place de l’Indépendance, mais il n’a pas réussi. Il s’est heurté à une forteresse de la Police. 

 

Abdoulaye Wade n’a pas franchi le Rubicon. Les troupes d’Abdoulaye Daouda Diallo ont été hier imprenables. Ils ont quadrillé le terrain dès les premières heures de l’après-midi. A notre arrivée à 16 heures, toutes les voies menant à la mythique place sont bloquées. Des sirènes de la Police qui hurlent. Quelques manifestants qui grondent, non loin de la zone dangereuse. Des commerçants qui ont fermé boutique. Le décor qu’offre la Place de l’indépendance est inhabituel.

Sur les lieux, l’on ne dénombre pas moins de 40 éléments du Groupement mobile d’intervention vêtus de leurs tenues de combat. Sans compter ceux positionnés le long des voies d’accès. En plus des pick-up et des camions. Même le fameux Dragon (véhicule contenant de l’eau chaude pour disperser les foules) a été mobilisé. ‘’Cela ne nous empêchera pas de marcher parce que c’est notre droit le plus absolu. Nous irons à la Place de l’indépendance de gré ou de force. Tout ce que nous réclamons, c’est que tous les citoyens puissent disposer de leurs cartes d’électeur. Dans quels pays sommes-nous ? Je pense que ça, c’est une honte et tout le gouvernement devrait démissionner’’, fulmine Moussa Niang vêtu d’un tee-shirt blanc à l’effigie du pape du Sopi. Il s’est arrêté non loin du Rond-point Sandaga, à côté de la Pharmacie Guigon.

Plus loin, vers la place interdite, une vingtaine de militants du Parti démocratique sénégalais sont réunis. Les cœurs sont lourds. Les nerfs tendus. Jeunes, pour la plupart, ils ne décolèrent pas contre le régime. Et ils tiennent à l’exprimer devant les médias. Sentant que le groupe commençait à se densifier, trois pick-up remplis de policiers quittent la Place de l’indépendance et se dirigent vers le groupe de jeunes avec le Dragon. Les manifestants chantent : ‘’Goor Gui yaa yeungueul Senegaal... (Gor Gui c’est toi qui fait bouger le pays’’, scandent-ils faisant front au camion de terreur. A la place des jets d’eau, ils recevront des lacrymogènes lancés au milieu du groupe. C’est la débandade. Ça pique dans les yeux. Comme du piment. Certains sont en pleurs. D’autres ont les nez qui coulent. La mobilisation est terminée. Dans la masse, on ne distingue plus manifestants, marchands et simples badauds.

Adji Astou Diouf vient de Benn Tally. La trentaine, elle peste fort : ‘’Je suis venue ici parce que je n’ai toujours pas reçu ma carte. Nous sommes des citoyens comme tout le monde. Pourquoi ils refusent de nous donner nos cartes. Je suis inscrite depuis plus de huit mois. Jusqu’à présent je n’ai pas ma carte, alors que je connais des gens qui se sont inscrits il y a même pas deux mois et  qui ont reçu leurs cartes. Tous les jours je me rends dans les commissions mais on me dit la même chose. J’en ai marre. J’ai le droit de voter comme tout le monde’’.

Aminata Niang de Grand Yoff, Ndèye Niang de Plateau déplorent, elles aussi, la non disponibilité de leurs cartes d’identité biométrique. ‘’Moi, je suis inscrite depuis le mois de février. Je n’ai toujours pas ma carte. Je suis découragée. Pas plus tard que ce matin, j’étais dans mon centre de vote pour retirer ma carte. Je suis restée là-bas pendant trois heures. A l’arrivée, on me dit que ce n’est pas disponible. J’ai dit au membre de la Commission qu’ils n’ont qu’à manger la carte s’ils veulent. Je trouve donc que la manifestation est tout à fait légitime’’.

Mais, la marche d’Abdoulaye Wade n’a pas fait que des heureux. Moustapha Sarr, trouvé sur l’Avenue Ponty avec sa marchandise regrette : ‘’Abdoulaye Wade n’a qu’à nous laisser en paix. A chaque fois qu’il vient ici c’est pour nous créer des problèmes. J’avoue que le combat est légitime mais pourquoi tient-il coûte que coûte à marcher sur cette place interdite. A cause de lui, je n’ai vu aucun client aujourd’hui. C’est un préjudice énorme’’. Pendant ce temps, les policiers continuent de veiller au grain, à  la Place Protêt, comme au Ministère de l’Intérieur où devait prendre fin la marche. Ici, le dispositif est impressionnant. En plus des hommes, la Police a également installé des herses pour parer à toute tentative de forcing de la part de l’ancien président. Ainsi, Général Wade qui voulait franchir la ligne rouge, s’est heurté au mur infranchissable du ministre de l’Intérieur. Rideau ! 

MOR AMAR

Section: